Intervention de Éric Woerth

Séance en hémicycle du 18 décembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth :

…et l'on aurait bien vu quel était l'objectif poursuivi.

Le crédit d'impôt compétitivité est en réalité une niche fiscale ; il est donc appelé au même avenir que les niches fiscales, avec l'incertitude que cela comporte. C'est aussi, d'une certaine façon, comme cela a été dit, remettre dans la poche des entreprises ce que vous avez pris dans l'autre poche : 20 milliards pour 20 milliards. Vous avez le goût des chiffres ronds ! (Sourires.) Par le biais des mesures fiscales prises depuis juillet, 20 milliards ont été pris aux entreprises, et aujourd'hui 20 milliards sont remis dans la machine de la compétitivité par le biais de ce crédit d'impôt. Ce n'est guère la meilleure façon de procéder !

Lors des débats, de nombreux députés de la majorité ont essayé de limiter ce crédit d'impôt, d'empêcher qu'il fonctionne pour des entreprises qui ne maîtriseraient pas leurs coûts énergétiques, qui licencieraient, qui distribueraient plus d'argent à leurs actionnaires, bref, d'introduire toute une série de conditions. Vous n'avez pas retenu toutes ces conditions, vous avez essayé de tenir bon, mais vous en avez accepté quand même quelques-unes, notamment – je vois bien que c'est un point qui nous oppose – celle qui concerne la distribution de dividendes. Il ne faut pas que le crédit d'impôt profite aux actionnaires. Comme si l'actionnaire était le diable ! Ce n'est pas le cas : il y a probablement de mauvais actionnaires, comme il y a de mauvais employeurs et de mauvais salariés, mais l'entreprise a besoin de capital. Quand une entreprise a sous-rémunéré ses actionnaires pendant un certain nombre d'années, ce peut être une bonne idée de mieux les rémunérer, pour consolider et développer son capital. On ne peut à la fois dire que les entreprises françaises, notamment les PME, n'ont pas suffisamment de capital, et prévoir une condition de non-rémunération de l'actionnaire pour ce crédit d'impôt.

Il faut de la souplesse. Un certain contrôle est certes nécessaire, mais en Allemagne, où le coût du travail est moins élevé qu'en France, on ne contrôle pas ce que font les entreprises. Ce qui est artificiel, c'est en réalité la fiscalité, non la liberté d'entreprendre.

Enfin, vous recréez la TVA sociale. C'est d'ailleurs la seule occasion où vous n'acceptez pas que le mot « social » soit adjoint à un autre mot. Certes, cette recréation est plus modeste que ce que nous avions prévu et sur quoi vous êtes revenus au mois de juillet. Nous avons, dans nos débats, suivi le rapporteur général : nous étions d'accord pour ne pas engager dès maintenant un énorme débat sur les taux de TVA et pour attendre un peu, mais porter de 7 à 10 % le taux réduit, c'est beaucoup, et cela touchera beaucoup de nos concitoyens dans leur consommation quotidienne.

Enfin, vous n'avez jamais répondu à la question du coût pour les entreprises. Vous nous dites qu'il n'y a pas de décalage, que ce crédit d'impôt est une créance sur l'État, qu'il pourra être mobilisé très rapidement. Cette mobilisation, de qui dépendra-t-elle ? Des banques ? D'OSEO ? Je ne sais pas, mais elle aura forcément un coût. De combien est-il ? Vous n'avez jamais répondu.

Pour toutes ces raisons, et pour bien d'autres encore que je ne peux exposer en cinq minutes, nous ne voterons pas ce PLFR.

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