Intervention de Razzy Hammadi

Séance en hémicycle du 10 juin 2015 à 15h00
Action de groupe en matière de discrimination et de lutte contre les inégalités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRazzy Hammadi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Je m’exprimerai brièvement, car nous aurons l’occasion lors de l’examen des articles de revenir sur les sujets qui ont été évoqués. Précisons d’emblée le cadre du débat. Contrairement à ce que j’ai pu entendre à droite et dans la bouche de M. Collard, qui n’est malheureusement plus là – sans doute y avait-il une part publicitaire dans sa démarche –, cette proposition de loi n’est pas l’affaire de communautés.

Le code pénal de la République prévoit vingt motifs de discrimination. Sont concernés les enfants en situation de handicap qui ne peuvent être scolarisés dans l’école de la République, alors que l’obligation de scolarisation est faite à la puissance publique, ou les femmes qui sont moins bien payées que leurs collègues hommes, à formation et à compétence égales. Tous sont placés dans des situations similaires ou identiques, au même titre que des personnes d’origine maghrébine ou subsaharienne.

Il ne devrait d’ailleurs pas être difficile à M. Collard de voir ce qui place deux personnes d’origine maghrébine ou subsaharienne dans une situation similaire ou identique ! Il n’est pas étonnant que M. Collard, dont on connaît le niveau d’obsession à l’égard de certaines catégories de la population, ne puisse soutenir un tel texte, lui qui n’a de cesse de vouloir distinguer les Français de souche et ceux qui ne le seraient pas – ces derniers étant susceptibles de se voir déchus de leur nationalité.

Monsieur Gosselin, l’action collective existe aujourd’hui : des procédures, des actions de substitution, des procédures collectives existent d’ores et déjà. Le motif de votre opposition au texte perd donc de sa légitimité. Mais si ces actions existent, elles mettent parfois douze ans à aboutir et les réparations sont incomplètes. Je salue ici M. Clerc, de la CGT, qui, par un travail de plus de dix ans, a réussi à faire valider par les juridictions la reconstitution de carrière, pour parvenir à une réparation intégrale du préjudice – un principe fondamental du droit de la République.

Je ne reviendrai pas sur le caractère anglo-saxon que certains prêtent à ce dispositif : M. le ministre répondra mieux que moi.

Concernant l’administration de la preuve, question soulevée à droite de l’hémicycle et par M. Collard, nous sommes dans ce que l’on appelle le régime du partage de la charge de la preuve. Ainsi, toute personne s’estimant victime de discrimination peut saisir une association ou un syndicat, qui pose les faits sur la table du juge, lequel définit les critères de rattachement au groupe. Il revient à la personne morale ou physique accusée de discrimination de démontrer qu’il n’y a pas eu discrimination. Ensuite, les personnes peuvent adhérer au groupe.

N’oublions pas que plus d’une victime de discrimination sur deux n’entame pas de procédure judiciaire ! Afficher des droits qui, dans la vraie vie, ne sont pas effectifs, c’est cela qui provoque le communautarisme !

M. Hanotin aurait souhaité voir le Défenseur des droits figurer à l’article 1er. Mais le Défenseur des droits ayant été créé par une loi organique, toute modification de sa fonction doit faire l’objet d’une loi organique. Or nous sommes dans le cadre d’une loi ordinaire. Par ailleurs, Jacques Toubon, que nous avons auditionné, ne l’a pas souhaité. Je vous renvoie à l’avis du Défenseur des droits, rendu public le 2 juin, qui montre à quel point nous avons travaillé avec les syndicats, les chercheurs et les associations.

Des interrogations se sont fait entendre sur la question des filtres et le rôle des associations et des syndicats. Je vous le dis, et ne le redirai plus dans le débat : je suis, à titre personnel, pour l’absence de ces filtres dans le domaine des discriminations. Ce n’est pas la position de la commission.

Nous attendons le rapport sur l’action de groupe dans le cadre de la loi sur la consommation. Elle fonctionne très bien, si l’on se réfère aux multiples saisines qui ont eu lieu. Il n’en demeure pas moins que sur certains territoires, j’ai vu des groupes d’habitants qui ne trouvaient pas d’association agréée pour les représenter, celle de leur territoire ayant refusé d’aller contre les intérêts de la collectivité ou ceux du bailleur incriminé. Cela arrive. À ce stade de la discussion, je m’en tiendrai là.

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