Intervention de Edouard Philippe

Réunion du 3 juin 2015 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEdouard Philippe :

Un certain nombre d'inquiétudes ont été évoquées, qu'elles soient environnementales ou financières, sur lesquelles je ne reviendrai pas.

Je partage volontiers l'objectif de ceux qui militent en faveur de la construction de ce canal lorsqu'ils disent qu'il faut favoriser le report modal et passer du camion individuel à la barge massifiée dont on ne peut contester les effets vertueux sur le plan de l'environnement, mais également sur celui de la compétitivité lorsqu'on se place, non pas à 200 ou 300 kilomètres du port, mais à 500 ou 600 kilomètres. Le « massifié » est une exigence économique, je n'en disconviens pas.

Cela étant, je partage certaines remarques formulées, notamment, par notre collègue Leroy, sur l'absence de politique portuaire et sur l'inquiétude considérable des acteurs portuaires français, au Havre, mais également à Rouen. Le système portuaire havro-rouennais est le premier système portuaire de France. Sur les 2,5 millions de conteneurs qui passent par Le Havre, dont 85 % voyagent sur des camions, 10 % seulement par le fleuve et 5 % par le fer.

Il faut être conscient que, lorsque le canal fonctionnera, son effet aspirateur pour les bateaux qui débarqueront leurs marchandises plus volontiers à Anvers et à Rotterdam qu'au Havre sera considérable. Et pour une raison très simple : si nous voulons faire du massifié par voie d'eau en partant de la Normandie, au sens large, vers l'Escaut et la Ruhr, il existe déjà une voie d'eau, extrêmement efficace, sur laquelle il y a un transport massifié remarquablement opératoire : c'est la Manche… Un canal parallèle à la Manche, c'est un désastre pour le port du Havre : les bateaux continueront leur route et iront encore plus volontiers à Anvers et Rotterdam s'il s'agit de trouver là-bas le terrain de jeux dont ils ont besoin pour se développer.

Les inquiétudes normandes sont réelles. Ne les écartons pas d'un revers de la main au prétexte que ce seraient les Normands contre les Picards ou contre les Nordistes. Ils sont amis des uns comme des autres. Ce n'est ni le cas ni le sujet. Le sujet, c'est savoir comment faire pour que la politique portuaire française ne souffre pas dans son fonctionnement, dans son développement industriel, des effets d'un canal dont je comprends parfaitement qu'on veuille le construire, mais qui aura un effet potentiellement dévastateur sur la place portuaire normande.

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