Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 1er juin 2016 à 18h15
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Jean-Yves le Drian, ministre de la Défense20--> :

Il faut être très vigilant. On parle plus souvent de Daech que d'Al-Qaïda ; or cette dernière est présente en Syrie par le biais de Jabhat al-Nosra. Il ne faudrait pas que le retrait de Daech, qu'on sent poindre, suscite des allégeances à AQMI de la part de groupes qui retrouveraient un autre destin. Al-Qaïda est présente au Mali de manière significative. Ce réseau a été très touché par nos opérations.

Reste que, par rapport à celle de 2013, la situation est très différente. En 2013, il s'agissait d'une opération visant à transformer un État en sanctuaire terroriste, notamment par le regroupement de katibat. Grâce à l'opération Serval, cette stratégie a échoué, permettant la restauration de la démocratie et l'organisation d'élections. Néanmoins, les terroristes ont changé de posture et nous avons désormais affaire à des groupes plus petits, moins militarisés – contrairement à Daech – et pratiquant un terrorisme « classique » avec l'emploi de kamikazes. Les attentats de Bamako, Ouagadougou et Grand-Bassam, avec l'utilisation régulière d'engins explosifs improvisés (EEI) contre nos propres forces – trois de nos soldats en sont morts récemment –, ont montré que la pratique avait changé, une pratique en outre beaucoup plus difficile à repérer.

Dans le cadre de l'opération Barkhane, nous avons coordonné nos actions contre le terrorisme avec les pays du G5 Sahel – Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad. Face à ce nouveau risque, nous devons maintenir un effort militaire singulier pour empêcher que cette logique ne produise des effets aussi insupportables que ceux produits par Daech.

Il convient par ailleurs que les autorités politiques maliennes fassent en sorte que les accords politiques d'Alger qui concernent en particulier les groupes armés signataires, à savoir les combattants non terroristes, soient respectés de part et d'autre. Il s'agit notamment de hâter la mise en place de l'opération « Désarmement, démobilisation, réintégration » (DDR). Nous appelons en permanence les parties à y oeuvrer, faute de quoi on court le risque d'une porosité entre les groupes armés signataires et les groupes armés terroristes chapeautés essentiellement par le groupe Al-Mourabitoune, dirigé par un Algérien résidant en Libye, Mokhtar Belmokhtar, et qui est en train, avec Iyad Ag Ghali, de reprendre une forme de coopération qui ne me paraît pas des plus encourageantes – aussi mon sentiment sur cette situation-ci est-il plus négatif.

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