Intervention de Général Charles Beaudouin

Réunion du 17 février 2016 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Charles Beaudouin, directeur de la section technique de l'armée de terre (STAT :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés de la commission de la Défense nationale et des forces armées, il me semble que c'est effectivement la première fois qu'un directeur de la STAT est entendu par votre commission. Je mesure donc l'honneur qui m'est fait et je souhaite vous intéresser. En tout cas, je vous remercie sincèrement pour cette invitation.

En préambule, je précise que toute mon action de réalisation de capacités est orientée vers l'appui aux forces engagées par le chef d'état-major des armées (CEMA), que ce soit à court, moyen ou long terme, avec le souci permanent de raccourcir les délais. C'est ma seule motivation.

Après vous avoir présenté mes responsabilités, l'organisation de la formation que je commande et les moyens dont je dispose, je vous tracerai le bilan de l'année 2015, je vous ferai ensuite part de mes objectifs principaux pour cette année, et j'aborderai enfin les perspectives en matière d'opérations structurantes et les défis induits qui vont requérir toute notre attention au cours des prochaines années.

La STAT est au coeur de la conduite des opérations d'armement, depuis la première expression du besoin, ce qu'on appelle le stade d'orientation, jusqu'au retrait du service. Plus encore, la STAT constitue l'unique outil d'expertise technico-opérationnelle doté des compétences qui permettent au chef d'état-major de l'armée de terre (CEMAT) d'assumer ses délégations de l'état-major des armées (EMA) dans le domaine de la réalisation des capacités et de leur mise en service opérationnel. Dans ce cadre, le directeur de la STAT assure la fonction de conseiller armement du CEMAT.

La STAT s'est vue confier trois missions principales.

Première mission : conduire tous les programmes et opérations d'armement de l'armée de terre. Pour cela, je dispose organiquement des officiers de programme de l'armée de terre, ceux que j'appelle les hommes des choix, ces choix qui sont à faire ou à proposer pour que le programme suive un déroulement conforme aux objectifs fixés en matière de coûts, délais et performances. Ces officiers de programme ont aussi pour mission de rédiger les fiches de caractéristiques militaires.

Sous mes ordres sont également placées des équipes de marque, officiers et sous-officiers expérimentateurs, qui conduisent les évaluations. Ces cadres, dont l'expérience opérationnelle est reconnue, sont les hommes et les femmes des constats. Ils me permettent de m'assurer que l'équipement, proposé par l'industriel et retenu au titre du contrat d'acquisition passé par la DGA, répond bien au besoin opérationnel exprimé.

Cette concentration, aux ordres d'un seul chef, de la conduite et des évaluations de toutes les opérations d'armement de l'armée de terre et de certaines opérations interarmées, donne une très grande cohérence à l'action à l'heure où les capacités sont de plus en plus interarmes, interarmées, interalliés et donc interdépendantes, dans une exigence de fonctionnement de bout en bout, imposant de fait une approche système de systèmes. Cette délégation à la STAT permet à l'EMAT de se focaliser sur ses missions de conception et de politique d'équipement.

Deuxième mission : conduire, si besoin, une adaptation réactive des matériels en service, et éventuellement proposer l'acquisition de nouveaux équipements en urgence opérationnelle, en intégrant en boucle très courte le retour d'expérience des opérations extérieures (OPEX). Ce volet comprend l'assistance directe aux forces projetées. À cette fin, des équipes de la STAT accompagnent sur les théâtres d'opération le déploiement de nouvelles capacités, voire interviennent à la demande des forces engagées en opération. Sur place, mes équipes conseillent l'utilisateur et recueillent des informations sur les matériels.

Ce volet consiste également à exercer un rôle de vigie quant à l'emploi adapté des capacités aux différents théâtres d'opération. La STAT connaît parfaitement ces capacités pour les avoir délivrées elle-même. Citons deux exemples récents pour lesquels je suis intervenu auprès du CEMAT : celui de la lutte contre les engins explosifs au Mali puis dans la bande sahélo-saharienne, et celui de l'emploi des derniers standards d'équipements. Il s'agit de garantir la plus grande cohérence et la plus grande célérité entre la livraison de capacités et leur emploi en opération. Depuis cette année, preuve de la place occupée par la STAT dans ce domaine, mes équipes participent systématiquement aux groupes de planification des opérations du commandement des forces terrestres (CFT), en intervenant directement pour conseiller sur l'emploi des futurs équipements à mettre sur les théâtres d'opération.

