Intervention de Marie Le Vern

Réunion du 8 décembre 2015 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie Le Vern :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, chers collègues, la France a été touchée au coeur par les terribles attentats qui ont frappé Paris.

Aucun d'entre nous n'aurait imaginé que nous examinerions cette proposition de loi dans de telles circonstances, à la lueur d'une si terrible actualité. Ici, dans ces murs, la représentation nationale a le devoir de légiférer dans l'apaisement. Ne tombons pas dans le piège que nous tendent les terroristes qui espèrent que la colère et l'indignation légitime qui emportent la nation trouveront chez certains, y compris dans nos rangs, leur expression dans des amalgames injustes et des passions fratricides. L'unité nationale est la seule réponse, les pouvoirs publics sont mobilisés et nous prenons nos responsabilités.

Cette proposition de loi traite de manière transversale de la sécurité dans les transports. Les atteintes à la sécurité prennent des visages différents, elles appellent donc des dispositifs variés, mais aussi une réponse politique homogène. C'est cet impératif que nous entendons satisfaire.

Le texte dont nous débattons aujourd'hui a été élaboré durant plusieurs mois par notre rapporteur, pour répondre aux conclusions du Conseil national de la sécurité dans les transports en commun d'octobre dernier. Cette PPL n'a donc pas été rédigée sous le coup de l'émotion.

Elle renvoie à plusieurs enjeux : la prévention des actes terroristes, la lutte contre les actes de fraude et, plus largement, les actes d'incivilité dans les transports publics.

Nous devons impérativement, et sans plus tarder, nous doter des outils juridiques permettant une véritable action de protection contre les attaques terroristes – la tentative avortée du Thalys cet été a illustré cette impérieuse nécessité.

Il nous faut aussi réduire la fraude, premier facteur d'insécurité au quotidien dans les transports. Je rappelle que, chaque jour, 10 millions de Français sont usagers des transports publics de voyageurs. Un exemple édifiant : la moitié des agressions dont sont victimes les contrôleurs sont le fait de fraudeurs. Oui, la fraude génère un sentiment d'impunité qui se traduit également en termes d'incivilités et d'actes de dégradation ou de vandalisme dont pâtissent les usagers. Elle représente aussi un manque à gagner pour les sociétés de transport et les AOT, que l'on ne peut plus ignorer dès lors que l'on ambitionne sérieusement l'ensemble des investissements nécessaires à la mise en sécurité des lieux et véhicules de transports publics, tel que les portiques de sécurité, et à la formation du personnel.

Faire des transports publics de voyageurs un lieu plus sûr, quelle que soit la menace, pour nos concitoyens, usagers quotidiens ou occasionnels, pour le personnel, mais aussi pour ceux qui visitent notre pays, voilà l'objectif simple et impérieux de cette PPL.

Ainsi, les prérogatives des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP, les seuls dont les pouvoirs sont spécifiquement codifiés et dont l'expérience est depuis plusieurs décennies reconnue de tous, vont être étendues à la fouille, à l'inspection visuelle de bagages, aux palpations de sécurité, aux patrouilles en civil. Ces mesures, prévues pour des situations exceptionnelles et encadrées, devront conditionner l'accès aux véhicules de transport le cas échéant.

Concernant la lutte contre la fraude, qui a aujourd'hui pris des dimensions insupportables, non seulement économiquement pour les transporteurs, mais surtout pour les passagers et les personnels, la PPL instaure des dispositifs permettant d'améliorer significativement le taux de recouvrement des amendes, qui aujourd'hui ne dépasse pas les 10 % à la SNCF et 14 % à la RATP. L'article 9 sur le droit de communication permettra d'accéder aux coordonnées certifiées des fraudeurs. L'article 8 modifie les caractéristiques du délit d'habitude.

Bien entendu, les articles de cette PPL appellent plusieurs enrichissements. Le groupe socialiste, républicain et citoyen en portera, notamment pour étendre certaines prérogatives inscrites à l'article 1er aux contrôleurs de tous les transports publics de voyageurs sur le territoire. La sécurité ne concerne pas que l'Ile-de-France ; l'ensemble des réseaux qui maille le pays sont des cibles potentielles. Pour les petits transporteurs, les petites AOT, le premier relais de sécurité dans les véhicules, ce sont les contrôleurs, auxquels nous proposerons d'étendre la possibilité d'effectuer des inspections visuelles de bagages.

Enfin, le groupe SRC portera une série d'amendements permettant d'enrichir la PPL d'un titre supplémentaire relatif à la lutte contre les violences et les harcèlements sexistes dont sont victimes les femmes dans les transports. La statistique « 100 % de femmes ont été victimes de harcèlement dans les transports » a été avancée par le Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes. Même s'il est difficile de vérifier scientifiquement ce chiffre, il a le mérite d'attester l'importance du phénomène et l'absence de prise de conscience collective. Nous entendons y mettre un terme.

Lundi 9 novembre, Mme Pascale Boistard et M. Alain Vidalies ont lancé une campagne nationale de sensibilisation. Elle doit permettre d'alerter chacun sur cette réalité qui touche la moitié des usagers des transports. Nous avons souhaité l'accompagner sur le plan législatif. Je vous proposerai que la formation des agents de sécurité interne de la SNCF et de la RATP intègre ces violences spécifiques qui appellent des réponses particulières. Je proposerai également, au nom de mon groupe, que soit précisée la responsabilité des AOT dans la lutte contre ces actes, pour qu'ils rendent compte annuellement de leurs actions en la matière.

Lutte contre le terrorisme, lutte contre la fraude, lutte contre les violences sexistes : les atteintes à la sécurité des voyageurs sont multiples. Nous y répondons sereinement et efficacement avec cette proposition de loi.

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