Intervention de Jacqueline Fraysse

Séance en hémicycle du 5 février 2016 à 15h00
Protection de la nation — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

Avec cet article 1er, vous inscrivez l’état d’urgence dans la Constitution. Il s’agit d’une disposition que vous tentez de justifier par votre souci de protéger la sécurité de nos concitoyens – qui est en effet essentiel et sans aucun doute partagé par tous. C’est d’ailleurs précisément ce souci qui m’a conduite à voter la prolongation de l’état d’urgence en novembre dernier. Là n’est donc pas l’objet du débat qui nous occupe.

La question est de savoir si cette inscription permet effectivement, comme vous le prétendez, d’améliorer la sécurité. Nous pensons que ce n’est pas le cas et vous le savez parfaitement, car les faits montrent que, depuis 1955, date à laquelle la loi a instauré l’état d’urgence, les gouvernements y ont eu recours à plusieurs reprises sans qu’il soit sacralisé dans la Constitution. Vous avez d’ailleurs déclaré vous-même que cet état d’exception « doit être limité au strict nécessaire et ne présenter qu’un caractère temporaire ».

Son inscription aujourd’hui dans la Constitution correspond en réalité à une modification durable de l’équilibre des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire qui fonde notre République et son État de droit. C’est la marque d’une volonté de réduire le contrôle du pouvoir exécutif par un pouvoir judiciaire indépendant. C’est donc ouvrir la porte à de graves dérives liberticides n’ayant rien à voir avec la lutte contre le terrorisme.

Cultiver la peur chez nos concitoyens, sachant que le risque zéro ne peut exister, et utiliser leur légitime émotion pour introduire dans la Constitution des mesures remettant en cause les libertés individuelles et collectives n’est pas admissible. Je voterai contre cet article 1er, qui s’inscrit d’ailleurs parfaitement dans l’actualité récente de répression des mouvements sociaux et de criminalisation de l’action syndicale.

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