Intervention de Pouria Amirshahi

Séance en hémicycle du 5 février 2016 à 15h00
Protection de la nation — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPouria Amirshahi :

J’ai fait partie de ceux qui, le 13 novembre au soir, et jusqu’au 15 pour ce qui me concerne, ont approuvé tant l’attitude que les décisions de l’exécutif, y compris l’état d’urgence décrété pour douze jours. En effet, les terroristes étaient encore dans la nature à ce moment-là, les assassins étaient encore dans la rue et il fallait bien, pour douze jours – c’était largement suffisant –, se donner les moyens de les appréhender.

Mais dès le 16, mon avis a changé, glacé par le discours de Versailles que, pour ma part, je n’ai pas applaudi. Je n’ai pas applaudi parce que j’y ai vu, à l’image d’autres dispositions annoncées dans d’autres pays européens, une dérive globale, une crispation du pouvoir sur son propre pouvoir, une sorte de confusion dans notre débat démocratique entre ce qui protège et ce qui exclut, entre ce qui relève de la sûreté nationale et ce qui relèverait de la responsabilité supposée de corps étrangers.

Pour ma part, je ne me laisserai pas aller à des confusions visant à constitutionnaliser l’état d’urgence, avec des conséquences potentiellement lourdes.

En laissant pour l’instant de côté les aspects pratiques, je souhaiterais revenir, monsieur le Premier ministre, sur la dimension principielle de la réforme de la Constitution. La Constitution définit des principes et vous avez vous-même, malheureusement, repris à votre compte la funeste formule selon laquelle « la sécurité est la première des libertés » – funeste, car cette formule n’est pas de nous.

Je me permets de vous rappeler que la première de nos sécurités, c’est la liberté, celle qui nous permet d’être en démocratie. C’est donc la liberté qui nous permet d’être en sécurité et de ne pas être inquiétés pour nos opinions.

Je finirai sur ce point fondamental : il n’y a pas, dans le domaine des libertés, à invoquer la sécurité, qui n’est pas une liberté mais n’en est qu’une condition. Elle est la condition de la liberté d’aller et venir, la condition de notre liberté de conscience, la condition de la liberté de nous réunir – et non une liberté en soi ! Cela est une funeste idée, que nous n’avons jamais partagée !

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