Intervention de Patrick Jeantet

Réunion du 24 mai 2016 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Patrick Jeantet :

Je vous remercie, mesdames, messieurs les députés, pour vos questions à travers lesquelles vous vous êtes fait l'écho des problèmes graves que rencontre SNCF Réseau.

Je commencerai par la sécurité, question primordiale soulevée par M. Rémi Pauvros. SNCF Réseau et le groupe SNCF ont mis en place deux programmes à la suite de l'accident de Brétigny : le programme Vigirail, qui concerne les infrastructures, en particulier les aiguillages, et leur remplacement ; le programme Prisme, de nature managériale, qui vise à ce que l'ensemble des acteurs de SNCF, du haut en bas de la pyramide, s'engage à assurer la sécurité. C'est ainsi que je serai moi-même formé à la sécurité ferroviaire dans le cadre d'un séminaire de deux jours, si vous confirmez ma nomination.

Plusieurs d'entre vous m'ont interrogé sur mes priorités.

Elles iront tout d'abord à la rénovation, qui consiste à refaire des éléments de voie complets, et à la maintenance, qui consiste à réparer. Cela suppose d'agir dans deux domaines : le domaine financier – cette année, 4,9 milliards d'euros y seront consacrés – et le domaine des ressources humaines. L'expertise ne se crée pas en deux minutes, elle implique d'établir un plan de gestion prévisionnelle des compétences pour mener à bien un plan de maintenance prévisionnelle. À cet égard, le contrat de performance est indispensable pour disposer d'une vision de long terme.

Je me consacrerai aussi aux projets de développement, en me conformant bien sûr à la règle d'or que vous avez fixée pour juguler la pression sur l'endettement. Si la dette nette dépasse dix-huit fois la marge opérationnelle, tout nouveau projet de développement devra reposer sur des financements extérieurs à SNCF Réseau. Son rôle sera alors d'éclairer les choix techniques.

Nous accompagnerons les régions, qu'il s'agisse de la maintenance ou du développement. Les contrats de plan État-région sont en négociation. Cela supposera bien évidemment une concertation. En ce domaine, SNCF Réseau a une expérience, une expérience réussie à ma connaissance. Il est absolument vital de dialoguer avec les élus et si je constatais des problèmes, je m'y attaquerai prioritairement, fort de mon expérience chez Keolis où deux jours par semaine, je rencontrais des élus pour trouver avec eux les moyens de développer les transports publics.

Éclairer les choix des collectivités suppose d'établir une transparence des comptes, transparence à travers la comptabilité analytique nécessaire pour déterminer les tarifs de péages, mais aussi transparence des investissements. En France, nos grandes sociétés publiques n'ont pas de culture de la transparence, j'ai pu le constater chez ADP. Or pour avoir travaillé dans les pays anglo-saxons où cette culture est beaucoup plus forte, j'en connais les bienfaits. Je m'attacherai à faire changer les choses au sein de SNCF Réseau.

Sur le plan d'économies de 500 millions d'euros, monsieur Bertrand Pancher, je ne peux vous répondre car je ne dispose pas des éléments nécessaires pour vous apporter des précisions. Comme je fais mien cet objectif, sachez que je procéderai à des vérifications au plus vite car l'échéance de 2020 est proche.

Plusieurs questions ont porté sur le cadre social. Les négociations menées actuellement sont extrêmement importantes à plusieurs titres. Le décret-socle et la convention collective sont deux éléments fondamentaux pour poursuivre l'ouverture à la concurrence. Ces textes établiront les règles du jeu communes à l'ensemble des acteurs futurs et seront le gage d'une concurrence équitable. En ce qui concerne l'accord d'entreprise négocié au niveau de SNCF, il marque un important changement culturel avec le passage d'une gestion réglementaire du social à une gestion contractuelle, comme dans les entreprises privées. Dans des moments de remise à plat d'un système social, il est inévitable qu'il y ait des crispations et donc des grèves. Mais soyez assurés que toutes les équipes concernées sont mobilisées pour que les diverses négociations aboutissent le 1er juillet prochain.

Le projet du CDG Express vise à desserrer la contrainte aéroportuaire qui conditionne le développement du tourisme en France. Le maillon faible de notre organisation est l'accès à l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle. C'est le seul aéroport d'envergure mondiale à ne pas disposer d'une liaison directe avec le centre-ville. Ce projet est donc absolument nécessaire. Il est important de souligner que son financement sera exclusivement supporté par les passagers aériens, à travers le prix du billet et une taxe ; il ne pèsera en rien sur les Franciliens, qui profiteront de ses retombées économiques. Par ailleurs, 150 millions d'euros d'investissement sont consacrés à la sanctuarisation du trafic du RER B : en situation dégradée, il pourra circuler de manière optimale sur les voies du CDG Express, parallèles à celles qu'il emprunte habituellement.

