Intervention de Marie-Françoise Bechtel

Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 15h00
Débat sur les politiques industrielle et commerciale européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Françoise Bechtel :

Monsieur le président, je limiterai mon intervention car je suis en très grand accord avec celle de Mme Rabin.

Je ne sais pas si le débat que nous avons eu portait sur la politique et la technocratie, mais il avait trait certainement à l'ambition opposée au principe de réalité, chacun d'entre eux pouvant d'ailleurs se caricaturer.

L'ambition, c'est celle de notre pays qui vient de se doter de ce que le Premier ministre a appelé un nouveau modèle français. Ce modèle repose sur le pacte de compétitivité avec le crédit d'impôt compétitivité emploi. Mme Bricq a annoncé récemment dans la presse un certain nombre de mesures visant à soutenir à l'exportation des filières en fonction de domaines prioritaires. Mais cette ambition se heurte manifestement au principe de réalité, c'est-à-dire aux difficultés que nous rencontrons pour négocier dans le cadre européen, d'abord parce que l'Europe est très large, ensuite parce que c'est une mécanique institutionnelle extrêmement lourde.

Sur le plan industriel, le ministre du redressement productif a récemment indiqué que, dans le cadre des conseils intergouvernementaux réunissant ses homologues de l'industrie, il avait soutenu si ce n'est initié un mouvement tendant à ce que les objectifs européens prennent enfin en compte plus fortement l'objectif industriel et à fixer un taux de 20 % de la valeur ajoutée dans chaque pays – ce qui est très supérieur à nos 12,8 %.

Je note avec intérêt que cette ambition est d'autant plus soutenable qu'elle a lieu dans une démarche intergouvernementale hors de la pure mécanique de transposition des directives, voire d'application des règlements.

Contrairement à l'industrie, l'Europe a une politique commerciale. Là aussi, on voit très bien la tension entre la mécanique et l'ambition. La directive marchés publics nous place dans de graves difficultés de négociations avec certains pays, et nous retrouvons en effet les intérêts du partenaire allemand. Il sera donc très difficile de déboucher sans avancées timides. D'un autre côté, il faudrait prendre des mesures visant à protéger d'une manière ou d'une autre nos productions propres. Le débat sur le protectionnisme m'a paru complètement irréel. Personne ici n'a soutenu, je crois, qu'il fallait passer au protectionnisme. Chacun sait que de nombreuses zones du monde se protègent peu ou prou en prenant des mesures plus ou moins claires. Souvenez-vous de l'American selling price : Nous savons très bien que la fourniture à l'armée américaine par un certain nombre d'industries et de services est en réalité une mesure de protection. Et je ne parlerai pas d'autres pays, y compris asiatiques.

Il y a certainement quelque chose à faire en la matière, mais je reconnais que la difficulté est extrême. Madame la ministre, vous avez parlé des pays scandinaves. Je crois que le Royaume-Uni et les pays de l'Est ne sont pas chauds du tout, c'est le moins que l'on puisse dire, pour des mesures de protection ou de juste échange qui est une forme de protection.

Ma dernière remarque concernera le taux de l'euro. La balance commerciale française s'est effondrée de plus de 90 milliards depuis dix ans, c'est-à-dire depuis que l'euro existe. Madame la ministre, vous nous avez objecté que l'Allemagne ne s'effondrait pas, bien au contraire. Mais chacun sait que l'Allemagne vend 66 % de sa production dans la zone euro ou en Europe. Dans ces conditions, la structure de production de la France, qui est une puissance exportatrice, la place dans une situation totalement différente de celle de l'Allemagne. Nous aurions la possibilité, non d'avoir une posture qui ne mène pas à grand-chose, mais d'avoir une position de nature politique qui pourrait peut-être aider.

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