Intervention de Bernard Chevassus au Louis

Réunion du 27 janvier 2016 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Bernard Chevassus au Louis, président de l'association Humanité et Biodiversité :

Alors que l'on estime que l'artificialisation concerne entre 20 000 et 70 000 hectares, les dernières statistiques du ministère de l'agriculture montrent que, chaque année, environ 200 000 hectares de prairies sont transformés en terres de culture, ce qui est préoccupant en termes de biodiversité. Je ne pense pas que l'on puisse demander à la compensation d'être un frein efficace à ce phénomène. Chacun sait qu'un terrain qui devient constructible génère des plus-values. Mais n'essayez pas, en faisant monter les prix, de faire porter à la compensation un pouvoir dissuasif qu'elle n'aura jamais.

Vous demandez si les opérations de compensation doivent être assorties d'une obligation de moyens ou de résultats. Personnellement, je ne crois pas à l'obligation de résultats. Les médecins ont une obligation de moyens, c'est-à-dire qu'ils doivent mobiliser tout leur art pour essayer de vous guérir. À mon avis, il faudrait combiner les deux, c'est-à-dire faire porter l'obligation de moyens sur les maîtres d'ouvrage, et ajouter un deuxième système soit d'assurance, soit de fonds de garantie pour parvenir à l'obligation de résultats, au cas où les choses n'auraient pas fonctionné comme on pouvait le penser.

Tous les outils existent déjà pour assurer la pérennité de la compensation dans le temps. Le Conservatoire du littoral utilise des baux environnementaux qui lui permettent de faire gérer ses terrains suivant un cahier des charges adéquat, tout en en conservant la propriété. On peut aussi prendre des arrêtés de protection de biotopes et autres. Reste à savoir si la pérennisation doit être obligatoire, c'est-à-dire si elle doit ou non s'appliquer à tous les terrains utilisés pour la compensation.

Enfin, qui doit mener les opérations ? Des opérateurs publics ou des opérateurs privés ? En la matière, il faut éviter tout dogmatisme. Quand vous vous rendez dans un laboratoire d'analyse médicale, vous y allez en confiance sans vous intéresser à son statut. Vous savez qu'il est sous assurance qualité, qu'il y a des procédures de contrôle et que tout sera fait au mieux. Lorsqu'un bureau d'études, qu'il soit public ou privé, procède à un inventaire de biodiversité, ce qui importe c'est qu'il soit soumis à des procédures de qualification, au même titre que lorsque l'on autorise quelqu'un à intervenir sur un monument historique. De même, il faut légiférer pour fixer les droits et obligations d'un opérateur de compensation, qu'il s'agisse d'une coopérative, d'un groupe associatif, du Conservatoire du littoral ou d'un opérateur privé. Les associations qui proposeraient soit de réaliser des études, soit de faire de la compensation, doivent être soumises aux mêmes obligations de qualité qu'un opérateur privé. Prenons le temps d'organiser un système, quitte à renvoyer les points un peu difficiles à des décrets d'application plutôt que de chercher à légiférer rapidement.

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