Intervention de Gérard Cherpion

Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 15h00
Contrat de génération — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous ne sommes pas dans un débat artificiellement clivant, comme vous avez pu le dire, monsieur le ministre, lors de la discussion générale. Nous sommes dans un débat d'une importance fondamentale : quelle politique de l'emploi voulons-nous pour notre pays ? Quelles réponses devons-nous apporter à la situation actuelle du chômage ? Comment assurer au mieux l'insertion des jeunes sur le marché du travail et comment y maintenir les seniors ? Oui, la situation est grave : 3,2 millions de chômeurs, 1 000 chômeurs de plus par jour, 25 % de chômage chez les jeunes, 89 600 chômeurs indemnisés de plus pour la seule année 2013 selon la prévision de l'UNEDIC ; ce n'est pas parce que nous validons le diagnostic de la situation que nous partageons vos solutions.

Au terme de la discussion de la semaine dernière, un grand nombre d'interrogations subsistent.

Le lien intergénérationnel n'est présent que dans l'intitulé du projet de loi et la formation des jeunes est absente du texte, en dépit d'un amendement adopté à l'unanimité, ce qui montre l'attente des parlementaires mais aussi des partenaires sociaux.

La question du financement n'est pas réglée. Les contrats de génération seront en partie financés par le crédit d'impôt compétitivité emploi. Les vingt milliards d'euros prévus sont donc d'ores et déjà amputés, et ce avant même leur mise en place. Le ministre a admis que personne n'était capable d'évaluer de manière précise le coût de ce dispositif, y compris, donc, le Gouvernement.

Une telle déclaration est au mieux inquiétante, au pire dangereuse. Il est de sa responsabilité de nous dire comment et à quelle hauteur est financé le dispositif qu'il nous demande de voter, et quelles seront les conséquences sur les enveloppes budgétaires utilisées pour le financer.

En tout état de cause, le Gouvernement prévoit que 500 000 contrats de génération seront conclus en cinq ans. L'Observatoire français des conjonctures économiques parle, quant à lui, de 21 000 créations d'emplois par an. Nous avons entendu les ministres évoquer un puzzle de mesures destinées à l'emploi et nous expliquer que nous ne pouvons pas critiquer un projet sans considérer les textes dans leur globalité. Sur les quatre pièces qui composent ce puzzle, deux ont été votées ou sont en passe de l'être : les emplois d'avenir et les contrats de génération. Ces deux mesures cumulées coûteront 5 milliards d'euros, pour un nombre d'emplois créés estimé à 50 000 par an. Comparé aux 3,2 millions de chômeurs que connaît notre pays, ce chiffre semble bien peu ambitieux, alors que la dépense fiscale, elle, se fera douloureusement sentir sur nos finances publiques.

Un des points positifs de ce texte est issu d'un amendement à l'article 5, qui étend la possibilité d'embauche à des jeunes présents dans l'entreprise avant leurs 26 ans et avant la mise en oeuvre de la présente loi. Ce dispositif, que j'avais suggéré dès la discussion générale, corrige une inégalité en permettant à certains jeunes déjà présents dans l'entreprise, notamment en alternance, de bénéficier également du contrat de génération.

Le groupe UMP a mis en garde le Gouvernement et la majorité quant aux dispositions prévoyant la perte de l'aide en cas de licenciement. Plusieurs députés ont déposé des amendements visant à supprimer ou à restreindre la perte de l'aide mentionnée à l'alinéa 59 de l'article 1er. Cette disposition aura comme conséquence néfaste de limiter l'embauche des seniors. Nous n'avons malheureusement pas été entendus sur ce point, mais, au cours de l'examen du texte, la majorité est allée encore plus loin ! Une disposition introduite par voie d'amendement stipule en effet que les entreprises ne pourront pas toucher l'aide en cas de rupture conventionnelle précédant la conclusion de contrats de génération. L'absence de prise de position du Gouvernement est un signe fort de sa volonté de mettre en cause la rupture conventionnelle, pourtant voulue par les partenaires sociaux.

Le ministre a d'ailleurs lui-même déclaré, durant les débats, que cet amendement risquait de « créer des situations préjudiciables à l'embauche d'un certain nombre de jeunes ». Eh bien, je vous le confirme, monsieur le ministre : oui, cette disposition aura des effets considérablement négatifs sur l'emploi des jeunes. Pourtant, vous ne vous y êtes pas opposé. En d'autres termes, au lieu de favoriser l'emploi des jeunes et des seniors, vous tendez vers l'effet inverse. Devant une telle rigidité, les employeurs ne souscriront pas à votre dispositif ! L'engagement de la procédure accélérée ne permettra pas, d'ailleurs, de corriger cette erreur.

Après ces exemples, je n'aborderai pas en détail tous les points du texte qui posent problème ou sont extrêmement flous, comme la négociation dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, les seuils choisis pour les tailles des entreprises, le cavalier législatif présenté par le Gouvernement relatif aux inspecteurs du travail ou les délais trop courts. Vous le voyez, les griefs que nous avons contre ce texte sont nombreux et n'ont pas été atténués par son examen.

Pour toutes ces raisons, et parce que nos concitoyens attendent des mesures fortes et courageuses en matière de chômage et de baisse des déficits de l'État, le groupe UMP votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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