Intervention de Jean Grellier

Séance en hémicycle du 16 juin 2016 à 15h00
Remboursement des taxes d'aéroport — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Grellier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous sommes amenés à étudier la proposition de loi, déposée par le groupe Les Républicains, qui vise à accroître les obligations des compagnies aériennes vis-à-vis de leurs clients, en rendant automatique le remboursement des taxes comprises dans le prix du billet d’avion lorsqu’ils n’ont pas pu voyager sur le vol qu’ils avaient réservé.

Il est à noter que, d’ores et déjà, une disposition existe en la matière, inscrite lors de l’examen de la loi de 2014 relative à la consommation. L’Assemblée nationale avait alors adopté un dispositif confortant le droit du consommateur pour qu’il puisse demander le remboursement par la compagnie aérienne des taxes aéroportuaires individualisées, lorsqu’il n’a pas effectué le vol.

Je souhaite rappeler également que la loi consommation a permis au consommateur d’être remboursé sous trente jours à compter de sa demande. Le texte dispose également que les compagnies aériennes ont l’obligation d’accepter toutes les demandes de remboursement, quel que soit le moyen de paiement utilisé, y compris quand l’achat a été effectué en ligne. Enfin, il a interdit aux compagnies aériennes de facturer des frais de remboursement en cas de demande en ligne et fait en sorte que ces frais soient limités à 20 % du montant remboursé pour les demandes effectuées par un autre moyen.

Ainsi, le code de la consommation, dans son article L. 113-8, avait-il été créé afin d’encadrer le remboursement des taxes d’aéroport en cas de vol payé mais non effectué. Cette disposition a depuis été déplacée, au 1er janvier 2016, par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte à l’article L. 121-118 du même code.

L’article 1er de cette proposition de loi comprend deux parties : il pose à la fois le principe de l’automaticité du remboursement et celui de l’information du client sur cette automaticité. Pour ce qui concerne la mise en oeuvre du remboursement, la proposition de loi en pose le principe pour les billets payés et non utilisés, lorsque le client a utilisé un moyen de paiement permettant la traçabilité des données bancaires.

Je rappelle que la taxe d’aéroport est due par toute entreprise de transport aérien public, quelle que soit sa nationalité ou son statut juridique, à raison des passagers et de la masse de fret et de courrier embarqués sur les aérodromes dont la liste est définie par arrêté ministériel. Elle a été instaurée par l’article 136 de la loi de finances pour 1999, à compter du 1er juillet 1999. La taxe d’aéroport est codifiée à l’article 1609 quatervicies du code général des impôts.

Cette taxe est perçue au profit des personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes ou des groupements d’aérodromes dont le trafic embarqué ou débarqué s’élève en moyenne, sur les trois dernières années civiles connues, à plus de 5 000 unités de trafic. Une unité de trafic est égale à un passager ou à 100 kilogrammes de fret ou de courrier.

Le produit de la taxe d’aéroport est affecté sur chaque aérodrome ou groupement d’aérodromes au financement des services de sécurité – incendie et sauvetage –, de lutte contre le péril animalier, de sûreté et des mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux. Il contribue aussi, dans une proportion fixée annuellement par arrêté, au financement des matériels de contrôle par identification biométrique installés dans les aéroports.

Cependant, l’automaticité du système proposé par ce texte pose des problèmes de mise en oeuvre technique. En effet, qu’en serait-il du remboursement au client lorsque celui-ci est passé par un intermédiaire pour acheter son billet, tel qu’une agence de voyages ? Qu’en sera-t-il de la prise en compte des modifications des données bancaires du client concerné ou encore des conditions différentes de vente des billets lorsqu’ils sont achetés à l’étranger ?

S’agissant de l’information du client, elle induit un ajout de mesures n’allant pas forcément dans le sens de la simplification. Enfin, précisons que, pour faire appliquer les dispositions prises en 2014 dans le cadre de la loi consommation, des amendes administratives de 3 000 euros pour une personne physique et de 15 000 euros pour une personne morale, en cas de manquement aux obligations, ont été prévues.

Toutefois, ces sanctions n’ont, semble-t-il, jamais été appliquées depuis la mise en oeuvre de la loi, malgré son respect très inégal par les différents opérateurs. En effet, les contrôleurs de la DGCCRF n’étaient pas habilités jusqu’à présent à réaliser les contrôles nécessaires à l’exécution des peines encourues.

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, l’adoption d’un amendement du groupe socialiste, écologiste et républicain, défendu par Bruno Le Roux, au cours de l’examen de la loi Sapin 2, a permis d’habiliter les agents de la DGCCRF à contrôler le respect des mesures obligeant légalement les compagnies aériennes et autres plateformes de vente de billets d’avion à procéder au remboursement des taxes d’aéroport.

Aussi, compte tenu de ces éléments et des dispositions légales d’ores et déjà existantes qui protègent le consommateur en matière de remboursement des taxes aéroportuaires, ainsi que du délai nécessaire pour évaluer les dispositions juridiques créées par la loi consommation, il est permis de s’interroger sur l’utilité de légiférer à nouveau.

Lors du débat en commission des affaires économiques, notre groupe s’est abstenu afin de permettre de lever les interrogations d’ordre technique sur l’application du caractère automatique du remboursement. Mme la secrétaire d’État a fait part de l’impossibilité de régler toutes ces difficultés et a pris des engagements qui répondent à plusieurs souhaits et objectifs du rapporteur. En conséquence, nous pensons qu’à ce stade il n’est pas utile d’adopter cette proposition de loi.

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