Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 1er juin 2016 à 18h15
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Jean-Jacques Urvoas, garde des Sceaux, ministre de la justice :

Entre 1999 et 2009, Coulibaly a été condamné six fois et il a fréquenté, au cours de ses errances pénitentiaires, cinq établissements différents : Melun, Fleury-Mérogis, Villejuif, Orléans-Saran… Votre remarque est tout à fait juste, monsieur le rapporteur ; elle pose la question de ce qu'est le renseignement pénitentiaire. Le bureau du renseignement pénitentiaire ne dispose ni de document ni de retour d'expérience sur le parcours de Coulibaly. D'où deux exigences. Tout d'abord, nous devons renforcer le lien entre le milieu pénitentiaire et le milieu ouvert, et c'est pourquoi je souhaite que des protocoles soient signés avec l'ensemble des services, notamment le service central du renseignement territorial. Celui-ci est certes, compte tenu de la répartition des tâches décidée avec la DGSI, un interlocuteur des délégués locaux du renseignement pénitentiaire, mais il n'a pas normalisé les attentes mutuelles et les processus. Car l'information peut être également préalable à l'incarcération : lorsqu'un individu est suivi, il est utile que l'administration pénitentiaire le sache.

Le parcours de Coulibaly démontre des carences de notre part ; il nous faudra y remédier.

En ce qui concerne le renseignement pénitentiaire, je ne suis en mesure de vous dire que ce que je suis capable de voir pour le moment. J'ai la volonté – et cela ne vous étonnera pas – que nous disposions d'un outil dans ce domaine. Mais j'attends les résultats du travail mené par l'inspection, qui nous aideront à baliser les différents domaines sur lesquels il nous faut progresser. À la rentrée, un décret doit nous permettre d'être intégré à la communauté du renseignement et nous devrions également disposer d'ici la fin de l'année des éléments d'application découlant des modifications du code de procédure pénale. D'ici à la rentrée ou au début de l'hiver, nous aurons donc l'outil issu des modifications que vous avez apportées au cadre législatif. Ensuite, il nous faudra structurer le renseignement pénitentiaire. Une fois l'outil construit au début de l'année 2017, nous pourrons alors nous poser la question des moyens.

Par ailleurs, je suis très attentif à la question de la rupture entre le moment où un individu est suivi par un service de renseignement dans le cadre d'une procédure administrative et le moment où il fait l'objet d'une procédure judiciaire. On ne peut pas, en effet, être suivi au plan administratif et au plan judiciaire pour le même motif : tel est le principe fixé par la loi sur le renseignement. Cet équilibre relève du droit au procès équitable. Toutefois, le service de renseignement en question peut suivre cet individu pour un autre motif. Je crois donc que cette rupture apparente n'est pas une réalité. Je ne pense pas qu'il y ait un vide. Vous savez, en outre, monsieur le rapporteur, que les techniques d'enquête sont beaucoup plus souples en matière judiciaire qu'administrative.

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