Intervention de Brigitte Allain

Réunion du 28 octobre 2015 à 21h10
Commission élargie : finances - affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

L'année 2015 était celle de la passation des fonds FEADER aux régions ; 2016 sera marquée par les mesures dites en faveur de l'élevage. Je prends cette précaution, car il me semble que cette aide exceptionnelle n'est pas suffisamment bien orientée, comme je l'ai déjà souligné à plusieurs reprises depuis cet été.

S'il est nécessaire de soutenir les éleveurs en difficulté, il n'est pas justifiable de maintenir sous perfusion des modèles agricoles de plus en plus coûteux pour le contribuable et le consommateur, et dont la compétitivité est en échec.

Alors que la France bénéficie de 9 milliards d'euros par an de subventions de la PAC, elle promet donc 3 milliards d'euros supplémentaires sur trois ans au seul secteur de l'élevage, sans aucune condition de réorientation.

Je souhaite vous interroger sur le plan de soutien à l'élevage. Ma première question est très pragmatique : comment financez-vous ces 3 milliards d'euros ? La deuxième est plus politique : comment ces aides permettront-elles une réorientation durable des activités d'élevages ? Pour l'exprimer de manière plus concrète : quel accompagnement est prévu pour encourager les agriculteurs à s'engager dans des systèmes plus autonomes, garants d'une plus grande valeur ajoutée ? Pouvez-vous nous dire clairement comment seront distribués les soutiens du programme d'investissement d'avenir pour la modernisation des outils d'abattage et de découpe ?

Dans la lignée de mon rapport sur les circuits courts et les filières agroalimentaires, j'ai fait plusieurs propositions qui relevaient du projet de loi de finances. Je regrette qu'elles n'aient pas été soutenues par la majorité gouvernementale, malgré un bon écho en commission. Je proposais des taux réduits de TVA pour les produits alimentaires biologiques dans la restauration commerciale et un crédit d'impôt pour les abattoirs investissant dans une diversification de leurs activités.

Afin d'engager la transition sur les territoires, il me paraît également essentiel de soutenir les communes et les cantines qui mettent en place un plan alimentaire d'établissement valorisant les produits locaux et de qualité. Il faudrait créer une prime à la conversion pour les restaurants collectifs publics et privés – que seul le Gouvernement peut proposer – et mettre en place une modulation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour les collectivités qui s'engagent dans cette démarche. Je déposerai un amendement en ce sens. Les collectivités ont besoin que nous leur adressions un signe fort d'encouragement.

Concernant la sécurité et la qualité sanitaire de l'alimentation, je m'en remets aux propos de mon collègue Éric Alauzet, rapporteur sur ce programme. Je reste cependant convaincue que cette mission doit être dotée de moyens importants afin de garantir la sécurité sanitaire de nos aliments. D'une part, les filières longues et les intermédiaires multiples augmentent les risques de fraude et de contamination, et nécessitent donc un nombre croissant de contrôles. D'autre part, les nouvelles responsabilités de l'ANSES en matière de contrôle des produits pesticides et biocides impliquent une augmentation de ses personnels. Ceux-ci vont d'ailleurs être fortement mobilisés dans le cadre de la gestion des problèmes sanitaires concernant la FCO et la bactérie Xylella Fastidiosa.

En 2016, nous verserons pour la dernière fois des subventions aux industries productrices d'agrocarburants de première génération : une déduction fiscale de 40 millions d'euros, après celles de 120 millions d'euros et de 280 millions d'euros accordées en 2015 et en 2013. C'est encore une année de trop pour une source d'énergie qui détourne la vocation alimentaire des terres, et présente un bilan carbone finalement supérieur aux carburants fossiles qu'elle remplace.

Pour conclure, je vous fais part d'une inquiétude que je relaierai par un amendement en séance. Avec la réforme territoriale, les réseaux de développement de l'agroécologie, appelés organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), déjà peu soutenus, vont connaître une baisse importante de leurs financements assurés par les départements. Ces crédits sont pourtant nécessaires à l'accompagnement des agriculteurs qui souhaitent changer de pratiques, et notamment les nouveaux convertis en bio, nombreux en grande culture cette année. La bonne réalisation du plan bio et la diffusion d'une agriculture économique et environnementale performante dépendront des moyens humains qui seront consacrés à l'accompagnement des agriculteurs dans la réussite. Ces derniers ont besoin de soutien dans cette démarche salutaire pour nous tous.

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