Intervention de Philippe Debrosse

Réunion du 23 juin 2015 à 17h45
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Philippe Debrosse, directeur des soutiens et des finances de la direction générale de la Gendarmerie nationale :

À l'heure où la Cour des comptes vient de publier la note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission Sécurités pour 2014, je vous remercie de m'offrir l'occasion de vous présenter le bilan de cet exercice budgétaire pour la Gendarmerie nationale.

Je vais revenir brièvement sur quelques propos que le général Favier a tenus lors de la préparation de la loi de finances pour 2014. En ce qui concerne les effectifs, le général Favier a indiqué qu'un certain nombre de brigades souffraient d'un sous-effectif chronique inhérent au manque de crédits pour rattraper le plafond d'emplois. S'agissant du fonctionnement et des investissements, il a appelé l'attention sur la différence qui existait ponctuellement entre le vote de la loi de finances et la réalisation effective des crédits, compte tenu des mesures d'annulation qui pouvaient intervenir en cours d'exercice. Il a également insisté sur sa volonté de préserver au maximum les dépenses de fonctionnement courant des unités de gendarmerie, ce qui l'avait conduit à sacrifier une partie des crédits destinés aux investissements, sachant que ces crédits pouvaient concerner des véhicules et des ordinateurs, qui sont aujourd'hui les outils de base du gendarme.

Des innovations ont été mises en place au sein du ministère, comme le service de l'achat, des équipements et de la logistique de la sécurité intérieure – SAELSI –, qui est un service d'achat commun à la police, à la gendarmerie et à la sécurité civile. Les secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'Intérieur – SGAMI – ont été mis en place au printemps 2014.

Quel bilan peut-on faire de l'exécution de la gestion 2014 ?

S'agissant du titre 2, la gendarmerie a respecté le schéma d'emplois, voté par le Parlement à l'automne 2013. La création de 162 nouveaux postes a été effective, bien que cela n'apparaisse pas directement à la lecture des documents budgétaires, compte tenu des transferts d'équivalents temps plein – ETP –, en particulier dans le cadre des mutualisations qui ont conduit à des échanges croisés entre programmes du ministère de l'Intérieur ou avec l'administration pénitentiaire, notamment, pour la reprise des transfèrements judiciaires dans certaines régions, qui viennent donc en atténuation des effectifs réalisés pour la gendarmerie.

Le budget initial du titre 2 s'élevait à 6,816 milliards d'euros, dont 34 millions ont été mis en réserve. À cela s'ajoutent 76 millions de crédits divers qui proviennent essentiellement d'attributions de produits, puisque certaines prestations, notamment au profit de la Banque de France ou des centrales nucléaires, font l'objet de remboursements vers le programme 152.

L'objectif initial consistait à consommer l'intégralité des crédits de masse salariale, mais des retards dans la mise en oeuvre de certaines mesures catégorielles ont conduit, en fin d'exercice, à une annulation de 17 millions de crédits, dont 15 au titre du compte d'affectation spéciale – CAS – Pensions. Au total, sur un budget de 6,8 milliards, nous avons été relativement précis en fin de gestion, compte tenu des les aléas qui peuvent intervenir en cours d'année.

La gendarmerie a toujours respecté son plafond de masse salariale en loi de finances initiale.

Le plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées – PAGRE –, qui est le pendant du protocole d'accord sur la réforme des corps et carrières de la police, n'a pas eu un impact budgétaire très significatif. La forte hausse des dépenses de personnels provient principalement de la hausse des cotisations au CAS Pensions : entre 2006 et 2014, le taux de cotisation des militaires est passé de 100 % à 126 %. Par comparaison, le taux de cotisation des personnels civils est de 75 %. Cet écart pourrait donner l'impression qu'un gendarme coûte plus cher qu'un personnel civil. Or, l'évolution du coût moyen par ETP du programme hors CAS Pensions entre 2006 et 2014 s'est établie à seulement 10,2 %. Pendant cette période, l'inflation était de 11,4 %. Hors inflation, le pouvoir d'achat des personnels militaires est donc resté à peu près stable. Compte tenu de l'inflation, il ne coûte pas plus cher aujourd'hui qu'en 2006.

Le « trou à l'emploi » qui résulte du décalage entre le niveau du plafond d'emplois et les ressources budgétaires correspond à un sous-effectif d'environ 2 000 ETP. Une partie des réservistes que nous utilisons permet d'en pallier les conséquences. Toutefois, l'année 2015 a connu une augmentation significative des effectifs dans le cadre du plan de lutte antiterroriste. Et il faut avoir à l'esprit que, depuis 2012, 516 emplois ont été créés dans la gendarmerie.

Enfin, la Cour des comptes évoque un effet d'éviction des dépenses hors titre 2 au profit du titre 2 de la gendarmerie. Je ne partage pas tout à fait cette analyse, notamment parce que, en construction budgétaire, les dépenses de titre 2 sont examinées séparément des dépenses de titre 3 (fonctionnement) et de titre 5 (investissement). Pour qu'il y ait une véritable corrélation entre les titres, il faudrait pouvoir transférer des dépenses de titre 2 vers les dépenses de titre 3 et 5. Cela sous-entendrait une réduction des effectifs du programme Gendarmerie nationale. Comme nous avons déjà un déficit de 2 000 personnes, je vous laisse apprécier les conséquences d'une telle décision.

En 2006, les dépenses de pensions représentaient 2,347 milliards d'euros, contre 3,132 milliards en 2014. Les cotisations au CAS Pensions du programme Gendarmerie ont progressé de 785 millions d'euros sur cette période. Ce ne sont pas des dépenses directes du programme, mais une contribution à la charge générale des pensions servies par l'État, qui ont progressé d'une dizaine de milliards d'euros sur l'année. Il est normal que le programme y contribue, mais il n'y a pas de lien direct entre la rémunération des gendarmes, l'évolution de la pension qu'ils toucheront et le coût réel immédiat pour la collectivité.

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