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Bernard Reynès
Question N° 92406 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 19 janvier 2016

M. Bernard Reynès attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la crise agricole importante à laquelle doivent faire face les maraîchers français, producteurs de légumes d'hiver, et plus particulièrement les producteurs de salades de Provence. La production de salades de Provence représente plus de 60 % du volume français des salades tendres (laitue, batavia, feuille de chêne) produites en hiver. Un volume qui s'explique notamment par les conditions climatiques plus favorables dans cette région, qui alimente la France entière ainsi que de nombreux pays de l'Europe du Nord où les hivers particulièrement froids ne permettent pas cette culture. Le climat doux des mois d'octobre, novembre et décembre 2015 a favorisé la croissance rapide des productions et donc conduit à augmenter les volumes mis en marché. Parallèlement, les températures élevées enregistrées au dernier trimestre 2015 ont détourné les consommateurs des légumes d'hiver, particulièrement celle des salades, dont la consommation actuelle ne parvient pas à absorber les fortes disponibilités. Ce faisant, les volumes d'invendus augmentent et certains agriculteurs sont contraints de détruire leurs productions arrivées à terme. Quant aux maraîchers réussissant à écouler leurs produits, ils doivent faire face à des prix extrêmement bas. En effet, l'offre étant plus élevée que la demande : les cours de la salade d'hiver ont chuté rapidement, et ce dès le début de la campagne. Ainsi, la salade d'hiver produite actuellement en France se vend de 10 à 15 cents l'unité, prix d'achat production, alors qu'il faudrait un prix supérieur à 30 cents pour permettre aux producteurs de vivre de leur travail. Nos agriculteurs ne pourront faire face à cette crise si celle-ci s'installe durablement. Pour rappel, l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, FranceAgriMer, avait déclaré la filière salade en crise conjoncturelle dès le 18 novembre 2015, état de crise qu'il mentionne à nouveau sur sa note conjoncturelle en date du 15 décembre 2015. La gravité et l'urgence de la crise subie par les producteurs de salade s'ajoute à celle que subissent les arboriculteurs dont les récoltes de pommes s'écoulent très difficilement - lorsqu'elles trouvent preneurs - en raison notamment de la fermeture des marchés russes en riposte aux sanctions occidentales. Plus globalement, la crise dont sont actuellement victimes les producteurs provençaux de salade s'inscrit dans la crise que traverse depuis plusieurs années l'agriculture française et appelle des mesures urgentes. Compte tenu de cette situation, il l'interroge sur les mesures que le Gouvernement entend prendre pour mettre un terme à cette crise qui met gravement en péril les producteurs de Provence et de France et, compte-tenu de l'avancement de la saison, demande au Gouvernement d'agir rapidement.

