Intervention de François Pupponi

Séance en hémicycle du 13 octobre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2016 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Pupponi, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, pour la seconde année consécutive, la commission des affaires économiques s’est saisie pour avis de la première partie du projet de loi de finances consacrée aux impôts et autres recettes de l’État. L’année dernière, cette saisine s’était montrée utile puisque trois amendements proposés par notre commission avaient été adoptés par l’Assemblée.

Cette année, notre commission s’est félicitée d’un budget qui est bon pour nos entreprises et bon pour notre économie. Dans un contexte budgétaire pourtant très contraint, ce projet de loi de finances comporte en effet un certain nombre de dispositions fiscales qui sont de nature à dynamiser la reprise de notre économie. Nous nous réjouissons en particulier des mesures de limitation des effets de seuils dans les TPE et les PME, prévues à l’article 4, et de la prorogation du dispositif d’amortissement accéléré des investissements robotiques consenti au bénéfice des PME, prévue à l’article 6.

Ces deux mesures sont des applications du vaste plan en faveur des TPE et PME, annoncé par le Gouvernement le 9 juin dernier. Ces entreprises, rappelons-le, emploient la moitié des salariés en France.

La commission des affaires économiques s’est également félicitée des exonérations pour les activités pionnières de méthanisation agricole, prévues à l’article 7, et de la préservation des ressources des chambres d’agriculture, prévue à l’article 14, qui constituent les premières applications du plan de soutien aux filières d’élevage annoncé par le Gouvernement en juillet et septembre 2015.

Elle a par ailleurs adopté 21 amendements qui, pour la première fois, ont ensuite été examinés par la commission compétente au fond : la commission des finances. Je tiens d’ailleurs à remercier son président, M. Gilles Carrez, et Mme la rapporteure générale, Valérie Rabault, pour leur accueil chaleureux. Cet examen fut, je le crois, utile puisque la commission des finances a retenu 11 des 21 amendements proposés.

La majorité des amendements proposés par la commission des affaires économiques concernent le logement et la politique de la ville. Ils visent tout d’abord à accompagner la relance de la construction de logements par des incitations fiscales appropriées. Un premier amendement vise à prolonger jusqu’en 2018 l’exonération totale d’imposition des plus-values immobilières réalisées par des particuliers lorsqu’ils cèdent un immeuble bâti ou non bâti à un organisme HLM, à une collectivité territoriale ou à tout autre cessionnaire qui s’engage à y réaliser et achever des logements sociaux dans un délai de quatre ans. Cette disposition prend fin, sauf modification législative, au 31 décembre 2015. Il s’agit d’une incitation importante à la libération de foncier constructible et d’immeubles en faveur de la production de logements sociaux, qui ne coûte que 10 millions d’euros par an aux finances publiques.

Dans le même esprit, la commission des affaires économiques a proposé de prolonger l’abattement exceptionnel sur l’imposition des plus-values immobilières de cessions de terrains à bâtir, créé par la loi de finances pour 2015 et qui prend fin, sauf modification législative, à la fin de l’année. Afin d’amplifier son effet déclencheur sur la libération du foncier, il est par ailleurs proposé d’accompagner cette prolongation d’une hausse du taux de l’abattement, qui passerait de 50 % la première année à 30 % la deuxième année puis 15 % la troisième année.

Notre commission a ensuite adopté deux amendements de Mme Audrey Linkenheld sur la mobilisation du foncier public. Conformément aux recommandations du rapport de Mme Audrey Linkenheld et M. Jean-Marie Tetart sur la mise en application de la loi du 18 janvier 2013, un amendement élargit la décote consentie en faveur de la production de logements sociaux aux opérations de réhabilitation d’immeubles de l’État qui ne nécessitent pas de démolition reconstruction. De très nombreux biens, comme des anciennes casernes de gendarmerie situées en centre-ville, pourraient ainsi être cédés à moindre coût à des collectivités ou des organismes HLM afin qu’ils les transforment en logements sociaux.

La commission des affaires économiques a ensuite adopté une série d’amendements qui visent à appliquer les conclusions du comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté – CIEC – du 6 mars 2015. Lors de cette réunion, le Premier ministre s’est engagé à favoriser une meilleure répartition du parc social sur les territoires afin de lutter contre la concentration de pauvreté et les phénomènes de ségrégation territoriale. Allant jusqu’à évoquer une politique d’« apartheid », il a annoncé que la construction de logements sociaux serait limitée dans les quartiers où le taux de logement social dépasse 50 % et que, dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain – NPNRU –, l’offre de logements sociaux démolis serait reconstituée en premier lieu en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le Gouvernement a enfin indiqué que le logement intermédiaire et l’accession à la propriété seraient favorisés dans ces quartiers.

La plupart des mesures législatives nécessaires à l’application de ces décisions feront l’objet d’un projet de loi qui devrait être examiné par le Parlement au début de l’année 2016. Des dispositifs fiscaux, qui relèvent de la loi de finances, sont également concernés. C’est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques propose d’ores et déjà trois amendements à ce projet de loi de finances, qui vont dans le sens des conclusions du CIEC.

Le premier concerne le logement intermédiaire. Depuis 2014, la construction de logements intermédiaires par des investisseurs institutionnels bénéficie d’un taux de TVA de 10 %. Le bénéfice de ce taux réduit est conditionné au fait que l’ensemble immobilier construit contienne également 25 % de logements sociaux. Cette règle générale, garantie d’une plus grande mixité sociale, ne doit pas être remise en cause. Cependant, dans les quartiers qui comptent déjà plus de 50 % de logements sociaux, elle est absurde et contre-productive : elle freine la mixité sociale en bloquant la construction de logements intermédiaires dans les quartiers populaires. Un amendement adopté par la commission des affaires économiques a donc pour objet que cette condition ne s’applique pas dans les communes comportant déjà plus de 50 % de logements sociaux ainsi que dans les quartiers qui feront l’objet d’une convention au titre du NPNRU.

L’année dernière, la loi de finances avait encouragé l’accession sociale à la propriété dans les quartiers en élargissant le taux de TVA de 5,5 % appliqué aux seuls quartiers ANRU à l’ensemble des 1 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville. La rédaction de cet article soumettait toutefois le bénéfice de ce taux réduit à la signature du contrat de ville. Or la plupart des contrats de ville n’ont pas été signés avant l’été 2015. On considère qu’environ 3 000 logements en accession sociale à la propriété, dont la demande de permis de construire a été déposée entre le 1er janvier 2015 et la date signature des contrats de ville, ne bénéficieront pas de cet avantage fiscal déterminant pour leur commercialisation. Un deuxième amendement adopté par la commission des affaires économiques, puis par la commission des finances, vise donc à élargir le taux réduit de TVA à toutes les opérations dont la demande de permis de construire a été déposée entre le 1er janvier 2015 et la date de signature du contrat de ville.

Enfin, la commission des affaires économiques a adopté sept amendements relatifs à l’agriculture, dont cinq ont été acceptés par la commission des finances. Traduisant les recommandations des rapports d’information de M. François André sur la fiscalité agricole et de Mme Brigitte Allain sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires, ils visent à donner davantage de liberté à l’exploitant agricole pour réintégrer un revenu exceptionnel sur plusieurs années, à favoriser les regroupements d’agriculteurs au sein des groupements agricoles d’exploitations en commun – GAEC – et à encourager la diversification de leurs activités, notamment à travers l’agritourisme. Ces mesures seraient particulièrement bienvenues dans le contexte de crise de l’élevage que nous connaissons. La commission des affaires économiques vous appelle donc à les adopter.

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