Intervention de Sergio Coronado

Séance en hémicycle du 19 mai 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé le terrorisme et leur financement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

En outre, les conditions d’examen par le tribunal d’application des peines des demandes de relèvement de la période de sûreté pour les condamnés concernés par les dispositifs de perpétuité réelle seront très strictement encadrées. Cette décision ne pourra être octroyée qu’après une incarcération minimale de trente ans.

Parmi les conditions figure notamment le recueil de l’avis des victimes ayant la qualité de partie civile lors de la décision de condamnation. Vous aviez, monsieur le garde des sceaux, pertinemment relevé la difficulté à réunir les victimes trente ans après les faits.

Pour ma part, je crois que ce texte est à la limite de ce que la Constitution et nos engagements internationaux nous autorisent à faire. Je le dis avec gravité : ces dispositions sont susceptibles de porter gravement atteinte aux droits fondamentaux des personnes privées de liberté, notamment le respect de la dignité des personnes détenues.

Pour conclure, je voudrais dire un mot sur les dispositifs concernant la prison elle-même. Ainsi, les services spécialisés du ministère de la justice figureront finalement dans la communauté du renseignement.

Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises : les agents du bureau du renseignement pénitentiaire auront donc accès à des techniques de surveillance très larges et ce, sans le contrôle de la CNCTR – Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. À l’époque, le Gouvernement s’y était opposé. Je regrette que les objections soulevées pertinemment par le Gouvernement il y a quelques mois soient aujourd’hui ignorées.

Plus inquiétant encore : le rétablissement des fouilles à nu en détention. Il y a sept ans, la France avait supprimé leur caractère systématique après trois condamnations successives pour des fouilles jugées dégradantes. Depuis, elles ne pouvaient plus être utilisées qu’en dernier recours et s’il y avait une présomption d’infraction.

Le retour des fouilles à nu est véritablement une régression importante de notre droit. Le comité contre la torture des Nations unies a rappelé avec force, il y a quelques jours, que les fouilles à nu en prison devaient rester exceptionnelles. De son côté, le comité anti-torture du Conseil de l’Europe a appelé les États membres à revoir le traitement des condamnés à la perpétuité et à garantir une perspective de libération qui ne soit pas purement formelle – deux exigences qui me semblent bafouées dans ce texte.

Monsieur le garde des sceaux, vous avez indiqué votre satisfaction après l’adoption par la commission mixte paritaire de ce texte permettant de mettre à niveau les moyens de prévention et de lutte contre le crime organisé et le terrorisme. Or ce texte dépasse de très loin votre ambition première puisqu’il s’agit de la « loi antiterroriste la plus sévère d’Europe », pour reprendre le titre d’un quotidien du soir.

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