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Hervé Féron
Question N° 93243 au Ministère de l'économie


Question soumise le 16 février 2016

M. Hervé Féron interroge M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique au sujet de l'évaluation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Ce dispositif voté dans la loi de finances rectificative pour 2012, et entré en vigueur le 1er janvier 2013, prévoit des réductions de charge pour les entreprises dans le but d'améliorer leur compétitivité et de favoriser les efforts en termes d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation et d'emploi. Face au risque de voir certaines entreprises exiger de leurs fournisseurs des baisses de tarif au motif qu'ils seraient bénéficiaires du CICE, le Gouvernement a mis en place le 25 juillet 2013 un comité de suivi du CICE présidé par Jean Pisani-Ferry, commissaire général à la stratégie et à la prospective, afin d'évaluer le dispositif. Ce comité, qui a rendu en septembre 2015 son troisième rapport, explique qu'il est encore trop tôt pour publier des résultats d'évaluation ex-post, et les premiers résultats d'évaluation des effets à court terme du CICE ne sont attendus qu'au printemps ou à l'été 2016. Pourtant, de nombreux éléments convergent pour montrer que certaines entreprises bénéficiaires du CICE ont recours à des pratiques déloyales pour augmenter leurs marges, au détriment de l'emploi et de l'investissement productif. À titre d'exemple, M. le député a été alerté par une entreprise de sa circonscription qui fournit de longue date des produits à un groupe de la grande distribution. Ce dernier a décidé, sous prétexte de motifs discutables, de déréférencer tous les produits de cette PME française, mettant en péril de nombreux emplois, dans le seul but de se fournir auprès d'un producteur étranger à un coût moindre. S'il n'y a pas lieu de suspecter les PME qui avaient grandement besoin du CICE, il est néanmoins choquant que des entreprises qui délocalisent puissent bénéficier de l'argent public censé améliorer la compétitivité et préserver l'emploi sur le territoire. C'est pourquoi il souhaite l'interroger sur les mesures que le Gouvernement envisage pour renforcer le contrôle de l'utilisation du CICE et l'assortir de contreparties en termes d'emplois, ainsi que de rendre possible sa suppression pour les entreprises qui auraient recours à des pratiques déloyales vis-à-vis de leurs fournisseurs.

Réponse émise le 24 janvier 2017

Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), prévu à l'article 244 quater C du code général des impôts, a été institué en faveur des entreprises imposées d'après leur bénéfice réel et soumises à l'impôt sur les bénéfices (impôt sur les sociétés et impôt sur le revenu) quel que soit le mode d'exploitation de ces entreprises et quelle que soit la catégorie d'imposition à laquelle elles appartiennent (bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices non commerciaux, bénéfices agricoles), dès lors que ces entreprises emploient du personnel salarié. Le crédit d'impôt est égal à 6 % de la masse salariale brute supportée au cours de l'année pour les rémunérations inférieures ou égales à 2,5 SMIC. Lorsque l'assiette du crédit d'impôt est constituée par des rémunérations versées à des salariés affectés à des exploitations situées dans les départements d'Outre-mer, son taux est fixé à 7,5 % pour les rémunérations versées en 2015 et à 9 % pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2016. Ce crédit d'impôt a pour objet, en diminuant le coût du travail, d'améliorer la compétitivité des entreprises et ainsi leur permettre de réaliser des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement. Compte tenu de l'ampleur du dispositif, des outils de suivi de l'utilisation du CICE ont été mis en place à différents niveaux. Cependant, il s'agit d'afficher des objectifs et d'instaurer de la transparence, il ne s'agit pas de se substituer aux chefs d'entreprise pour leur imposer des choix de gestion. Les objectifs affectés au CICE doivent s'entendre comme des éléments de cadrage et non comme des conditions d'octroi du crédit d'impôt. Ainsi, le comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements qui est notamment composé de plusieurs représentants des principaux syndicats de salariés, se réunit régulièrement pour assurer le suivi et l'évaluation du CICE. Dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, les contreparties demandées aux entreprises en termes d'emploi, de formation professionnelle et de qualité d'emploi, ont été présentées dans leurs grandes lignes dans l'accord conclu entre les partenaires sociaux le 5 mars 2014, et ont déjà été précisées dans plusieurs accords de branche. Enfin, au niveau de l'entreprise, le code du travail prévoit que le comité d'entreprise est informé et consulté sur l'utilisation du crédit d'impôt et peut transmettre en cas d'explications insuffisantes et inexistantes de l'entreprise, un rapport au comité de suivi régional instauré par la loi de finances rectificative pour 2012. Par ailleurs, une entreprise ne peut pas tirer prétexte du CICE pour exiger de son partenaire commercial une révision de prix convenu contractuellement. A ce titre, le code de commerce contient plusieurs dispositions dont l'objectif est de garantir des relations commerciales transparentes et loyales entre professionnels. Il vise à assurer que le déséquilibre dans les rapports de force entre entreprises n'est pas nuisible à l'intérêt général, en entravant le développement d'entreprises économiquement efficaces, voire en les conduisant à la faillite. A cet égard, les pratiques consistant à tirer prétexte du CICE pour remettre en cause le prix convenu contractuellement, et a fortiori pour en bénéficier rétroactivement, sont prohibées (cf. articles L. 441-7 et L. 442-6 du code de commerce). Afin de lutter contre ces pratiques abusives, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a publié sur le site www.economie.gouv.fr des fiches pratiques sur la procédure à suivre en cas de captation du CICE. Les entreprises qui s'estiment victimes d'une demande abusive de baisse de tarifs peuvent ainsi s'adresser à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, éventuellement sous couvert d'anonymat, afin de faire connaître les pratiques abusives de leurs partenaires économiques. En cas d'abus, les représentants du ministre chargé de l'économie pourront agir, pour mettre fin au trouble à l'ordre public économique causé par de telles pratiques, devant le tribunal de commerce, et ce sans même le consentement ni la présence à l'instance des entreprises victimes. La loi prévoit une amende civile pouvant aller jusqu'à 2 M€, ainsi que la restitution à la victime des sommes indûment perçues.

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