Enfin, la STAT participe aux travaux de prospective, de veille technologique, d'évaluation de systèmes sur étagère et de soutien à l'exportation de matériels. J'évalue, de ma propre initiative, certains matériels français ou étrangers et, le cas échéant, j'émets des propositions au CEMAT. De même, après accord de la DGA et de l'état-major de l'armée de terre (EMAT), mes équipes effectuent des démonstrations de matériels au profit de pays étrangers. Enfin, je me suis fixé comme mission de soutenir, dans toute la mesure de mes moyens, les PME de défense. Pour cela, je reçois tout patron de PME qui le désire, afin d'étudier avec lui l'adaptation de ses produits aux perspectives en matière d'équipement, voire, si mon plan de charge le permet, d'évaluer ses produits s'ils rencontrent un intérêt immédiat. Je lui donne ensuite le retour d'évaluation de ses produits.

Pour conduire ces missions, mes effectifs s'élevaient en février 2016 à 640 personnes – trois-quarts de militaires et un quart de civils. Ces personnels permettent d'assurer la conduite d'une quinzaine de programmes majeurs et plus de 400 opérations d'armement dites simplifiées.

En ce qui concerne son organisation, la STAT s'articule autour de huit groupements, réunissant les officiers de programme et les équipes de marque, correspondant aux différentes fonctions opérationnelles de l'armée de terre. Six groupements sont situés à Versailles-Satory, le groupement des troupes aéroportées étant à Toulouse et le groupement aéromobilité – c'est-à-dire les hélicoptères – étant à Valence. Deux groupements disposent d'un détachement avancé, l'un d'appui électronique situé à Mutzig auprès des deux régiments de guerre électronique, l'autre d'appui simulation à Saumur.

J'ai à mes ordres un atelier de soutien aux expérimentations qui me permet, de manière extrêmement réactive, de réaliser outre les moyens nécessaires aux expérimentations, des microcapacités d'adaptation qui font défaut à nos forces et qui ne justifient pas le lancement d'une opération d'armement. Je pense à de petits blindés de guerre électronique, des supports de mitrailleuses, des ballons captifs, des kits d'évacuation sanitaire pour NH 90, etc. Mon détachement d'appui simulation de Saumur est apte à produire, en autonomie et en deux jours, des bases de données terrain pour les opérations extérieures comme celles qui ont été menées hier en Afghanistan et aujourd'hui dans la bande sahélo-saharienne. Il s'agit d'appuyer la préparation à la projection des unités aéroterrestres. Cette unité soutient les systèmes de simulation JANUS et ROMULUS, qui sont encore en service même s'ils sont anciens et qui sont propriété de l'armée de terre. Ces simulateurs nous permettent d'entretenir une communauté simulation regroupant le Maroc, la Tunisie, le Liban, le Sénégal et la Serbie. La STAT participe au rayonnement de l'armée de terre en entretenant les moyens de simulation de ces pays.

Pour conclure ce volet organisationnel, je soulignerais deux particularités qui me distinguent des autres directeurs de centres d'évaluation des autres armées : d'une part, je concentre sous mes ordres les entités de conduite et d'évaluation des programmes ; d'autre part, je suis pilote du domaine de spécialités « système d'armes ». Ce pilotage, sous l'égide du directeur des ressources humaines de l'armée de terre (DRHAT), de cette filière scientifique et technique de deuxième partie de carrière des officiers qui correspond tout de même à des mastères et des diplômes d'ingénieur, me permet de disposer d'une vue globale sur la ressource, l'organisation, la formation, le parcours professionnel et la gestion du personnel officier expert en conduite des opérations d'armement, qu'ils servent à la STAT, à l'EMAT ou à l'EMA. Là aussi, cette particularité est source de cohérence pour le domaine capacitaire.

Pour conduire mon action qui, vous le constatez, est entière et globale, je dois tisser tout un réseau de liens extérieurs à ma propre organisation. Au sein de l'armée de terre, je suis directement rattaché au major général de l'armée de terre et à ses sous-chefs : celui des « Plans-Programmes » pour le pilotage direct de mes activités, celui des « Opérations Aéroterrestres » pour le volet « emploi des capacités », celui de « Performance Synthèse » pour les domaines budgétaires et infrastructures de programmes. En outre, je conduis des réunions bilatérales régulières : avec le CFT pour les volets « appui aux opérations » et « emploi des capacités » ; avec le centre de doctrine d'emploi des forces (CDEF) et le commandement de l'aviation légère de l'armée de terre (COMALAT) pour tout ce qui concerne la doctrine ; et avec la DRHAT pour les actions de formation. Le fait de travailler en permanence avec ces différentes structures me permet de contribuer directement à la construction des piliers de la capacité. Je délivre non seulement un équipement mais une capacité : un équipement ne vaut rien en lui-même s'il n'est pas utilisé par des hommes instruits, possédant une doctrine, dotés de moyens de soutien en place, voire d'une infrastructure.

