Intervention de Dominique Lefebvre

Réunion du 8 juin 2016 à 11h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Lefebvre :

Il faut tout de même commencer par rappeler que l'administration publique française est compétente, loyale, républicaine, et que bien des pays nous l'envient. Le sujet abordé par la mission d'évaluation et de contrôle ne peut pas se résumer au rôle des cabinets ministériels – et, au demeurant, il faut choisir entre le rejet des cabinets et celui de la technostructure.

Mon expérience est particulière : j'ai d'abord été assistant social, puis, alors que j'étais devenu permanent d'une organisation syndicale réformiste, j'ai passé le concours interne de l'ÉNA. J'ai intégré à la sortie un grand corps de l'État, puis très rapidement un cabinet ministériel… et permettez-moi de vous dire que, de temps en temps, on y fait de bonnes choses : ce n'est pas la direction de la sécurité sociale qui aurait proposé l'instauration du RMI ou de la CSG ! Un équilibre est nécessaire entre la technostructure et le pilotage politique. Les effets pervers de notre système existent, c'est un constat que nous partageons. Mais il ne faut pas oublier tout ce qui est positif.

L'investissement consenti dans la formation initiale est important, c'est vrai, et il est légitime de s'interroger sur sa pertinence. Notre pays a des traditions : si l'ÉNA ne remonte qu'à l'après-guerre, on retrouve parfois dans les grands corps des éléments qui remontent à l'Ancien Régime… Notre pays n'aura pas du jour au lendemain une fonction publique à l'anglo-saxonne, mais nous pouvons évoluer.

Le rapport aborde le problème crucial de la troisième partie de carrière. On entre jeune dans la fonction publique, et on travaille souvent énormément en début de carrière. Mais, hors les grands corps et les inspections, l'État ne sait pas organiser les fins de carrière. Cela concerne un nombre important de hauts fonctionnaires, après 45 ou 50 ans. Beaucoup n'arrivent pas jusqu'en haut de la hiérarchie ; ils finissent par exercer des missions d'expertise ou de tutorat, voire par être payés à ne rien faire, ce qu'on ne peut d'ailleurs pas leur reprocher. La façon dont les ministères sont structurés crée un véritable, un immense gâchis humain. À Bercy, le cimetière des éléphants, c'est le contrôle d'État…

L'État ne sait pas, aujourd'hui, construire des carrières de façon intelligente pour plus de vingt ans. Il faut réfléchir autrement sur les tâches et les missions : trop de fonctionnaires compétents et expérimentés sont aujourd'hui sous-employés. Ralentir les déroulements de carrière, en passant de vingt à vingt-cinq ans, ne réglera pas tout le problème. Et les promotions de l'ÉNA étaient, au début des années 1980, pléthoriques ! Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui.

Par ailleurs, hors le ministère de la défense, il n'y a pas de préparation à l'exercice des plus hautes responsabilités. Ayant été directeur du cabinet du ministre de l'éducation nationale au début des années 1990, je rappelle que n'étaient nommés recteurs que des professeurs d'université. Nous avions alors l'idée de créer un institut des hautes études de l'éducation nationale pour assurer une formation préalable à ce type de nomination. Professeur d'université, recteur, ce sont des responsabilités tout de même très différentes.

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