Intervention de Annick Girardin

Réunion du 26 avril 2016 à 9h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Annick Girardin, ministre de la fonction publique :

Évitons de donner l'impression de fonctionnaires hors-sol. Il en existe quelques-uns, mais prenons grade à ne pas généraliser. J'avais aussi cette vision du haut fonctionnaire, sortant de l'ENA sans avoir été suffisamment sur le terrain, occupant des hauts postes tout de suite et ne maîtrisant pas suffisamment les échelons ou le monde extérieur. Mais il s'avère qu'à l'ENA, les profils sont divers : les fonctionnaires issus du concours interne ont de l'expérience, de même que ceux qui utilisent la troisième voie.

Comment rendre cette expérience de terrain, dans le privé ou le public, obligatoire pour ceux qui ne l'ont pas ? Peut-on retenir l'idée à la sortie de l'ENA d'une pause d'une année pour vivre des expériences avant de revenir rendre les dix ans dus à l'État – ce qui est indispensable dès lors que l'État assume le coût de la formation ? Il serait compliqué d'en faire une obligation, mais à tout le moins une possibilité.

Ensuite, il faut instituer des grands rendez-vous dans la vie professionnelle qui permettent une évaluation comme cela est le cas à l'inscription dans le vivier. Je constate cependant que le problème tient moins à la pertinence des évaluations qu'à un manque de courage managérial. Quand cela ne va pas, on ne sait pas le dire : on ne sait pas dire à un haut fonctionnaire quand on constate qu'il n'est pas à sa place, qu'il serait préférable qu'il fasse autre chose. On ne sait pas lui dire de faire une pause ou une formation pour se perfectionner dans un certain nombre de domaines – parce que la vie d'aujourd'hui n'est pas celle d'hier et que la vie de demain sera encore plus compliquée et demandera encore plus de créativité et d'innovation. Les outils existent, ils sont utilisés mais le courage managérial manque pour en tirer les conséquences. Il suffit de regarder le nombre de préfets titularisés – peu d'entre eux ne l'ont pas été. Plus on confiera de missions à la DRH de l'État, et peut-être même la gestion des fonctionnaires à la DGAFP et plus ce courage sera assumé.

S'agissant de la diversité, il faut conforter la troisième voie. Aujourd'hui, de nombreux éléments du parcours des candidats ne sont pas pris en considération. On demande aux jeunes de s'engager, mais le service civique ou le volontariat international ne sont pas pris en compte pour avoir accès à la troisième voie. Le projet de loi égalité et citoyenneté vise à valoriser tous les aspects du parcours. Sans doute suis-je influencée par ma proximité géographique avec l'Amérique du Nord, où toutes les expériences sont valorisées ; dans d'autres pays que la France, les expériences à l'étranger sont des gages de la faculté d'adaptation. Au Canada et aux États-Unis, les entreprises privées valorisent aussi davantage l'engagement. C'est ce que nous voulons faire, quelle que soit la forme de celui-ci : politique, associatif, etc. Il doit pouvoir compter pour accéder à la troisième voie, mais aussi ensuite pour les titularisations.

Les classes préparatoires intégrées, qui rencontrent un grand succès, apportent une autre réponse à l'impératif de diversification de la fonction publique. Nous devons les développer. Aujourd'hui, nous recevons plus de 20 000 dossiers d'inscription. Plus de 500 élèves suivent des classes préparatoires dans 26 établissements – avec une forte proportion d'élèves venant d'outre-mer. Le taux de réussite est de 52 %, toutes catégories confondues ; il est de 45 % pour les concours de catégorie A, de 39 % pour les concours de catégorie B et de 16 % pour les concours de catégorie C. Nous devons cibler davantage les jeunes en difficulté, les jeunes demandeurs d'emploi et ceux répondant aux critères d'attribution de bourses nationales. Je le redis, nous avons confié un rapport à M. L'Horty, qui devrait nous permettre de corriger un certain nombre de discriminations. Malgré un combat quotidien pour l'éradiquer, la discrimination demeure dans la fonction publique, ne serait-ce qu'au travers du patronyme.

Le comité interministériel du 26 octobre 2015 a prévu d'aller plus loin et de travailler davantage sur les discriminations mais aussi sur les origines sociales des jeunes, sur lesquelles un autre rapport a été confié à Olivier Roussel, je l'ai évoqué. J'attends avec impatience les conclusions de ces deux missions pour pouvoir prendre des dispositions. Nous devons apporter des réponses rapidement à ces discriminations et à la nécessité d'ouvrir davantage la fonction publique qui doit ressembler à la société d'aujourd'hui.

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