Au sein du ministère, je mène des réunions bilatérales directes avec les unités de management (UM) intéressées par l'armée de terre : l'UM « opérations d'armement terrestres » (TER), l'UM « hélicoptères et missiles » (HMI), l'UM « espace et systèmes d'information opérationnels » (ESIO), l'UM « avions de missions et de support » (AMS) de la DGA. Avec les directeurs des unités de management (DUM) de la DGA, je dirige directement les opérations non majeures qui ne relèvent pas d'un comité de pilotage entre la DGA et l'EMA. La DGA possède différents centres d'essais : techniques aéronautiques (TA), techniques terrestres (TT), maîtrise des risques nucléaires, biologiques et chimiques (MRNBC), maîtrise de l'information (MI), essais en vol (EV) et essais de missiles (EM). Avec les directeurs de ces centres, j'assure la réalisation et la coordination des programmes communs d'essais et d'évaluation entre les équipes d'essais de la DGA et mes équipes d'évaluateurs.

J'agis également de concert avec le service du commissariat des armées (SCA) car la fonction « habillement » tend désormais à être conduite selon les préceptes d'une opération d'armement. J'ai été mandaté par l'EMAT à ce sujet. Pour ce qui concerne le carburant, je travaille avec le service des essences des armées (SEA) que j'appuie dans la réalisation de ses capacités propres. Il en va de même pour le service de santé.

En interarmées, je travaille étroitement avec la structure intégrée de la maintenance opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) et avec la structure intégrée maintenance opérationnelle des matériels aéronautiques de défense (SIMMAD) pour le volet « soutien en service des matériels ». Je mène également des réunions fréquentes avec mes homologues des autres centres d'expérimentation militaire : le centre d'expertise aérienne militaire (CEAM) de Mont-de-Marsan pour l'armée de l'air, le centre d'expérimentations pratiques et de réception de l'aéronautique navale (CEPA) d'Hyères, le centre d'expertise des programmes navals (CEPN) de Toulon. Ces réunions se font directement ou dans le cadre d'une structure intégrée, le service des essais et des expérimentations aéronautiques de la défense (SEEAD). Il s'agit de réaliser en commun certaines capacités. Peut-être l'ignorez-vous, mais la STAT est responsable de l'évaluation de la capacité d'aérolargage de personnels et de matériels. Il s'agit également de mutualiser les procédures et l'emploi de moyens aériens et maritimes comptés.

Enfin, j'ai établi des protocoles d'accord avec de nombreux organismes, dont le plus emblématique est celui qui a été conclu avec le général commandant les opérations spéciales (GCOS). J'appuie le GCOS pour réaliser des opérations d'armement caractéristiques – elles sont de petites séries, à forte valeur ajoutée, et doivent être effectuées dans des délais brefs – qui ne correspondent pas toujours à la conduite des programmes d'armement.

J'en viens aux aspects capacitaires. Vous verrez que le domaine est très vaste. En préambule, je précise que, pour l'armée de terre, l'absence de notification de grands programmes entre 2011 et 2013 génère de facto une pause entre 2014 et 2017 dans la livraison d'équipements majeurs aux forces, à l'exception notable de la poursuite des livraisons d'hélicoptères Tigre et NH90 et de camions porteurs polyvalents terrestres (PPT) commandés avant 2011. Pour autant, la livraison de capacités de cohérence opérationnelle se poursuit, comme je vais vous le montrer.

En 2015, pour ce qui concerne le renforcement capacitaire, il convient de noter que, pour l'aérocombat, j'ai délivré un poste de commandement à partir d'hélicoptère de manoeuvre poste de commandement (HMPC), permettant le commandement numérisé d'une opération interarmes. C'est donc une capacité de commandement en l'air des unités aéromobiles. Cette capacité, clé de voûte de la numérisation en cours de l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT), est projetée depuis début février dans la bande sahélo-saharienne. J'ai délivré cette capacité à la fin de l'année dernière. En matière de puissance de feu, l'ALAT dispose maintenant d'une capacité de tir au canon de 20 millimètres à partir de l'hélicoptère Cougar. Enfin, l'adoption du système d'imagerie numérique à très haute résolution permet à l'ALAT de participer au recueil et à la transmission directe en flux du renseignement d'origine image depuis des hélicoptères de manoeuvre en vol.

