Intervention de Christophe Rémy

Réunion du 19 décembre 2012 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Christophe Rémy, président du conseil d'administration de LH Aviation et directeur associé de Magellan Industries :

Le Pacte défense PME comprend beaucoup de choses intéressantes mais je propose six idées plus concrètes pour aller plus loin.

La première serait de créer un RAPID d'acquisition qui permette aux forces françaises de tester rapidement un nouveau produit et de l'acquérir, s'il est meilleur et moins coûteux que le matériel en service.

La deuxième consisterait à réserver une place obligatoire aux PME dans les appels d'offres.

En référence à la proposition 25 du Pacte défense PME, notre troisième suggestion tend à protéger les marges des petites et moyennes entreprises dans le cadre des appels d'offres. Lorsqu'on passe un appel d'offres dans le secteur privé, l'on exige souvent la transparence des coûts, les candidats devant détailler leurs structures de coût pour justifier la formation du prix qu'ils proposent. Si on le faisait plus systématiquement, lorsqu'une PME participe à un appel d'offres, il pourrait être décidé que la marge de la PME soit supérieure en proportion à celle du grand groupe. Cela serait logique, dans la mesure où la taille du grand groupe lui permet d'accepter des marges inférieures grâce aux économies d'échelle qu'il peut réaliser. Imposer à une PME les mêmes marges qu'à un grand groupe revient à l'asphyxier. Si l'État décidait de protéger la marge des PME, celles-ci pourraient s'autofinancer sans qu'il soit besoin de demander des aides d'État.

Ma quatrième proposition vise à faciliter l'accès des PME à tous les bancs de tests industriels. Actuellement, il est impossible à LH Aviation de faire tester la trace radar ou la signature infrarouge d'Ellipse. Cela coûte des fortunes et il n'y a jamais de places disponibles. Cela nous handicape tout particulièrement à l'exportation où nos clients potentiels doivent se baser sur nos calculs ou sur des démonstrations en vol, ce qui est tout de même moins professionnel que de disposer d'études ou de tests officiels.

Mon avant-dernière idée se fonde sur la proposition 14 du Pacte défense PME, par laquelle le ministre demande que les ingénieurs de l'armement soient délégués dans les PME. Pour aller plus loin, je propose que tous les membres de la DGA accomplissent une sorte de service national de six mois dans les PME de la défense. Lorsqu'ils quittent la DGA, les ingénieurs de l'armement sont embauchés par les grands groupes et ne connaissent donc jamais les PME. J'ai audité récemment une société susceptible de remporter un marché de 750 000 euros pour moderniser des hélicoptères Gazelle. Méconnaissant les PME, le responsable du dossier à la DGA a hésité à faire confiance à cette entreprise. Il s'est adressé à une société d'hélicoptère bien plus importante mais qui ne possédait pas ce savoir-faire de modification. Cette grande entreprise a alors sous-traité à la PME le marché mais en augmentant le prix à 5 millions d'euros, alors même, je le rappelle, qu'elle achetait la prestation à la PME pour 750 000 euros. Je cherche encore la valeur ajoutée de l'opération. Est-ce la meilleure manière de dépenser l'argent public ?

Enfin, il faut prendre en considération que toutes les armées du monde ne présentent pas le même degré de maturité technologique. Dès lors, un produit qui n'intéresse pas directement l'armée française parce qu'il ne semble pas assez avancé peut être recherché ailleurs et il n'y a aucune raison de ne pas aider la PME qui le produit à l'exporter.

S'agissant de la différence entre un fonds d'investissement tel que le nôtre et les dispositifs d'État comme la nouvelle banque publique d'investissement (BPI), je considère pour ma part que les deux systèmes sont complémentaires. La différence, c'est que nous venons du milieu de l'entreprise. Nous n'apportons pas que de l'argent mais aussi un savoir-faire et des transferts de compétences, notamment pour aider les sociétés à exporter et à améliorer leurs chaînes de production. Aussi brillants soient-ils, des fonctionnaires n'ont pas cette connaissance concrète des PME françaises.

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