Intervention de Serge Janquin

Séance en hémicycle du 2 juillet 2015 à 15h00
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 36

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Janquin :

Avec votre autorisation, madame la présidente, mon intervention portera tout à la fois sur les articles 36 ter et 36 quater, qui concernent les questions intimement liées des commissions administratives paritaires et des comités techniques paritaires.

Ce sera d’ailleurs aisé, puisque j’ai appris que la commission des lois avait adopté une rédaction tout à fait positive en la matière, qui n’interdit pas mais n’oblige pas davantage. C’est ce que je souhaitais en observant les débats à l’Assemblée et au Sénat : préserver ce qui faisait l’originalité et la force du statut de la fonction publique en général et de la fonction publique territoriale en particulier.

Si j’interviens aujourd’hui, c’est pour appeler l’attention de l’Assemblée et de Mme la ministre sur le climat dans lequel ces dispositions sont mises en oeuvre. J’ai travaillé auprès de Pierre Mauroy, Gaston Defferre et Anicet Le Pors – j’étais jeune à l’époque – à l’élaboration du statut de la fonction publique, particulièrement de celui de la fonction publique territoriale.

Deux règles s’imposaient. Premièrement, c’est aux élus qu’il appartient de gérer les personnels territoriaux. Deuxièmement, cela doit se faire dans le cadre du paritarisme avec les organisations syndicales et leurs représentants.

Il va de soi que ce statut doit évoluer : au bout de trente ans, bien des dispositions sont désuètes et doivent être remplacées ou adaptées. Je souhaite néanmoins que nous restions fermes sur les principes.

Or, madame la ministre, je viens de prendre connaissance du rapport de la Cour des comptes sur la gestion, depuis cinq ans, du Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT. Le président Deluga y est encensé : il aurait fait tout ce qu’il faut pour redresser cet établissement et le mettre en conformité avec les exigences de l’État – soit. Ensuite, il nous est indiqué, souvent sur la base d’interprétations de droit ou de fait erronées, que certains points de détail – trois ou quatre, tout au plus – ne correspondent pas tout à fait à ce qu’il faudrait faire et qu’il convient dès lors de mettre le CNFPT sous la tutelle de l’État. Et la Cour d’ajouter ceci : il faut supprimer le paritarisme.

Voilà donc que la Cour des comptes s’érige en législateur ! De quel droit ? A-t-elle le pouvoir de dire ce que doit être la gestion des collectivités territoriales par l’État ou par les fonctionnaires de l’État ?

Certes, chacun connaît bien l’ambiguïté initiale du dispositif. Pierre Mauroy avait voulu lancer des passerelles entre les trois grandes fonctions publiques ; elles n’ont jamais vraiment fonctionné que dans un sens, les hauts fonctionnaires de l’État partant exercer dans les grandes collectivités, comme DGS, ou dans les grands établissements publics de santé. À l’inverse, j’ai vu peu d’administrateurs territoriaux devenir sous-préfet. Demandons-nous pourquoi !

Dans ces conditions, soyons vigilants et faisons en sorte que les dispositifs naissants autour des intercommunalités ne fassent pas bon marché du paritarisme. Je vous demande, madame la ministre, d’y être extrêmement attentive, car c’est l’une des singularités du dialogue social en France. Ce système garantit à nos fonctionnaires territoriaux – car c’est pour eux que je parle – le droit à l’égalité des chances en matière de promotion.

Dans le cadre de la présente loi, vous avez pris les dispositions qui s’imposaient en permettant de conserver l’existant ou d’évoluer selon le choix des élus. Présentez-en bien les conditions : il faut préserver le paritarisme !

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