Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du 16 décembre 2015 à 21h30
Transports collectifs de voyageurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, je salue l’initiative de notre collègue Gilles Savary qui a travaillé à la rédaction de cette proposition de loi, d’abord relative à la lutte contre la fraude dans les transports en commun avant d’être élargie aux questions de sécurité et de prévention du terrorisme.

Je voudrais dire d’emblée qu’en tant que député écologiste, mais également en tant qu’ancien responsable des transports dans une importante collectivité, la communauté urbaine de Nantes, que quelqu’un qui souhaite le développement des transports en commun et de leur usage, ce qui est le cas de tout écologiste, ne peut être que très attentif aux questions de sécurité et de fraude.

Lorsque j’ai pris mes fonctions à Nantes, il s’est produit un fait divers comme il s’en produit parfois, malheureusement, dans les transports en commun. Cela s’est passé la nuit et les personnes qui se trouvaient dans le tramway n’ont pas réagi – certains diraient par indifférence, mais sans doute tout simplement par peur, parce qu’elles étaient hébétées par ce déchaînement de violence. Dans les jours, les semaines, voire les mois qui ont suivi ce fait divers, la fréquentation nocturne des transports en commun sur le réseau nantais s’est effondrée, simplement parce que les gens avaient le sentiment que leur sécurité n’était plus garantie. Avec Jean-Marc Ayrault, qui était à l’époque président de la Communauté urbaine de Nantes, nous avons pris diverses mesures afin de sécuriser les transports, de nuit comme de jour.

Parmi ces mesures, il y a la vidéosurveillance. Nous avons ainsi généralisé, sans que cela suscite la moindre polémique, la vidéosurveillance dans l’ensemble des tramways et des bus de l’agglomération nantaise. Certains nous ont affirmé que cela allait déplacer le problème, mais en réalité cela a entraîné une très forte baisse des actes d’agressivité, de violence et de délinquance dans les transports en commun. Certains faits se sont tout de même produits, mais la vidéosurveillance a permis d’en élucider un grand nombre ou de remonter jusqu’à leurs auteurs.

Il est important, lorsque l’on veut développer l’usage des transports en commun, de faire en sorte, même s’ils ne peuvent être totalement sanctuarisés, qu’ils soient au moins sécurisés.

Pour ce qui est de la fraude, le problème est un peu le même. Pour les réseaux de transports urbains, la fraude est d’abord une perte de recettes. Il ne faut pas oublier qu’un réseau de transports urbains étant très subventionné, toute perte de recettes pose un problème économique aux collectivités qui en sont les autorités organisatrices.

En outre, la fraude provoque un sentiment d’injustice. C’est encore plus vrai dans les trains du réseau ferré national. Les usagers qui paient leur billet sont souvent choqués de n’avoir pas été contrôlés car ils ont le sentiment qu’on peut voyager en train sans payer et que dans cette affaire celui qui paie est un peu le « pigeon ». La fraude dans les transports en commun est donc une véritable plaie.

Naturellement, des mesures de renforcement des contrôles ont été prises. Mais lorsqu’on entend les chiffres que vous avez cités concernant les pertes de recettes de la SNCF ou d’un grand réseau comme la RATP, on comprend la nécessité d’agir contre le très faible taux de recouvrement des amendes, c’est-à-dire l’absence d’efficacité de la lutte. La fraude est donc un enjeu majeur.

Vous avez cité en commission, monsieur le rapporteur, des chiffres très intéressants. Je veux les rappeler car tout le monde n’en a peut-être pas conscience. On parle de la sécurité du transport aérien, or il représente 140 millions de voyages par an, en France, contre 2,5 milliards de voyages pour le transport ferroviaire. Le train représente donc un enjeu beaucoup plus important que l’avion, ce dont, au passage, je me félicite… Sept millions d’usagers prennent le train chaque jour en France ! C’est un enjeu extrêmement important et la sécurité dans les transports est fondamentale.

Vous avez également rappelé, monsieur le ministre, l’importance de la sécurité des femmes : près de 100 % des femmes interrogées en Île-de-France ont dit avoir été victimes de harcèlement ou d’agression dans le réseau de transports en commun.

Nous avons naturellement évoqué tout à l’heure l’attaque heureusement déjouée grâce au courage et à la bravoure de quelques passagers du Thalys. Il semble qu’une expérimentation concernant la présence de portiques sera prochainement conduite. Je voudrais dire à cette occasion, et je crois que le rapporteur partage ce point de vue, qu’il faut être réaliste : on ne pourra pas généraliser les portiques pour tous les trains de France, pas même pour tous les TGV de France, disons-le clairement, car cela restreindrait considérablement l’usage du train. Il faudrait d’abord transformer lourdement les gares, les quais, l’accès aux trains, et demander aux passagers d’arriver une heure ou une demi-heure en avance, comme c’est le cas pour prendre l’avion, ce qui pénaliserait considérablement le train.

La proposition de loi prévoit donc d’autres mesures de sécurité, comme la multiplication des contrôles aléatoires et des fouilles. Il est normal de fouiller les bagages et d’effectuer des palpations par rapport au risque que représente la présence d’armes dans un train. Je salue cette démarche, plus pragmatique que l’illusion qu’est la généralisation des portiques qui, à première vue, peut paraître intéressante mais ne résoudrait pas le problème.

En ce qui concerne la fraude, le texte prévoit que les contrôles et le recouvrement des amendes soient effectifs, car il s’agit, là aussi, de pertes de recettes et du sentiment d’injustice qu’ont les usagers des transports en commun.

Pour toutes ces raisons, je soutiens pleinement votre proposition de loi.

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