Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 16 septembre 2015 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Michel Bouvard :

En ce qui concerne la Cour des comptes, je tiens à rappeler que le projet n'a suscité de sa part qu'un seul référé, daté du 1er août 2012 et que je vous invite tous à relire. La Cour n'a donc pris position qu'une fois, et non deux, contrairement à ce qui a été dit : dans son rapport public thématique, elle se contente de renvoyer à ce référé.

En outre, ses observations doivent être replacées dans le contexte de l'époque : le financement européen n'était pas assuré à hauteur de 40 %, l'Eurovignette n'était pas définie et aucune recette spécifique n'était affectée au projet. La Cour pointe certes des incertitudes quant à l'évolution du trafic, mais ajoute que, dès lors que le projet ne peut être interrompu, il convient de prendre des mesures contraignantes de gestion des trafics et de favoriser l'intermodalité : c'est exactement ce que l'on fait aujourd'hui.

Quant au chiffre souvent cité de 26 milliards d'euros, il ne résulte pas d'un calcul de la Cour des comptes puisque celle-ci l'attribue dans son référé à la direction générale du Trésor dans le cadre d'une « évaluation socio-économique ».

S'agissant du reste à charge pour l'AFITF, l'Agence a jusqu'à présent contribué chaque année au projet, apportant au total un quart des quelque 850 millions d'euros déjà dépensés, conformément à la répartition de la phase d'études entre financement communautaire – à hauteur de 50 %–, français et italien – pour 25 % chacun. Le même mode de financement a d'ailleurs été retenu pour la réalisation de l'ouvrage de Saint-Martin-la-Porte, qui a basculé de la tranche définitive à la tranche actuelle et représente 400 millions d'euros. D'où la différence de coût ; je vous renvoie sur ce point au rapport.

Dans ce contexte, l'AFITF aura évidemment besoin de ressources nouvelles, car les actuelles ne suffisent pas, comme le soulignent ses responsables et tous les élus. Mais la possibilité d'emprunter quelque 1,3 milliard d'euros sur cinquante ans, grâce à un « prêt vert » de la Caisse des dépôts au taux du Livret A plus 0,75 %, devrait permettre de couvrir cette hausse que l'AFITF doit assumer.

Nous ne reproduisons pas l'écotaxe : nous proposons d'adopter le système de l'Eurovignette, selon lequel la recette est affectée à l'ouvrage auquel elle est destinée. Naturellement, il pourra être étendu à d'autres ouvrages. Du point de vue de l'acceptabilité, toutefois, il se distingue nettement de l'écotaxe. En effet, la majoration est bien plus difficile à faire admettre à un transporteur breton auquel l'ouvrage visé ne procurera jamais aucun retour sur investissement qu'à son homologue du massif alpin qui souffre de la congestion et de l'enneigement, qui va gagner trois quarts d'heure de trajet et pourra organiser le temps de repos de ses camionneurs dans le train. Les transporteurs de la région y ont d'ailleurs bien vu leur intérêt.

La question des concessions est indépendante du problème qui nous occupe. Les durées de concession des tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus, et des autoroutes qui leur sont liées, ont été harmonisées pour prendre fin en 2050, à la suite des travaux de sécurisation. Ensuite, l'État peut décider de reconduire la concession ou d'exploiter directement les ouvrages.

Rappelons d'ailleurs que, côté français, les concessionnaires sont des sociétés d'économie mixte dont l'État est l'actionnaire majoritaire – quasi total pour le tunnel du Fréjus et l'autoroute de Maurienne, et à 60 % environ pour le Mont-Blanc, dont les deux autres actionnaires principaux sont le canton et la ville de Genève ainsi que le département de la Haute-Savoie, soit des acteurs publics. Quoi qu'il en soit, la perception des péages est essentielle, car les coûts d'exploitation d'un tunnel routier alpin ne sont pas négligeables. L'idée que les tunnels alpins pourraient être gratuits est une pure fantaisie, que le budget devrait assumer et qui représentera peu ou prou ce qu'il faudrait investir au travers de la recette de l'AFITF !

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