Intervention de Christophe Bouillon

Réunion du 29 juin 2016 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Bouillon, rapporteur :

J'observe que trois familles de questions sont posées : elles portent sur le coût, sur la définition et les modalités de mise en oeuvre de la réversibilité, la dernière sur ma personne – sujet sur lequel, bien évidemment, je vais répondre.

En tant que rapporteur « à durée déterminée » d'un texte, je ne saurais être le rapporteur d'un contexte. C'est pourquoi, au sujet du coût de l'opération, je renvoie aux auditions qui ont été pratiquées au sein de notre commission : nous avons entendu l'ASN, l'ANDRA au mois de février dernier, l'IRS l'année dernière. Je vous renvoie également aux travaux de la commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire, qui a rendu son rapport le 5 juin 2014. Enfin, la Cour des comptes a également travaillé sur ce sujet.

M. Yannick Favennec m'a interrogé sur la définition de la réversibilité : la proposition de loi précise de façon très large cette notion qui englobe la progressivité de la construction par tranche de l'installation Cigéo, les capacités d'adaptation de cette construction ainsi que la flexibilité de l'exploitation. Par ailleurs, et nombre de nos collègues l'ont rappelé, la question de la réversibilité ne se résume pas à celle de la capacité à récupérer les colis de matières contaminées. Il s'agit surtout, et cela est essentiel, de permettre aux générations successives de pouvoir réévaluer et, le cas échéant, de faire évoluer le projet en fonction de progrès technologiques ou de choix de politique énergétique qu'elles seront susceptibles d'opérer.

Il s'agit de laisser aux générations futures un droit d'option, car nous avons aujourd'hui la responsabilité de ces déchets nucléaires. Je rappelle que, lorsque nous Français utilisons cette énergie pour nous éclairer et nous chauffer ou lorsque nous subissons un examen radiologique, nous produisons des déchets radioactifs, qui existent et sont entreposés.

La directive EURATOM et les divers travaux scientifiques et sociologiques ont largement démontré, et Mme Michèle Bonneton l'a souligné, que ces matières très dangereuses et durablement actives devaient faire l'objet d'un traitement approprié. La meilleure protection des hommes et de l'environnement réside dans l'enfouissement en couches géologiques profondes dont le principe a été décidé il y a dix ans par la représentation nationale.

Je remercie M. Jean-Marie Sermier d'avoir posé la question de ma situation personnelle, car cela me permet d'y répondre. Il n'y a pas de conflit d'intérêts, alors que je vois bien que certains ont intérêt au conflit. Je ne travaille pas à l'ANDRA, j'y occupe une fonction qui n'est pas exécutive : je préside le conseil d'administration depuis le mois de janvier dernier et ne perçois aucune indemnité à ce titre. C'est une fonction bénévole.

Par ailleurs, ce n'est pas l'ANDRA qui fait la loi, mais c'est la loi qui fait l'ANDRA, puisque la création de cet organisme résulte d'une disposition de la loi Bataille et c'est la loi qui détermine ses missions. Il s'agit d'une agence publique, pas d'une entreprise privée ; l'ANDRA est indépendante des producteurs de déchets radioactifs que sont EDF, Areva et le CEA. Plusieurs parlementaires et élus locaux siègent au conseil d'administration de l'Agence, ce qui constitue une garantie démocratique. C'est leur absence qui eût été inquiétante ; ces élus veillent à la bonne application de la loi, que nous contribuons ici à élaborer.

J'avais anticipé ce faux débat, qui constitue pour certains un moyen pour éluder le fond de la question et ignorer le texte qui nous occupe aujourd'hui. On ne peut pas à la fois dire qu'il convient d'avoir le souci des générations futures et trouver tous les moyens possibles pour ne pas parler de la réversibilité qui, précisément, demeure le meilleur moyen d'honorer nos engagements pris devant l'avenir.

Toutefois, dès le 21 juin dernier, j'ai saisi le déontologue de l'Assemblée nationale, car, s'il n'y a évidemment pas d'incompatibilité sur le plan juridique et constitutionnel, je souhaitais néanmoins recueillir son avis. Je tiens à la disposition de l'ensemble des parlementaires la réponse qu'il m'a adressée le 22 juin : elle est circonstanciée, précise et elle confirme l'absence de conflit d'intérêts.

C'est donc en toute transparence que j'ai procédé à un certain nombre d'auditions à la fois de producteurs que sont EDF, Areva et le CEA, ainsi que l'ANDRA, mais encore des opposants au projet Cigéo. J'ai invité l'ensemble des parlementaires à ces auditions. Tous ont reçu une invitation. J'ai fait enregistrer la totalité de ces entretiens ; le rapport que je produirai traduira tous les points de vue qui m'ont été exposés au sujet de cette proposition de loi.

Ce qui me surprend, c'est que l'on puisse « tourner autour du pot » sans aller au fond du sujet qui est la question de la réversibilité. Je remercie très sincèrement notre collègue Jean-Marie Sermier de m'avoir permis de répondre à cette question et je déplore non pas que l'on donne « en pâture » des élus – c'est de saison – mais que l'on porte des accusations en l'absence de toute vérification préalable. (Applaudissements)

C'est la force de notre démocratie que des parlementaires siègent au sein d'un certain nombre d'instances car nous avons des comptes à rendre aux Français, puisque tout ce qui est public leur appartient.

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