Monsieur Jacques Krabal, j'ai bien compris comme les problèmes de la gare de Château-Thierry vous tenaient à coeur. Je m'engage à venir vous voir et à réunir les responsables locaux de SNCF Réseau et SNCF Mobilités afin que nous puissions aller dans le détail pour trouver des solutions.

S'agissant des gares en général, la loi que vous avez votée a considérablement amélioré leur gestion. Il n'existe aujourd'hui plus qu'une seule direction de l'immobilier au niveau de l'EPIC de tête, laquelle assure une gestion pour compte pour les deux EPIC opérationnels, SNCF Réseau et SNCF Mobilités. Autrement dit, il n'y a plus qu'un seul interlocuteur quand il y en avait deux auparavant. Il s'agit d'approfondir la mise en oeuvre de cette réforme. Nous savons que des problèmes à Lille ont déjà pu être réglés.

Pour la Normandie, je ne connais pas non plus le détail des dossiers. Je me pencherai sur le tronçon Rouen-Yvetot pour vous fournir des précisions, monsieur Christophe Bouillon. Je me rendrai dans cette région comme dans toutes les régions de France pour rencontrer les élus régionaux, les directeurs régionaux de SNCF Réseau et leurs équipes.

Comment vivre avec l'ARAFER ? Dès lors que l'objectif est d'ouvrir à plus de concurrence, un régulateur est nécessaire pour arbitrer les questions essentielles que sont les tarifs des péages et l'attribution des sillons. Certes, aujourd'hui, SNCF Mobilités représente 97 % des péages, mais il est souhaitable de trouver le bon équilibre dès maintenant pour préparer les évolutions à venir que j'ai pu entrevoir au Royaume-Uni où le régulateur doit démêler des litiges fréquents entre opérateurs et gestionnaires d'infrastructures. Je ne méconnais la complexité des relations avec l'ARAFER. Il nous faut apprendre à vivre ensemble, il en va de la réussite de la réforme.

L'électrification de la ligne Paris-Troyes est un projet décidé par l'État, sous maîtrise d'ouvrage de SNCF Réseau. Je m'engage, monsieur Gérard Menuel, à ce qu'il soit mené à bien sans toutefois pouvoir vous donner de dates puisque je ne connais pas le détail du dossier.

Sur le tunnel du Montgenèvre, monsieur Julien Aubert, je reviendrai vers vous quand j'aurai une meilleure connaissance du projet.

Enfin, j'apprends en même temps que vous, monsieur Florent Boudié, les problèmes rencontrés à la gare Bordeaux-Saint Jean. Il est normal que le chantier soit arrêté si un niveau important de plomb a été détecté. Les équipes reprendront les travaux dès que possible après décontamination.

Quant à la question que vous avez posée sur Alstom, groupe industriel national et international qui constitue un acteur clef, elle relève de SNCF Mobilités. Il en va de même, monsieur Yannick Favennec, pour votre question sur les conducteurs de TER. Je ne manquerai pas d'en faire part au président de SNCF Mobilités, M. Guillaume Pepy.

J'en viens aux ressources humaines, madame Marie Le Vern. Je ne peux répondre précisément sur les perspectives de recrutement, le niveau de formation, le pourcentage de sous-traitance externalisé. Nous avons substantiellement augmenté les investissements destinés à la modernisation et la maintenance ces dernières années. Pour les mettre en oeuvre, les moyens humains sont essentiels. La stratégie que SNCF Réseau a commencé à suivre est double. Elle consiste tout d'abord à moderniser le fonctionnement des équipes en interne, en développant la part de l'informatique et des automatismes, ce qui prendra du temps car cela nécessite de former nos personnels à de nouvelles technologies. Elle vise par ailleurs à recourir davantage à l'externalisation, ce qui suppose que la filière ferroviaire privée se développe en investissant dans les trains de maintenance, mais aussi dans l'expertise humaine, ce qui suppose une bonne visibilité. L'externalisation stimulera l'interne et permettra de faire face à l'augmentation des volumes des travaux de maintenance et de modernisation de la voie, des caténaires et de la signalisation.

Enfin, sur les grèves, notre point de vue est que la négociation sociale doit rapporter plus que la grève. La direction et le Gouvernement se consacrent chaque jour à la négociation.

Sur toutes les autres questions plus précises, je ne dispose pas des éléments nécessaires pour apporter des réponses mais je m'engage à le faire le plus rapidement possible, si vous voulez bien accepter ma nomination.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion