Intervention de Harlem Désir

Séance en hémicycle du 25 mai 2016 à 15h00
Questions sur la politique du gouvernement concernant les négociations des traités tafta et tisa

Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes :

Monsieur le député, je vous remercie d’avoir mentionné les acquis de la négociation menée par la France au sein de l’Union européenne pour promouvoir la transparence et plusieurs éléments importants pour notre pays.

Quant à la question de l’arbitrage, elle est très importante car, aujourd’hui, plus de 3 500 accords de protection des investissements dans le monde prévoient un ISDS, c’est-à-dire un mécanisme d’arbitrage privé. On voit bien pourquoi ces accords ont été signés : dans certaines parties du monde, les investisseurs internationaux considéraient que le climat des affaires et l’État de droit n’étaient pas suffisamment garantis.

L’Union européenne, en revanche, estime que, sur notre continent, les investisseurs – européens ou internationaux – peuvent s’appuyer sur l’État de droit, car celui-ci existe bel et bien. Il n’est pas envisageable qu’un système d’arbitrage privé devienne supérieur aux règles que des États auraient fixées pour tel ou tel secteur de l’économie. C’est pourquoi ces mécanismes ont contribué à éroder la capacité des États à réguler librement.

Vous avez mentionné le recours de Philip Morris contre du gouvernement australien, visant le projet d’un paquet de cigarettes neutre. On pourrait aussi mentionner la procédure qu’a intentée l’entreprise Vattenfall contre la politique énergétique de l’Allemagne, que ce pays avait librement choisie. Divers conflits d’intérêt se sont multipliés dans ces enceintes arbitrales, où la transparence n’était pas assurée. Dès le début de l’année 2015, Matthias Fekl a présenté, d’abord avec l’Allemagne, puis avec d’autres États, une position en rupture avec l’arbitrage privé. Il a identifié plusieurs points forts, tels que la transparence, la préservation du droit à réguler, la lutte contre les conflits d’intérêts et l’instauration d’un appel. La France est le seul État membre à avoir adressé une proposition officielle sur ce sujet. La Commission l’a reprise dans sa quasi-intégralité, ce qui fait de notre proposition un consensus européen.

Cette proposition consiste à créer un système de cour de justice des investissements, qui remplace les arbitres privés par des juges publics, rémunérés par les États, et non plus par les parties au litige entre un investisseur et un État. De plus, elle instaure des exigences éthiques renforcées, et un mécanisme d’appel est créé. Ce système, proposé aux Canadiens, a été repris en grande partie dans le CETA. C’est un pas décisif.

Non seulement les Canadiens ont intégré ce nouveau dispositif, mais il ont aussi accepté de travailler pour établir à terme une cour multilatérale des investissements, dont l’ICS soit être le modèle. C’est pourquoi nous défendons la même position pour le TTIP.

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