Intervention de Marylise Lebranchu

Réunion du 1er octobre 2015 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la fonction publique :

Mme la rapporteure a souligné que le projet de loi renvoyait trop largement à des ordonnances. Nous avons eu plusieurs échanges sur ce point et le Gouvernement émettra un avis favorable à plusieurs de ses amendements visant à revenir sur ces demandes d'habilitation, tout en respectant l'objectif commun que nous nous sommes fixé : disposer d'un texte concis, précis et lisible.

Mme la rapporteure a par ailleurs salué plusieurs évolutions du texte et je m'en réjouis car son avis est éclairé. Je tiens d'ailleurs ici à la remercier car, grâce au travail aussi intense que précis qu'elle a mené, nous avons pu réécrire certaines dispositions

S'agissant de la Haute Autorité, il est vrai que l'articulation avec la commission de déontologie donne une impression de frottement. Pour ce qui est des transmissions entre les deux instances, nous sommes prêts à accepter des évolutions. Le Gouvernement émettra ainsi un avis favorable à l'amendement, très bien rédigé, de Mme Descamps-Crosnier sur ce sujet.

Nous nous sommes longuement interrogés sur l'opportunité de conserver une commission de déontologie et avons finalement décidé de ne pas la supprimer. Il est important que cette commission joue en amont un rôle de conseil pour les agents eux-mêmes, pour les directeurs de ressources humaines et toute la hiérarchie. J'entends la remarque sur ses moyens. Nous nous sommes engagés à ce qu'elle en dispose. Il m'est apparu en outre, en discutant avec le président de la Haute Autorité, que conserver la commission de déontologie était aussi un moyen de ne pas encombrer cette instance. Elle agira comme un filtre, en amont, pour les dossiers susceptibles d'être soumis ensuite à la Haute Autorité.

Cela dit, nous avons veillé à ce que la commission de déontologie agisse en toute légitimité : composée de personnalités indépendantes, elle émet un avis collégial. Elle jouera un rôle fondamental pour diffuser les règles de bonne conduite à l'intérieur de la fonction publique, qui, rappelons-le, se compose de millions de personnes, réparties sur l'ensemble du territoire. Il est important que cette commission puisse être un relais entre les personnels, les directeurs des ressources humaines, les chefs de service. Son action sera d'autant plus importante que nous entendons renforcer le rôle de ces derniers en matière de prévention des conflits d'intérêts car ce sont eux qui se situent en première ligne. Ils pourront bénéficier de conseils et d'éclairages juridiques pour donner des instructions déontologiques aux agents placés sous leur autorité hiérarchique, mais aussi s'appuyer sur les référents déontologues, dont vous avez salué la création.

Sans doute devrons-nous revenir sur le fonctionnement conjoint de la commission de déontologie et de la Haute Autorité. Nous avons déjà établi une architecture où la haute fonction publique relèvera de la Haute Autorité, notamment pour assurer un lien entre déclarations d'intérêts et déclarations de situation patrimoniale.

Les déclarations d'intérêts concerneront plus particulièrement les agents présentant un risque de conflits d'intérêts du fait de leurs fonctions, qu'elles soient liées aux marchés publics, aux subventions ou aux agréments.

Les déclarations de situation patrimoniale s'appliqueront à un nombre restreint d'agents : il s'agira de ceux qui sont en contact direct avec le monde économique et qui sont susceptibles de quitter la fonction publique pour le secteur privé, ou qui peuvent tirer des bénéfices des relations qu'ils ont nouées.

Si le nombre d'agents concernés par ces deux types de déclaration diffère, c'est que les risques ne sont pas les mêmes. Eu égard au très grand nombre de collectivités territoriales, un marché public peut être entaché d'irrégularités même dans les plus petites d'entre elles. À cet égard, je salue le fait que beaucoup d'élus attentifs à nos travaux nous demandent de multiplier les contrôles sur les marchés publics. Ceux-ci constituent en effet le plus important fait générateur de doutes sur la probité de l'action publique. Et quand existent de tels doutes, il y a déstabilisation de la nation.

Madame la rapporteure, nous donnerons un avis favorable à tous vos amendements de très grande qualité portant sur ce volet.

Vous m'avez demandé ensuite si la protection fonctionnelle était très utilisée. Les chiffres sont en réalité très variables : les magistrats et les policiers demandent certaines années plus que d'autres à bénéficier de cette protection – vous vous souvenez de l'affaire de Cherbourg. En ce qui concerne la fonction publique d'État, j'ai demandé à ce que l'ensemble des secrétaires généraux des ministères soient interrogés à ce propos d'ici à l'examen du texte en séance publique.

Aujourd'hui, cette protection fonctionnelle est insuffisamment encadrée. C'est seulement à la suite d'interventions de parlementaires auprès de ministres ou de responsables d'administration centrale que certains fonctionnaires ont pu en bénéficier ; personne ne leur en avait parlé auparavant. Le projet entraînera certainement une hausse du recours à cette procédure. Cependant, j'estime que les coûts seront à peu près inchangés. Il est de toute façon difficile de disposer de prévisions justes en ce domaine.

Il ne faut pas oublier qu'il y a une forme d'inquiétude chez les fonctionnaires face aux actions engagées à l'encontre de certains d'entre eux, et qui sont relayées par les médias, même si celles-ci ont fort heureusement, dans la plupart des cas, une issue favorable. Ils seront sans doute satisfaits par les nouvelles dispositions que nous proposons.

Vous avez enfin abordé le difficile sujet du point de départ du délai de prescription. Celui-ci requiert, vous avez raison, une approche très fine, et votre amendement me paraît proposer une bonne solution.

Enfin, vous avez insisté pour que le principe de l'exclusion temporaire d'une durée maximale de trois jours s'applique aux trois fonctions publiques. Vos travaux montrent que c'est sans doute, là encore, une bonne solution.

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