Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Laurence Dumont
Question N° 18157 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 12 février 2013

Mme Laurence Dumont interroge M. le ministre de l'intérieur sur la mise en œuvre de l'engagement de campagne n° 30 de F. Hollande de mettre en place « une procédure respectueuse des citoyens » afin de « lutter contre le délit de faciès », délit de faciès dont l'existence a été établie par de nombreux rapports dont celui d'Open society justice initiative, publié en 2009, « Police et minorités visibles : les contrôles d'identité à Paris ». Le commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS, désormais intégrée au Défenseur des droits (DDD) et la Commission nationale consultative des droits de l'Homme ont alerté les autorités françaises sur cette pratique. À ce jour, le ministère de l'intérieur a annoncé la modification du code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie, la réintroduction d'un matricule sur l'uniforme des agents, et des assises sur la formation. Dans un récent rapport le Défenseur des droits a recommandé l'expérimentation d'un récépissé de contrôle. Fondée sur la situation française, ainsi que sur les expériences réalisées dans d'autres pays, huit organisations nationales et internationales (GISTI, Graines de France, Human rights watch, la Ligue des droits de l'Homme, la Maison pour un développement solidaire, Open society justice initiative, le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature) préconisent un ensemble de mesures qu'elles estiment indispensables pour respecter la proposition n° 30, telles que : réformer l'article 78-2 du code de procédure pénale ; encadrer juridiquement la pratique de palpations de sécurité ; remettre un récépissé de contrôle ; organiser un dialogue entre police et population sur la pratique des contrôles d'identité ; renforcer la formation des policiers ; modifier les critères d'évaluation et de promotion des policiers. Aussi, elle souhaite connaître sa position sur ces préconisations ainsi que les mesures qu'il entend mettre en œuvre pour réformer les contrôles d'identité et améliorer les relations police-citoyens.

Réponse émise le 24 septembre 2013

Les contrôles d'identité sont effectués dans le cadre des articles 78-1 et suivants du code de procédure pénale et sous le contrôle de l'autorité judiciaire, avec pour objectifs la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions à la loi pénale. Ils ne peuvent intervenir, à l'initiative des forces de l'ordre ou sur réquisition du procureur de la République, que dans des cas limitativement définis. A ce cadre légal, qui exclut tout contrôle discriminatoire, s'ajoutent les règles déontologiques auxquelles sont tenus les policiers et les gendarmes et qui imposent un respect absolu des personnes. Dans les faits cependant, des interrogations se sont développées dans le débat public sur les contrôles d'identité « au faciès ». Ce débat ne peut être ignoré. Les contrôles d'identité sont essentiels à l'activité des services et déterminants dans la lutte contre la délinquance, mais ils ne sauraient être ni abusivement répétés à l'égard des mêmes personnes, ni multipliés sans discernement dans tel ou tel quartier. Le Président de la République s'est ainsi engagé « à lutter contre le 'délit de faciès' dans les contrôles d'identité par une procédure respectueuse des citoyens » (engagement n° 30). Le Gouvernement, et en premier lieu le ministre de l'intérieur, a mené un travail approfondi afin de mettre en oeuvre cet engagement. Il s'agit de définir les moyens les plus adéquats pour parvenir à cet objectif. Après de nombreux échanges, il est apparu que la proposition tendant à la délivrance d'un récépissé ne constituait pas la meilleure solution et qu'elle présentait elle-même beaucoup de lourdeurs procédurales et d'inconvénients. Elle est d'ailleurs peu développée à l'étranger. Cette proposition reviendrait à mettre en place un système excessivement bureaucratique, lourd à gérer et dont la mise en oeuvre concrète compliquerait, de manière déraisonnable, le travail des policiers et des gendarmes sur le terrain. Elle serait de surcroît porteuse de difficultés juridiques, notamment quant à la constitution de fichiers. D'autres choix ont été faits. Un nouveau code déontologie, commun à la police et à la gendarmerie nationale, sera prochainement publié et permettra de moderniser et de compléter les règles déontologiques qui s'appliquent déjà aux forces de l'ordre, y compris s'agissant du déroulement des contrôles d'identité légitimement mis en oeuvre et du déroulement des palpations de sécurité, qui ne doivent pas être humiliantes. Le principe de l'identification des policiers en intervention figurera également dans le prochain code de déontologie et sera mis en oeuvre dans les mois qui viennent. Les règles déontologiques doivent bien sûr se traduire dans la pratique quotidienne des policiers et des gendarmes. C'est pourquoi la formation théorique et pratique aux contrôles d'identité et aux palpations de sécurité a été renforcée dans les écoles de formation intiale. Si l'ordre républicain doit prévaloir partout, il doit être garanti dans le strict respect des libertés publiques et de la déontologie. Des forces de l'ordre exemplaires sont en effet mieux respectées, plus efficaces. Il en va de leur légitimité et de leur autorité vis-à-vis de la population. Au-delà des enjeux d'éthique et de déontologie, le ministre de l'intérieur souhaite plus globalement ouvrir un nouveau chapitre dans les relations entre la police et la gendarmerie et la population, notamment à l'occasion des patrouilles ou interventions sur la voie publique, pour renforcer le lien de confiance et le respect mutuel. Ceci passe en particulier par une présence accrue, visible et rassurante, des policiers et des gendarmes sur le terrain, permettant de développer les contacts avec la population. La décision du Gouvernement d'accroître les effectifs de police et de gendarmerie y contribuera. Renforcer la confiance passe également par d'autres mesures concrètes comme par exemple l'utilisation des caméras portatives par les forces de l'ordre au cours de leurs interventions. La police nationale mène en ce moment une expérimentation dans les zones de sécurité prioritaires (ZSP). Il faut également donner à nos concitoyens l'assurance que les manquements aux règles commis par les membres des forces de l'ordre sont poursuivis et sanctionnés. C'est pourquoi, le ministre a décidé, dans le cadre de la réforme de l'inspection générale de la police nationale (IGPN), la mise en place d'une plateforme de signalement qui sera à la disposition de toutes les personnes s'estimant victimes ou témoins d'un manquement à la déontologie ou d'une infraction de la part d'un policier.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion