Intervention de Véronique Massonneau

Réunion du 30 septembre 2015 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Massonneau :

Notre commission reprend l'examen de cette proposition de loi telle que notre assemblée l'a amendée en première lecture, après son rejet par le Sénat.

Nous avons donc l'occasion d'améliorer ce texte, tout en tirant les leçons des discussions que nous avons déjà eues sur le sujet, que ce soit lors de l'examen de ma proposition de loi qui a fait l'objet d'un débat sans vote dans l'hémicycle en janvier, ou lors de la première lecture du texte qui nous concerne aujourd'hui.

Est-il nécessaire que je vous rappelle mes convictions, chers collègues ? Je pense que chacun doit être libre de disposer de son corps et donc de choisir le moment et la manière de finir sa vie. Je ne me résous pas à l'idée que notre pays n'accorde pas encore cette ultime liberté aux Françaises et aux Français. Cette liberté individuelle, on ne peut pas la balayer d'un revers de main par dogmatisme ou la mettre sous le boisseau de la déontologie médicale.

Cependant, tirant les enseignements de nos débats précédents, je ne vous proposerai pas d'amendement visant à légaliser l'euthanasie. Je n'ai pas changé d'avis mais je souhaite privilégier un débat plus apaisé. Je propose donc à notre commission d'étudier sérieusement, en délaissant les postures et des caricatures qui ont parfois eu cours en première lecture, un amendement qui peut nous rassembler. Je ne défendrai que l'amendement visant à légaliser le suicide assisté, dans le plus clair respect des précautions suggérées par l'avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE).

Le suicide assisté et encadré est une demande clairement exprimée par la conférence de citoyens sur la fin de vie, organisée par le CCNE en décembre 2013. Il ne s'agit pas de permettre à un professionnel de santé de pratiquer le geste létal ou de mettre en doute la décision du patient qui pratique alors lui-même le geste. Il ne s'agit pas non plus d'opposer cette mesure aux soins palliatifs puisque, sur recommandation du CCNE, j'ai prévu de ne permettre cet acte que si et seulement si « un réel accès à toutes les solutions alternatives d'accompagnement et de soulagement de la douleur physique et psychique » peut être proposé au patient.

Cette disposition confrontera notre modèle de santé, et plus largement notre société entière, aux réels besoins de places en soins palliatifs qui font gravement défaut en France. Dès lors, les professionnels de santé ne pourront plus ignorer ces appels au secours de ces malades qui souffrent dans nos hôpitaux et qui demandent à mourir. Ces demandes devront être étudiées, entendues, comprises, discutées avec le personnel soignant et les proches, afin de mettre en oeuvre tout ce qui est possible pour proposer une solution à ces malades.

Il est vrai que certaines demandes résultent du manque de places en soins palliatifs, de notre échec à apporter à ces patients un accompagnement adapté pour que leurs derniers jours soient apaisés et dignes. Mais nous ne pouvons pas nier que des demandes persistent malgré ces soins qui ne peuvent soulager certaines souffrances physiques ou psychiques. Pourquoi devrions-nous refuser d'entendre ces Françaises et ces Français ? Pourquoi devrions-nous leur imposer le « laisser mourir » ? Pourquoi devrions-nous leur refuser de choisir le moment et la manière de partir, s'ils souhaitent le faire entourés de leur proche, à leur domicile ou à l'hôpital ?

En cas d'impasse thérapeutique, le rôle de cette mesure est d'apporter la moins mauvaise solution au patient car il n'en existe jamais de bonne dans ce genre de situation. La moins mauvaise solution ne saurait ignorer le choix du patient comme le fait ce texte.

Mes chers collègues, j'espère sincèrement que nous pourrons débattre sereinement, sans verrouillage de principe, sans posture politicienne ou dogmatique. Plutôt que de rejouer le débat qui a eu lieu lors de la première lecture, nous devons trouver un terrain d'entente. Tel est le sens de ma démarche.

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