Dans le domaine du combat de contact, mes travaux se sont focalisés sur une version allégée du système fantassin à équipement et liaisons intégrées (FÉLIN) et sur l'achèvement de la tenue de protection nucléaire, biologique et chimique (NBC) des combattants débarqués. Les premiers véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI) en version 32 tonnes ont été livrés, ainsi que des capacités d'agression sous blindage – les tourelleaux téléopérés de 7,62 millimètres pour les véhicules blindés légers (VBL) et les petits véhicules protégés (PVP). Ces capacités seront projetées dans les prochaines semaines dans la bande sahélo-saharienne.

Comme je l'avais proposé au CEMAT, le lance-roquettes unitaire (LRU) a été autorisé en OPEX en 2015 ; depuis deux jours, il est projeté à Tessalit. Comme vous le savez, il est apte à délivrer des feux à 70 kilomètres, avec une précision d'un ou deux mètres. En matière de lutte anti-drone, la STAT a réalisé d'initiative une première capacité opérationnelle qui a été mise en place pendant la COP21 et qui a donné toute satisfaction, tant dans la détection et la poursuite automatique de microdrones que dans l'intégration de cette capacité dans la chaîne de commandement de défense air.

En 2015, la géographie projetable est entrée dans une nouvelle ère avec la livraison de véhicule de l'avant blindé (VAB) d'appui topographique pour le recueil de données en zone des contacts et de modules projetables de traitement de ces données. Certains modules sont déjà projetés sur deux théâtres d'opération.

Le génie bénéficie d'une capacité blindée rénovée avec la livraison progressive de 60 VAB Ultima Génie et 54 VAB Valorisés Génie, ainsi que de l'autorisation d'emploi d'un drone du génie pour la lutte contre les engins explosifs improvisés. Le personnel chargé de la neutralisation des mines et pièges peut désormais se protéger lors des interventions grâce à un brouilleur portatif. Ces moyens sont en cours de préparation pour emploi dans la bande sahélo-saharienne.

Pour pallier le retard de l'A400M, mon groupement aéroporté de Toulouse – qui est très investi dans ce domaine – a ouvert l'emploi des CASA 235 au saut en parachute de dernière génération et au largage de matériel par gravité.

La qualité de l'instruction et de l'entraînement des unités en garnison par la simulation a très nettement augmenté en 2015 : 100 % des régiments sont équipés de nouveaux moyens utilisant une imagerie en trois dimensions, ce qui est beaucoup plus convivial et réaliste pour l'entraînement de nos équipages et groupes en garnison.

S'agissant de la préparation de l'avenir, la STAT a transmis un certain nombre d'expressions de besoin à l'EMAT en 2015. Citons principalement la fiche de caractéristiques militaires de référence du nouveau système de drone tactique (SDT) – qui, depuis, a été choisi –, du nouveau système de livraison par air (SLPA) et du VBL dans sa version ultime. Je précise qu'il faut remotoriser ces véhicules pour qu'ils puissent tenir jusqu'en 2030. D'autres fiches concernent l'intégration du poste radio CONTACT dans tous les blindés, le futur fusil de tir de précision, des tablettes numériques pour les hélicoptères, et des tentes pour les PC de brigades. Voyez que l'éventail est très large.

Une expression de besoin a fait l'objet d'une urgence opérationnelle, déclarée par l'EMA au profit de l'opération Sentinelle. Il s'agit de réaliser un premier niveau de système de communication et d'information, appelé AUXYLIUM, qui utilise la technologie 4G et le smartphone et formant une bulle locale radio à haut débit réservée à la défense. Lors des attentats, le réseau téléphonique a été saturé aux environs du Stade de France. En juin prochain, au moment de l'Euro 2016, nous serons en mesure d'équiper nos soldats sur le terrain de smartphones à très haut débit mais dans une bulle totalement réservée à la défense et par conséquent non pénétrable par les réseaux Orange ou autres. Le volume d'un millier d'équipements doit être opérationnel en juin pour la protection de Paris dans le contexte des manifestations de l'Euro 2016.

