Intervention de Michel Sapin

Réunion du 6 avril 2016 à 16h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics :

…même s'il a déjà l'habitude de le faire, pour des montants considérables, nous veillerons à ce que le système soit aussi le plus simple possible.

L'administration fiscale, c'est très important, restera l'interlocuteur unique du contribuable. Cela garantit la confidentialité des données utilisée pour le calcul de l'impôt.

D'autre part, les modalités techniques de prélèvement emprunteront un canal extrêmement simple, celui de la déclaration sociale nominative (DSN), dont le chantier a été engagé bien avant celui de la retenue à la source. La DSN permettra, par un document unique et dématérialisé, de calculer et d'acquitter l'ensemble des cotisations sociales, et désormais, donc, l'impôt sur le revenu.

Certaines organisations professionnelles se sont interrogées sur la charge que représenterait le prélèvement de l'impôt par l'employeur. Nous sommes en train de l'évaluer le plus précisément possible, mais je pense qu'elle sera extrêmement faible. Le salaire net imposable est déjà connu de l'employeur aujourd'hui, il n'a pas besoin de le calculer, il figure sur chaque bulletin de paye. Cela ne nous empêchera pas d'être extrêmement vigilants. Nous rencontrons régulièrement des représentants des entreprises et des acteurs économiques pour examiner les différents aspects de cette réforme dans ses contours actuels.

Cet objectif de modernisation, nous le concilions avec les caractéristiques actuelles de l'impôt sur le revenu. Je le répète : nous voulons un impôt juste, donc progressif. Ainsi, la fiscalité des revenus du capital, alignée dès le début du quinquennat sur celle des revenus du travail, ne sera pas modifiée. Et nous conserverons, bien entendu, la progressivité de l'impôt sur le revenu, qui fonde la redistribution, l'administration fiscale transmettant au collecteur le taux moyen d'imposition du contribuable.

Un impôt juste, c'est aussi un impôt qui sait s'adapter à la situation des ménages, à leur situation conjugale tout d'abord. Le mécanisme du quotient familial est reconnu comme un élément puissant de notre politique familiale. Avec la retenue à la source, il sera conservé : l'impôt continuera à être calculé au niveau du foyer fiscal, qu'il s'agisse d'une personne seule, d'un couple avec ou sans enfants. Nous intégrerons également un dispositif permettant à chaque membre du couple d'être prélevé sur la base d'un taux différent, notamment en cas d'importants écarts de revenu. C'est un point important, car les couples peuvent s'organiser différemment. C'est donc le couple qui choisira l'application d'un taux moyen identique ou de taux différenciés en fonction des revenus de chacun.

Enfin l'impôt sur le revenu sert aussi à aider les contribuables dans des situations spécifiques, ou à les inciter à certains comportements. Il peut contribuer au financement d'un emploi à domicile, par exemple pour assurer la garde d'un enfant, ou inciter à la rénovation d'un logement, à des économies d'énergie, à des dons aux organismes caritatifs, syndicaux ou politiques. Toutes ces incitations seront conservées.

L'impôt sur le revenu conservera également son caractère citoyen. Chaque année, comme dans tous les autres pays ayant opté pour le prélèvement à la source, les revenus continueront à être déclarés par les foyers fiscaux. Avec la télédéclaration et la déclaration préremplie, que vous avez confortée dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2016, il suffit parfois, aujourd'hui, d'un simple clic. Nous avons d'ailleurs amélioré cette année le service rendu aux contribuables qui déclarent leurs revenus sur internet : ils bénéficieront d'un nouveau document, l'avis de situation déclarative à l'impôt sur le revenu (ASDIR), qui leur permettra de justifier de leur situation d'imposition dès la déclaration en ligne, sans devoir attendre jusqu'en septembre ou en octobre l'avis d'imposition. Ce sera utile pour demander un certain nombre d'aides de toutes natures soumises à des conditions de revenu. Si nous nous attachons à rendre cette déclaration la plus simple possible, elle n'en reste pas moins un geste important : le geste républicain du consentement à l'impôt.

La connaissance exacte des revenus conduira, si besoin est, à ajuster l'impôt prélevé en temps réel ; notre objectif est que les régularisations soient d'une ampleur la plus limitée possible. D'autres pays ont fait un choix différent, avec des prélèvements importants suivis de régularisations massives, mais une telle orientation n'aurait pas été cohérente avec notre volonté de rapprocher le plus possible l'impôt des revenus auxquels il s'applique.

Le calendrier choisi est exigeant. Le texte sera écrit au cours des prochaines semaines, soumis à l'avis du Conseil d'État au mois de mai et mis à la disposition des parlementaires au mois de juin. En faisant le choix d'être en mesure de mettre en oeuvre cette réforme au cours de l'année 2017, toutes les dispositions juridiques étant adoptées préalablement, nous faisons aussi celui d'un calendrier resserré, mais notre administration est totalement et complètement mobilisée, quoique cette réforme ne soit évidemment pas le seul objet de son activité. Il arrive parfois que l'on dise que « Bercy » est réticent à telle ou telle réforme, voire à celle-ci précisément ; ce n'est pas le cas. L'administration de Bercy n'est aucunement réticente. Elle veut au contraire le succès d'une réforme dont nos concitoyens bénéficieront dans leur vie quotidienne.

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