Intervention de Éric Alauzet

Séance en hémicycle du 6 mai 2015 à 15h00
Débat sur le projet économique et social européen de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les secrétaires d’État, chers collègues, permettez-moi d’élargir quelque peu le débat en évoquant quelques points précis qui, pour les écologistes, constituent des éléments de progrès possibles voire indispensables pour la politique européenne.

La globalisation et les flux quelle génère à travers la planète, qu’il s’agisse des flux de personnes, de biens, de matières premières ou des flux financiers et commerciaux, provoquent un certain nombre d’effets pervers, du moins-disant social aux bulles spéculatives en passant par le changement climatique, les fraudes, l’évasion fiscale et les trafics en tout genre.

Évidemment, seul l’échelon européen peut relever les défis qui se posent et répondre à de tels risques.

Je souhaite évoquer quatre sujets précis, dont nous avons d’ailleurs déjà discuté.

Le premier concerne la légitimité démocratique de l’Europe.

La transparence des décisions européennes doit être renforcée. En effet, l’Europe est, notamment en France, encore trop souvent montrée du doigt par les différents gouvernements qui se sont succédé ou les partis politiques, lesquels cachent ainsi leurs propres turpitudes : elle serait responsable de tous les maux.

Nous devons donc agir pour renforcer le lien entre l’Europe et ses citoyens. Un projet économique et social partagé au niveau européen ne peut se faire qu’avec leur soutien. Ce rapprochement passe notamment par un discours de vérité, un même discours à Paris et à Bruxelles – la vérité des comptes et des chiffres que nous donnons aujourd’hui y contribue d’ailleurs même s’il s’agit là d’un élément parmi d’autres.

Le deuxième point porte sur la question centrale des déficits.

Les pays européens ont tardé à traiter cette question espérant pendant trente-cinq ans que les politiques de relance par la consommation ou par l’investissement permettraient aux recettes de compenser les dépenses.

Ainsi, le recours à l’emprunt est-il devenu la norme, les dettes publique et privée ont-elles gonflé au point de créer la crise de 2008.

Alors, les États ont fini par s’imposer ensemble un remède de cheval en concentrant le traitement sur la baisse de la dépense publique, ce qui constituait sans doute le moyen le plus rapide d’équilibrer les budgets. Eh oui, plus on tarde à agir, plus il y a urgence !

Malheureusement, chacun le constate aujourd’hui, le remède a été trop violent, notamment pour certains pays du sud de l’Europe.

Alors, s’il faut rester ferme quant à cet objectif de réduction des déficits, l’Union européenne doit maintenant utiliser d’autres moyens complémentaires à la baisse des dépenses pour parvenir à l’équilibre des comptes.

Elle doit assurer les recettes fiscales de ses membres en se dotant particulièrement d’une trajectoire d’extinction de l’évasion et de la fraude fiscales. C’est cette trajectoire qui donnera du crédit à l’autre trajectoire, officielle, de résorption des déficits en la rendant possible.

La France doit donc peser de tout son poids pour que le programme BEPS, Base Erosion and Profit Shifting, soit mis en oeuvre rapidement – je sais que vous êtes engagés dans cette voie, messieurs les ministres – afin de garantir à chaque pays une assiette fiscale stable, réaliste, qui corresponde à la réalité des activités économiques qui s’y déroulent.

C’est bien parce qu’il existe une certaine inertie dans la mise en place de cette politique, à la production de recettes, qu’il est extrêmement urgent d’agir.

Troisième point : la nécessité de soutenir les investissements tout en se gardant bien de les considérer comme la solution miracle à l’ensemble de nos problèmes. Un temps, on a entendu : « l’Europe, l’Europe, l’Europe ! » ; il ne s’agit pas maintenant de dire : « Investissements, investissements, investissements ! ». Ils sont certes importants, mais à la place qui est la leur.

Le plan d’investissement Juncker, en complément du Plan d’investissements d’avenir, le PIA, est une bonne nouvelle pour nos économies mais son impact dépend de la nature des investissements : tous n’ont pas le même contenu en termes d’emploi, de développement du territoire ou de carbone.

Il est crucial que les États européens convergent sur les critères de choix.

Alors que la France accueillera dans quelques mois la COP 21, la Conférence de Paris sur le climat, les écologistes – mon propos ne vous surprendra pas – espèrent que celle-ci saura défendre vaillamment la nécessité de financer par ce plan des projets concernant l’efficacité énergétique.

Si nous ne nous engageons pas pleinement dans cette voie, non seulement nous ne pourrons pas répondre à la crise climatique mais nous manquerons aussi l’occasion de développer enfin la politique européenne de l’énergie dont nous avons ardemment besoin et de préparer notre compétitivité de demain.

Enfin, je souhaite insister sur un aspect particulier : il est important que ces fonds soient attribués au niveau régional à travers par exemple des fonds de fonds, car seul cet échelon garantira le financement de projets à taille humaine et servant réellement leur territoire.

Le quatrième et dernier point de cette politique économique européenne concerne un problème auquel l’ensemble de nos pays sont confrontés : le chômage des jeunes.

Au deuxième trimestre 2014, plus de cinq millions de jeunes de moins de 25 ans étaient sans emploi au sein de l’Union européenne.

L’emploi est notre obsession, comme le montre notre engagement à développer l’apprentissage ou les contrats d’avenir.

L’Europe s’est quant à elle aussi engagée pour l’emploi des jeunes grâce à l’initiative « emploi des jeunes ».

Nous devons tout faire pour que ces initiatives perdurent et s’amplifient.

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