Intervention de Philippe Goujon

Réunion du 5 juillet 2016 à 9h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon :

Je souscris, pour ma part, à l'idée d'introduire dans le rapport cette quarantième proposition.

Je tiens à vous rendre hommage, monsieur le président, monsieur le rapporteur, pour la qualité de ce travail considérable, mené dans un esprit guidé par l'intérêt général et non pas par des considérations politiciennes – ce qui est assez rare pour être souligné.

Si j'approuve cet excellent projet de rapport, je ferai néanmoins quelques remarques. D'abord, sur le plan budgétaire, même si nous ne sommes pas à la commission des finances et même si, donc, il ne s'agit pas de budgéter chaque mesure, il aurait peut-être fallu indiquer quelques grandes orientations étant donné que de nombreuses propositions sont très coûteuses. Ensuite, je suis favorable à l'accélération de la fusion des forces telles que le RAID, la BRI, le GIGN… alors que le projet de rapport propose de procéder par étapes. En effet, une telle accélération permettrait, à l'avenir, d'éviter les polémiques qui ont suivi l'intervention au Bataclan – même si je rends bien sûr hommage à la BRI et à tous les effectifs qui ont participé à l'opération. La réforme Cazeneuve de localisation présente le risque, dû à la procédure d'urgence absolue, de voir des forces pensant pouvoir intervenir parce qu'elles sont les plus proches du lieu de l'événement, entrer en concurrence. Il y a donc pire que le retard des forces : il y a la concurrence de forces arrivant en même temps sans être suffisamment coordonnées.

En matière de sécurité générale, le commandement unique d'une organisation intégrée telle que la préfecture de police par le préfet de police est indispensable pour Paris et son agglomération. L'audition du directeur du renseignement de la préfecture de police (DRPP) n'a pas été très convaincante et votre proposition d'éclatement de la DRPP peut très bien se justifier. En revanche, il faudrait – je sors un peu du cadre de la présente commission – réformer globalement la préfecture de police dont l'organisation repose sur l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII, mais aussi sur une réforme de 1998 instaurant la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP) d'un côté et la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) de l'autre, schéma qui, tous les observateurs le reconnaissent, ne fonctionne plus du tout. Si bien qu'on compte beaucoup trop de services cloisonnés, d'états-majors qui ne se parlent pas, qui se concurrencent. Tout cela va sans doute voler en éclats avec la réforme du statut de Paris – la préfecture de police devant perdre toute la partie liée à la circulation, au stationnement mais aussi un certain nombre de polices spéciales.

Nous sommes un certain nombre à penser qu'il faut aller vers une police municipale qui permettrait précisément à la police nationale, à la préfecture de police, de se concentrer sur des missions essentielles comme, outre le maintien de l'ordre public, la lutte contre le terrorisme, la criminalité… La préfecture de police doit donc également abandonner ce que j'appellerai la police de la tranquillité publique au profit d'une police municipale.

Pour ce qui est de la vidéosurveillance, il faut bien admettre qu'un millier de caméras installées à Paris est un chiffre ridicule si on le compare aux 75 000 reliées à Scotland Yard à Londres.

J'en viens à la question pénale. Il convient de durcir les peines des détenus radicalisés : isolement total – ce qui suppose des bâtiments adéquats –, interdiction des visites, pratique systématique des fouilles… Il faut aussi modifier le régime des prévenus qui font du prosélytisme alors qu'ils ne sont pas isolés des autres détenus. Cela, sans oublier les problèmes liés à la surveillance des fichés S, aux centres de rétention, de déradicalisation… Le parquet antiterroriste de Paris est largement débordé et, à cet égard, l'idée d'une régionalisation est intéressante.

Ensuite, tout le monde semble s'accorder pour mettre un terme à l'opération Sentinelle – mais par quoi la remplacer ? Vous évoquez le recrutement de forces de sécurité, fort bien, mais disposera-t-on du budget nécessaire et pour combien de temps ? Et que penser d'une garde nationale ?

Enfin, en ce qui concerne l'hospitalisation, il convient d'associer le secteur privé car l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) pose de nombreux problèmes quant à la concentration de l'ensemble des blessés, mais aussi à l'organisation des urgences – on ne peut pas se contenter des hôpitaux militaires ni, donc, de l'AP-HP.

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