Intervention de Arnaud Robinet

Réunion du 26 janvier 2016 à 16h45
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Robinet, rapporteur :

M. Touraine a abordé des enjeux importants et je partage ses interrogations. Je souhaiterais, pour ma part, apporter des éclairages complémentaires en axant mes propos sur trois éléments.

Un premier constat, amer, peut être dressé : près de trois ans après la réforme, les textes les plus attendus n'ont toujours pas été publiés. De nombreuses dispositions relatives aux conditions de réalisation des examens de biologie médicale sont intégrées dans un texte conséquent dont la publication est imminente, d'après ce qu'on nous dit. Ce décret en Conseil d'État relatif à la biologie médicale est très attendu par l'ensemble des acteurs et conditionne l'organisation de la profession. Les dispositions relatives aux sociétés exploitant les laboratoires, qui incluent des orientations visant à lutter contre la financiarisation du secteur, seraient portées par un autre décret en Conseil d'État, dont la publication est également imminente. Mais d'autres dispositions tardent à être appliquées : les sanctions administratives, la publication du décret relatif aux laboratoires de référence et les dispositions relatives à l'outre-mer. Sur ce dernier point, le ministère de la santé nous assure que le texte est prêt et n'attend plus que la publication du décret relatif à la biologie médicale.

S'agissant toujours de la publication des textes attendus, un important décret relatif aux modalités d'exercice de la biologie médicale, publié en septembre 2015, a fait l'objet d'une vive contestation de la part des représentants de biologistes médicaux, quelques organisations ayant même manifesté leur souhait d'engager un contentieux. Le ministère a toutefois accédé aux revendications exprimées mais au prix d'un texte modificatif, retardant d'autant la publication d'arrêtés d'application tout aussi importants.

En second lieu, j'aimerais insister sur l'importance de la modification du paysage de la biologie médicale. On assiste aujourd'hui à un important mouvement de regroupement des laboratoires : quatre mille laboratoires en 2010, un peu plus d'un millier à ce jour. Ce regroupement correspond à une logique d'optimisation visant à contrecarrer les effets des baisses tarifaires ou à engager la démarche d'accréditation avec une masse critique suffisante pour en absorber les coûts. La recomposition est également facilitée par les évolutions juridiques : le verrou du nombre de sites est aujourd'hui ouvert et permet à un laboratoire de s'implanter sur plusieurs sites.

Quatre remarques peuvent être faites à ce propos.

Tout d'abord, le regroupement s'opère parallèlement à une démarche d'accréditation nouvelle. Les acteurs doivent aborder de front deux enjeux. Il s'agit donc d'un réel exploit !

Ensuite, le regroupement entre laboratoires est aujourd'hui plus avancé dans le secteur privé que dans le secteur public. La mise en place des groupements hospitaliers de territoire devrait permettre, à terme, de réduire cet écart.

Par ailleurs, si le nombre de laboratoires a durablement été réduit, il n'en est pas de même s'agissant du nombre de sites qui resterait stable. Sur ce point, notre vigilance se doit d'être constante, les regroupements n'ayant pas encore produit tous leurs effets.

Enfin, il semble que le regroupement s'opère parfois au prix d'une spécialisation des sites et d'une plus grande transmission d'échantillons : les sites de proximité sont orientés vers les phases pré-analytique et post-analytique tandis que les sites centraux sont dédiés à la phase analytique. Nous disposons encore de peu de recul sur la réalité de cet enjeu, mais il nous semble nécessaire qu'une attention particulière soit portée au respect des exigences de santé publique. C'est pourquoi nous plaidons pour que la spécialisation ne se traduise pas par une perte de qualité des examens en raison des conditions de transport d'échantillons. Il nous semblerait ainsi utile d'évaluer les effets de la spécialisation sur l'attractivité de la profession de biologiste médical. Tout l'intérêt de la réforme a été de valoriser la profession en insistant sur la médicalisation de l'examen, la proximité avec le patient et le dialogue avec le clinicien. Il ne faut pas perdre de vue ces objectifs.

Troisième et dernier élément de ma réflexion, j'aimerais insister sur un aspect relatif à l'exercice de la profession de biologiste médical. Le décret de septembre 2015, qui fait l'objet d'une contestation, prévoit notamment la création d'une instance, la commission nationale de biologie médicale. Une des pierres d'achoppement a trait à la composition d'une de ses formations. Des modifications répondant aux souhaits exprimés par les représentants des biologistes seront opérées mais on peut regretter qu'un consensus n'ait pu être dégagé plus tôt. Tant que le décret modificatif ne sera pas publié, l'installation de cette commission ne sera pas effective et d'importants arrêtés, nécessitant un avis de la commission, ne pourront être pris. Je pense notamment à l'arrêté portant définition des tests, recueils et traitements de signaux biologiques, à visée de dépistage, d'orientation diagnostique ou d'adaptation thérapeutique immédiate ne constituant pas des examens de biologie médicale.

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