Réponse émise le 19 avril 2016

La filière des légumes d'hiver connaît actuellement une campagne difficile résultant essentiellement de la douceur des températures qui influe négativement sur la demande et conduit à une augmentation des volumes avec une qualité des produits hétérogène. Cette offre abondante est constatée également dans d'autres pays de l'Union européenne et la concurrence avec les productions espagnoles et italiennes, en particulier, constitue un facteur aggravant de la situation, notamment dans le cadre de l'embargo décrété par les autorités russes. De ce fait, la salade a pu connaître ces derniers mois plusieurs périodes qualifiées de crises conjoncturelles. Afin de faire face à ce type de situation de crise conjoncturelle, plusieurs dispositifs existent tant au niveau national qu'au niveau européen. Au niveau européen, l'ensemble des producteurs de fruits et légumes regroupés en organisations de producteurs peuvent procéder à des interventions sur les marchés à travers les programmes opérationnels mis en œuvre dans le cadre de l'organisation commune des marchés, qui peuvent notamment prendre la forme de mesures de prévention et gestion de crises. Concernant l'embargo russe, s'agissant d'une situation imposée à l'ensemble des États membres de l'Union européenne, un consensus s'est dégagé pour que des solutions puissent être rapidement mises en œuvre au niveau européen. Des dispositifs d'intervention exceptionnels au bénéfice du secteur des fruits et légumes ont ainsi été mis en place en 2014 par quatre règlements et ont été prolongés jusqu'au 30 juin 2016. Les producteurs peuvent ainsi bénéficier d'un soutien financier de l'Union européenne pour des opérations de retrait, de non-récolte et de récolte en vert pour un certain nombre de produits. Ces dispositifs sont ouverts tant aux organisations de producteurs qu'aux producteurs qui ne sont pas membres de ces dernières. Au niveau national, des dispositifs permettent également d'atténuer les effets de la variabilité des prix agricoles. Parmi ceux-ci, la contractualisation permet de favoriser la stabilisation des prix et permet ainsi aux producteurs d'avoir une meilleure visibilité de leurs débouchés. En outre, des dispositifs visant à alléger le coût du travail par des exonérations et des baisses de charges existent en France, qui permettent de soulager les producteurs. Il s'agit notamment du dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » et du dispositif de crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) qui sont poursuivis en 2016. Le pacte de responsabilité et de solidarité contribuera cette année encore à alléger les charges supportées par les entreprises, y compris les exploitations agricoles. Par ailleurs, les producteurs de légumes d'hiver, comme les autres chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole en difficulté, ont la possibilité de solliciter auprès de leur caisse de mutualité sociale agricole (MSA) des aides au paiement de leurs cotisations sociales. En effet, les caisses de MSA peuvent mobiliser des crédits d'action sanitaire et sociale, dans le cadre d'un dispositif pérenne de droit commun, en vue d'accorder des délais de paiement pour les cotisations tant personnelles que patronales dues par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole. Face aux difficultés particulières rencontrées depuis plusieurs mois par les agriculteurs, plusieurs dispositifs exceptionnels ont été décidés par le Gouvernement en complément de ces dispositifs pérennes afin de sortir de la crise agricole actuelle et renforcer nos filières françaises. C'est ainsi qu'une enveloppe de 5 millions d'euros de prises en charges de cotisations sociales a été répartie entre les caisses de MSA pour soutenir les producteurs de chou-fleur, de salade et de mâche les plus en difficulté. De plus, un dispositif d'option à titre exceptionnel pour le calcul des cotisations et contributions sociales a été mis en place par la mutualité sociale agricole pour l'ensemble des agriculteurs, y compris dans le secteur des fruits et légumes : le calcul des cotisations et contributions sociales pour l'année 2016 peut être effectué sur une assiette annuelle au titre de l'année 2015, afin de prendre en compte la baisse des revenus professionnels pour calculer les cotisations. Par ailleurs, conformément à l'engagement du Président de la République pris le 11 février 2016, le Premier ministre a annoncé une baisse immédiate de sept points des cotisations sociales pour tous les agriculteurs, qui sera instaurée par décret. Cette baisse s'ajoute à la baisse de trois points des cotisations familiales depuis le début d'année, ce qui équivaut donc à une baisse totale de 10 points des cotisations sociales des agriculteurs, soit environ 25% et sera applicable au 1er janvier 2016. De plus, une année blanche sociale sera mise en place pour les agriculteurs qui auront dégagé en 2015 un revenu très faible qui se traduira par un report automatique d'un an, reconductible dans la limite de 3 ans, de toutes les cotisations 2016. Enfin, le Gouvernement a décidé d'élargir à d'autres filières en difficulté, notamment les fruits et légumes, le dispositif de restructuration bancaire établi dans le cadre du plan de soutien à l'élevage avec un abondement exceptionnel de 25 M€. Ce dispositif vise à alléger la charge annuelle qui pèse sur les agriculteurs en difficulté en les aidant à restructurer leurs prêts à moyen et long terme et permettre, le cas échéant, d'aboutir à une année blanche partielle ou totale. Les producteurs en difficulté peuvent se signaler auprès de la direction départementale des territoires (et de la mer) dont ils dépendent, afin d'examiner avec eux la mise en place d'un accompagnement adapté à leur situation. Le Gouvernement reste ainsi fortement mobilisé pour accompagner les producteurs en difficulté dans les filières des fruits et légumes.

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