Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 1er juin 2016 à 18h15
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice :

Non ! Lorsque j'étais président de la commission des Lois, j'ai écrit aux ambassadeurs de tous les pays démocratiques – Australie, États-Unis, Israël, Nouvelle-Zélande… – parce que, dans ce domaine, le benchmarking était inexistant. Je n'ai pu trouver ni un ouvrage, ni une étude universitaire, ni même un article sur le sujet. J'ai fait cette recherche car j'estime que, si un système vertueux existe ailleurs, il n'est pas utile de s'épuiser à en inventer un autre. Quoi qu'il en soit, je tiens les réponses de ces ambassadeurs à votre disposition. Dans certains pays, il existe des départements, à l'intérieur de services, qui s'occupent de la pénitentiaire, mais il n'existe pas de services de renseignement comparables à ce qui existe pour le renseignement intérieur ou le renseignement extérieur. C'est un sujet nouveau, que nous devons traiter et pour lequel il y a évidemment une hésitation.

Au regard de ce qu'est selon moi un service de renseignement pénitentiaire, je considère qu'il n'en existe pas. Le mot « renseignement », du reste, n'est pas défini.. Il existe une collecte du renseignement dans l'univers carcéral – des personnels observent, constatent, recueillent de l'information –, mais je n'appelle pas cela du renseignement. Selon moi, celui-ci suppose une mise en perspective, une capacité de prévision, une anticipation, la compréhension de faits qui se sont déroulés…

Je ne mets la conscience professionnelle de personne en cause. Je considère, au contraire, que ces personnels sont extrêmement dévoués, car ils défrichent un domaine qui fait l'objet d'une forte attente sociale – les interrogations que vous avez formulées existent au-delà de ces murs. Mais on ne se décrète pas agent du renseignement : cela nécessite, en milieu ouvert, des années d'expertise. En milieu fermé, il convient tout d'abord de définir ce que doit être un agent du renseignement. Il est pour le moins délicat de désigner un surveillant, connu des détenus, agent du renseignement pénitentiaire.

Je préférerais vous présenter une synthèse du renseignement pénitentiaire sur le prosélytisme en prison, mais je n'en ai pas. Comme je n'ai pas été nommé pour faire des constats, nous allons agir dans ce domaine. Nous avons déjà fait beaucoup : les personnels sont présents, la motivation existe et, grâce à vous, les difficultés juridiques ont été aplanies. Il nous reste maintenant à agir.

Quant à la directrice de l'administration pénitentiaire – j'ai relu, hier, le compte rendu de son audition par votre commission d'enquête –, elle a évoqué les problèmes de remontée de l'information. C'est bien de cela qu'il s'agit. Lorsque je me rends dans le ressort d'un TGI, d'une cour d'appel ou dans un établissement pénitentiaire, je demande comment les choses se passent. J'ai rencontré récemment le directeur de la DGSI, Patrick Calvar, qui m'a dit que les relations entre son service et nos référents du renseignement pénitentiaire étaient bonnes, mais des lacunes demeurent, et je crois qu'Isabelle Gorce a été assez franche. Nous avons beaucoup à faire dans ce domaine.

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