Cette année, la STAT a en outre directement participé, en appui de la DGA, à un certain nombre de campagnes : à Mourmelon, pour la sélection de l'arme individuelle future (AIF) ; à Istres, en Grande Bretagne et aux États-Unis pour les démonstrations du système de drone tactique SDT ; à Bruz, pour la qualification d'un socle technique commun d'échanges pour des systèmes d'information.

Au total, en 2015, la STAT a proposé à l'EMAT treize nouvelles expressions de besoin, vingt-neuf autorisations de livraison de matériels dans les forces et vingt et une autorisations de déploiement en opération.

J'en arrive à mon plan de charge pour l'année 2016, pour lequel je vais me focaliser sur quelques opérations principales.

Au titre du renforcement capacitaire, outre la réalisation du système AUXYLIUM précédemment évoqué, je dois livrer très rapidement les vingt-cinq premiers nouveaux véhicules poids lourds des forces spéciales (PLFS) au commandement des opérations spéciales (COS). Cette opération est conduite comme une urgence opérationnelle avec une priorité totale, dans un plan commun d'essais très intégré entre l'industriel retenu – Renault Trucks Defense (RTD) – la DGA et la STAT, avec la participation du COS.

Au cours du premier trimestre de cette année, un nouveau simulateur d'entraînement des postes de commandement de niveau brigade et régiment, SOULT, sera mis en service au centre d'entraînement de Mailly-le-camp. Il est fondamental d'entraîner nos équipes de commandement avant la projection. La simulation le permet et produit les meilleurs effets. Des stations sol satellitaire COMCEPT liées au satellite ATHENA FIDUS seront également livrées aux forces en 2016, en complément de l'action des stations SYRACUSE. Cet été, je proposerai aussi l'adoption du système FÉLIN allégé – qui permet de gagner jusqu'à six kilos pour nos soldats – qui pourra être projeté en opération avant la fin de l'année.

L'appui électronique au contact, une capacité que nous avons développée notamment au Mali, consiste à intercepter, écouter et brouiller en opération les groupes armés terroristes. Ce domaine sera renforcé cette année par la mise en service d'un nouveau système léger et la valorisation des systèmes existants.

Pour le programme SCORPION, 2016 sera également une année très importante : la définition des véhicules blindés Jaguar et Griffon sera complètement figée, ce qui permettra de préparer l'industrialisation de ces matériels. Pour mémoire, le Jaguar succédera au char léger AMX10 RCR et le Griffon remplacera le VAB. Cette étape constituera l'achèvement d'un travail collaboratif majeur conduit avec la DGA et le groupe momentané d'entreprise Nexter-RTD-Thales.

En matière d'aérocombat, nous mettrons cette année en service un armement mitrailleuse Gatling de sabord pour les Gazelle du COS. L'A400M permettra le saut à 4 000 mètres de jour pour les chuteurs opérationnels et le posé d'assaut. S'agissant du saut en automatique, j'homologuerai dans les six mois l'emploi des C130H suédois et C130K autrichien, ce qui garantira un sixième des sauts d'entraînement opérationnels annuels de nos unités parachutistes.

En matière de préparation de l'avenir, je viens de proposer à l'EMAT des fiches de caractéristiques militaires concernant plusieurs besoins planifiés. Il s'agit de l'expression de besoin du système de simulation SCORPION : simulation cabine et embarquée. Il s'agit aussi de ce qu'il est convenu d'appeler le SCORPION léger, un programme de véhicules blindés légers tactiques polyvalents, des 4X4 d'environ douze tonnes qui peuvent accompagner les blindés Jaguar, Griffon et Leclerc. J'ai également proposé le projet de la fiche de caractéristiques militaires du Caïman NH90 pour les forces spéciales.

Dans les prochains mois, je proposerai un projet de besoin relatif au traitement d'obsolescence de la Gazelle qui restera en service opérationnel encore pendant quinze à vingt ans, dans l'attente de la livraison des premiers hélicoptères interarmées légers (HIL) à partir de 2028. D'autres expressions de besoin suivront, qui concerneront le futur pistolet automatique des armées – nous allons enfin nous séparer du pistolet automatique de la Manufactures d'armes de Châtellerault, le MAC50 –, un premier niveau de robotisation du combat débarqué, la succession du véhicule de haute mobilité déployé en Guyane en protection du site de Kourou au sein du troisième régiment étranger d'infanterie.

Cette année, nous poursuivrons l'évaluation de l'AIF retenue, dont le choix devrait être fait avant l'été par la DGA, en vue de livraisons aux forces en 2017. Il en va de même pour le VBL Ultima.

La STAT entamera également en 2016 les campagnes d'évaluation du missile moyenne portée (MMP) de MBDA qui remplace le Milan, de la roquette nouvelle génération qui remplace l'Eryx et l'AT4CS. Toute la trame roquette - missile est en phase de renouvellement. Avec la DGA, nous entamerons le plan commun d'essai et d'évaluation du SDT Patroller, qui a été retenu, ainsi que celui du minidrone successeur du drone de reconnaissance au contact (DRAC). Ces nouvelles capacités doivent être livrées aux forces à compter de 2018.

Au total, en 2016, mon objectif est de proposer à l'EMAT la formalisation du besoin de vingt-neuf nouvelles capacités ou amélioration de capacités existantes, trente-deux nouvelles livraisons d'équipement dans les forces et quarante-trois autorisations d'emploi en opération, intérieure ou extérieure.

Pour terminer mon propos, je voudrais vous exposer mes préoccupations principales à moyen terme. Dans les quatre années à venir, je serai particulièrement attentif à des livraisons qui vont renouveler des capacités complètes. Il s'agit de renouveler toute la gamme des véhicules du COS : le véhicule léger, le poids lourd et ce qu'on appelle le Fardier, petit véhicule parachutable qui sert à transporter des impedimenta. Il faudra que nous remplacions toute la trame portable antipersonnel et antichar, c'est-à-dire les moyens de tir de l'infanterie de 0 à 2 500 mètres, depuis le pistolet automatique jusqu'au missile moyenne portée à 2 500 mètres.

La livraison des premiers Griffon et Jaguar, très attendue par les forces, doit se faire en cohérence avec nombre d'opérations en interface : les nouveaux postes de radio CONTACT, le système d'information SICS qui va remplacer les systèmes actuels, le missile moyenne portée et autres armements qu'il faudra intégrer dans les Jaguar et les Griffon, ainsi que les brouilleurs BARAGE.

Autre point d'attention majeur : la livraison du programme CERBERE visant à renouveler les moyens de simulation du Centre d'entraînement tactique (CENTAC) de Mailly-le-camp et équiper le Centre d'entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) de Sissonne de moyens de simulation. CERBERE permettra un entraînement bien plus réaliste des sous-groupements tactiques interarmes (SGTIA) et de nos groupements tactiques interarmes (GTIA) avec une réelle sanction des effets des feux par la simulation. La capacité opérationnelle de l'armée de terre repose également sur ces centres.

Autre défi majeur : accompagner la montée en puissance d'une nouvelle fédération de systèmes d'information et de communication qui doit remplacer, en rupture, toute la chaîne de commandement actuelle, du niveau de la division à celui de la section. Une telle transition à cette échelle n'a jamais été réalisée à ce jour. Elle doit répondre à une attente très forte de la part de nos soldats d'une numérisation fluide et flexible, de bout en bout, intégrant la coordination des intervenants dans les deuxième et troisième dimensions. L'intégration dans les porteurs terrestres et aéroterrestres ne sera pas la moindre de mes préoccupations.

Avec ces programmes, nous touchons concrètement à la notion que j'évoquais en préambule de « système de systèmes » interarmes, interarmées et interalliés. C'est un défi majeur qui exige que les décideurs et acteurs de la DGA et des armées disposent du champ d'action le plus large possible et d'une coordination très forte pour faire sauter tous les silos.

Les attributions qui sont les miennes, en me donnant l'autorité sur tous les officiers de programme et de toutes les équipes de marque de l'armée de terre et donc la connaissance détaillée et l'influence sur l'avancement de tous les programmes terrestres et de certains programmes interarmées, comme mon action en réseau élargi avec les trois armées, la DGA et bien sûr les industriels, me permettent de faire face à cette nouvelle donne.

In fine, l'action de la STAT consiste à délivrer ex nihilo à l'armée de terre, et pour partie aux armées, des capacités complètes – équipement, environnement de soutien et d'infrastructure, moyens de formation, doctrine d'emploi et organisation –, intégrées dans un système de forces interarmes, interarmées et interalliés, tout en assurant, en réactivité, l'indispensable adaptation aux opérations, et en soutenant notre industrie de défense dans ses exportations.

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés de la commission de la Défense nationale et des forces armées, je vous remercie pour votre attention et suis prêt à répondre aux questions que vous voudrez bien me poser.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion