Intervention de Jean-Noël Jeanneney

Réunion du 17 avril 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Jean-Noël Jeanneney :

Messieurs les présidents, mesdames, messieurs, je pensais en venant ici à Marc Bloch, qui raillait ceux qui voulaient « épargner à la chaste Clio de trop brûlants contacts ». Pour ma part, j'estime que nous devons favoriser ces contacts et répondre aux interrogations actuelles de nos concitoyens sur leurs institutions.

Comme on le disait il y a quelques décennies, je vous dois d'abord de marquer « d'où je parle ». Comme l'a indiqué M. le président, j'ai entretenu dès avant ma naissance, de par mon appartenance à une certaine dynastie – rassurez-vous, je n'y vois aucun mérite, tout au plus un hasard et un privilège – un commerce particulier avec la seconde chambre – ou la Haute Assemblée, comme on préfère dire au palais du Luxembourg. En effet, mon grand-père Jules Jeanneney a été sénateur de 1909 à 1942 ; il avait d'abord été député, mais a de loin préféré le Sénat, qu'il a présidé durant une dizaine d'années, disant même, à propos de la Chambre des députés : « Je n'aime pas le beuglant » – ce qui, j'en conviens, était tout à fait injuste. En 1944, devenu ministre d'État du général de Gaulle, il a déçu nombre de ses collègues sénateurs en ne prenant pas la défense de l'idée d'un maintien du Sénat tel qu'il était sous la IIIe République, mais en se ralliant au contraire, à la suite de réflexions qu'il avait développées durant la guerre, à l'idée qu'il devait y avoir une prévalence de l'Assemblée sur le Sénat en matière législative.

Quant à mon père, Jean-Marcel Jeanneney, il a été chargé en 1969 d'élaborer et de porter le référendum malheureux qui a provoqué le départ du général de Gaulle. J'espère que vous me ferez l'amitié de croire que je suis capable de surmonter la prégnance de cet héritage, et c'est bien en historien que je suis venu vous parler, afin que Clio, renonçant à être tout à fait chaste, consente à éclairer un peu Marianne.

Michel Winock a évoqué la résistance du monocamérisme dans notre pays, et la longue durée des débats ayant précédé la mise en oeuvre du bicamérisme. Il a mis en lumière d'une part le fait que le bicamérisme est la règle et que le monocamérisme a été l'exception, d'autre part l'idée que la double fonction du Parlement – élaboration de la loi et contrôle de l'exécutif – est mieux servie par deux chambres que par une seule.

De décennie en décennie et de siècle en siècle, les partisans du bicamérisme se sont appuyés sur trois motivations principales. Je vais les citer, avant d'examiner avec vous comment elles peuvent s'appliquer à notre contemporanéité et quelles conséquences elles peuvent avoir sur les réponses aux interrogations que vous avez formulées, messieurs les présidents. Ces trois motivations sont l'équilibre des pouvoirs, nécessaire pour se protéger de tout débordement ; la nécessité d'une diversité temporelle dans la fidélité au mouvement de l'opinion publique ; enfin, l'idée de représentation des diversités structurelles de la nation, à côté de l'ensemble un peu abstrait que la première chambre est chargée de refléter.

Pour ce qui est de l'équilibre des pouvoirs, on peut considérer que Montesquieu l'a emporté sur Jean-Jacques Rousseau. L'auteur de L'Esprit des lois disait en effet que la puissance législative devait être « confiée, et au corps des nobles, et au corps qui sera choisi pour représenter le peuple, qui auront chacun leurs assemblées et leurs délibérations à part, et des vues et des intérêts séparés ». La Convention a été le grand moment du monocamérisme puisque, en 1848, elle a signifié très clairement la volonté que l'opinion publique se trouve reflétée dans les institutions, allant presque jusqu'à l'esquisse de l'idée d'un mandat impératif, au nom d'une théorie de la volonté générale. La grandeur de la Convention doit être saluée, nonobstant certaines analyses moroses dont elle fait aujourd'hui l'objet. Michelet disait d'elle qu'elle était « celle qui avait trouvé l'arbitraire dans le monde et qui commença le droit ». Clemenceau cite d'ailleurs Michelet quand il attaque le Sénat en 1884. Avant cela, en 1795, le rapporteur de la commission constitutionnelle, Boissy d'Anglas, déclarait, pour justifier que le Directoire eût deux chambres : « Il faut opposer une digue puissante à l'impétuosité du corps législatif. Cette digue, c'est la division en deux Assemblées. »

La deuxième motivation du bicamérisme réside dans la nécessité de lisser la courbe de l'actualité, afin de ne pas laisser la représentation parlementaire suivre tous les cahots, toutes les émotions successives et immédiates de l'opinion publique. La démocratie s'accommode des différents rythmes de la durée. C'est d'ailleurs là une réflexion qui a ressurgi à propos de l'instauration du quinquennat, les citoyens étant un certain nombre à considérer que l'uniformisation de la durée du mandat de l'Assemblée nationale et de celui du Président de la République ne s'était pas faite sans quelques dommages.

Sans doute n'avons-nous pas fini de nous poser la question des différents tempos qui existent en démocratie. C'est une observation familière aux historiens : l'histoire des sociétés ne se déroule pas simplement selon les rythmes de la surface, les allures de l'immédiateté. En fait, chaque conjoncture se construit toujours au confluent de moments se déroulant à des allures différentes. Il y a ce qui attire, à juste titre, l'attention immédiate des citoyens, mais aussi ce qui évolue plus lentement, de façon annuelle ou générationnelle ; enfin, il y a l'évolution des mentalités, qui confine à l'immobilité. Tous les penseurs des systèmes politiques se sont penchés sur la question de la nécessité de traduire cette diversité d'allures, sans se laisser obséder par la seule immédiateté des émotions – c'est sur la base de cette idée que celle du mandat impératif a été remise en cause depuis très longtemps.

La troisième motivation du bicamérisme consiste en la nécessité de traduire à hauteur du Parlement la diversité des structures géographiques et sociales. Les structures géographiques font évidemment référence aux pays fédéraux comme les États-Unis d'Amérique : comme l'a expliqué Michel Winock, l'idée est de traduire la représentation de l'ensemble d'une nation, tout en donnant la parole à chacun des États dans sa particularité. C'est ce qui explique qu'aux États-Unis chacun des États, quelle que soit sa dimension, qu'il s'agisse de la Californie, du Texas ou de l'Alaska, est toujours représenté par deux sénateurs, ce qui est à la fois symbolique et très concret. On peut observer la même chose en Allemagne.

Il existe par ailleurs l'idée qu'il est sain en démocratie que les structures sociales, dont la tradition républicaine se méfie depuis longtemps, se trouvent représentées. Le Chapelier a été, jusqu'à la loi de Waldeck-Rousseau sur les syndicats de 1884, une personnalité tutélaire incarnant une méfiance profonde envers l'idée que le peuple pouvait devenir à tout moment autre chose qu'une sorte d'abstraction de citoyens organisés selon une position sociale similaire, et que l'organisation professionnelle et sociale de la vie collective devait se voir reflétée à hauteur des institutions.

J'ai relevé dans le livre du juriste Dominique Rousseau intitulé Radicaliser la démocratie deux citations intéressantes, notamment parce qu'elles proviennent de deux sources très différentes. La première est du grand juriste de la fin du xixe et du début du xxe siècle, Léon Duguit : « Il faut que le Parlement soit composé de deux chambres, dont l'une représentera plus particulièrement les individus et l'autre plus particulièrement les groupes sociaux. Un pays où la double représentation des individus et des groupes est absente, ce pays-là n'a point de Constitution. » La seconde citation vous étonnera peut-être, venant d'un Pierre Mendès France qui a voté non au référendum de 1969 ; dans son livre fameux de 1962, Pour une république moderne, il disait : « à côté de l'Assemblée, qui exprime les diversités idéologiques et politiques, la présence des groupes professionnels est devenue nécessaire dans une seconde assemblée ».

Une fois répertoriées ces trois motivations principales qui, dans la longue durée de l'histoire, peuvent avoir justifié l'existence d'une seconde chambre, je voudrais maintenant essayer d'appliquer cette grille de lecture à notre époque contemporaine. En inaugurant la maison de la radio – aujourd'hui appelée maison de Radio France –, le général de Gaulle disait que nous vivions une époque « mécanisée, agglomérée et précipitée », ce qui n'était sans doute pas le cas au temps de Montesquieu ni même au début du xxe siècle. Il me semble que, si la rencontre des trois motifs que j'ai cités pousse à soutenir l'idée du bicamérisme, qui apparaît féconde, elle montre aussi que chacun de ces motifs doit être tempéré.

Pour ce qui est de l'équilibre des pouvoirs dans la double fonction de législation d'une part, d'enquête, de réflexion, mais aussi de contrôle, d'autre part, l'idée s'est fait jour que l'on ne devait pas perpétuer une navette accordant un pouvoir égal à chacune des deux chambres. Si l'on examine la capacité de réforme de la IIIe République, on s'aperçoit que, entre 1875 et 1914, elle a été très efficace dans le domaine sociétal, des moeurs et de l'organisation de la vie collective, mais assez inefficace quand des intérêts majeurs – en particulier ceux des membres les plus favorisés de la société – étaient en jeu. En 1881, la IIIe République a installé la liberté de la presse d'une manière exceptionnellement libérale, jusqu'à autoriser le blasphème ; on lui doit aussi des lois sur les syndicats et les associations, sur la laïcité et le divorce, toutes choses qui ont permis à la France d'épouser son temps, pour reprendre un vocabulaire gaullien.

En revanche, on ne peut que constater et rétrospectivement déplorer la lenteur du mouvement de réforme en matière de protection sociale : dans ce domaine, nous avons pris du retard par rapport à l'Allemagne, où Bismarck – pour des raisons compliquées que je ne détaillerai pas – avait fait avancer la protection des plus défavorisés. Dans les années 1880 et 1890, la législation sociale française était très en retard et Clemenceau, alors puissamment engagé à gauche, indigné par les effets délétères d'un système économique libéral écrasant les plus humbles, estimait que le Sénat avait contribué à ce retard, ce en quoi il n'avait pas tout à fait tort : la législation sociale était souvent freinée par la seconde chambre. C'est avec un brin de malice que j'évoquerai devant le déontologue de votre assemblée une anecdote assez révélatrice du comportement du Sénat sous la IIIe République. Au moment du Cartel des gauches, un député du Finistère, Victor Balanant, avait proposé que l'on imposât aux parlementaires de faire une déclaration publique de leur patrimoine au début et à la fin de leur mandat ; alors que la Chambre des députés avait unanimement adopté cette proposition, le Sénat s'est, de son côté, délibérément empressé de l'enterrer.

Il ne serait pas absurde d'imaginer, si l'on devait revoir les règles du jeu démocratique, que le pouvoir du Sénat puisse différer en fonction des sujets dont il a à connaître et qu'il dispose d'un pouvoir plus grand en matière de choix de société et de moeurs, qu'il s'agisse du divorce ou du mariage pour tous – sans aller peut-être jusqu'au blocage absolu, mais en favorisant, par exemple, des navettes plus nombreuses. Parallèlement, dans le domaine des intérêts à bousculer, en matière financière et budgétaire, l'Assemblée nationale pourrait avoir des pouvoirs plus forts que ceux du Sénat – celui-ci conservant évidemment toute la majesté d'une assemblée parlementaire, avec l'ensemble des protections qui y sont attachées contre les intrusions éventuelles du pouvoir exécutif.

Le deuxième argument en faveur du bicamérisme est l'idée qu'il existe des rythmes dans la vie collective d'un pays, qui doivent trouver une traduction au niveau de ses institutions. Si un mandat de sénateur de neuf ans était sans doute trop long compte tenu de l'époque précipitée qui est la nôtre, le fait de l'avoir ramené à six ans me paraît raisonnable : c'est un juste milieu, là où un mandat de sept ans serait encore trop long et un de cinq ans, trop court. Je préférerais que le renouvellement se fasse par tiers tous les deux ans plutôt que par moitié tous les trois ans, mais ce point n'a que peu d'importance. L'essentiel est qu'il n'y ait pas concomitance d'un renouvellement intégral du Sénat avec les autres institutions.

L'idée de tenir compte d'un rythme temporel permet aussi de saluer, dans le cas du Sénat de la IIIe République, son rôle de volant d'équilibrage. Bien que l'on entende souvent affirmer que le Sénat joue un rôle conservateur, force est de constater qu'il a renvoyé des gouvernements de droite à peu près aussi souvent que des gouvernements de gauche – et ce n'est pas par fidélité familiale que j'insiste sur ce point. Le Sénat avait vocation à compenser par ses positions celles de la Chambre, censée être davantage sous l'emprise des émotions en raison de son élection au suffrage universel. Ainsi le gouvernement d'Aristide Briand est-il renversé en 1913 après avoir posé la question de confiance sur le suffrage proportionnel, que Briand défendait contre les « mares stagnantes du suffrage universel » – il était alors opposé au rapporteur Jules Jeanneney, très favorable au scrutin uninominal à deux tours. D'autres gouvernements ont été renversés par le Sénat, qu'ils soient de gauche – Léon Bourgeois en 1896, Édouard Herriot en 1925, Léon Blum en 1938 – ou de droite – André Tardieu en 1930 et Pierre Laval en 1932.

La question des rythmes en soulève une autre, celle de l'âge des sénateurs. Peut-être vais-je apparaître comme profondément réactionnaire si je vous dis que, pour ma part, il ne me paraît pas indu de fixer un âge minimum différent pour le Sénat et pour la Chambre des députés. Dès lors que l'on considère qu'il revient aux sénateurs d'incarner la réflexion sur la longue durée, en particulier de resituer les moments des conflits de la démocratie dans le long cheminement de l'histoire collective, la mémoire des sénateurs et sénatrices plus âgés permet de disposer d'un recul plus important. Certes, il ne faut tout de même pas que leur âge les rende aveugles à l'avenir – que les jeunes sont censés voir de façon plus lucide. Sans m'engager sur cette question, je me bornerai à indiquer que Clemenceau a évolué à son sujet, puisqu'il évoquait en 1884, alors qu'il était encore hostile au Sénat, la « furieuse insurrection des béquilles », leur « majestueuse immobilité » et leur « somnolence résolue ». Quoi qu'il en soit, l'argument selon lequel le Sénat peut constituer un instrument pour briser les émotions instantanées est plus fort que jamais.

J'en viens à la troisième motivation du bicamérisme, consistant en la représentation au Parlement des groupes sociaux et professionnels dans leur diversité – une représentation qui me paraît à la fois nécessaire et légitime. Il faut cependant se garder du risque de laisser prospérer le moindre communautarisme. Si j'estime légitime que les structures organiques d'une société trouvent leur reflet dans l'assemblée siégeant au palais du Luxembourg, il me paraîtrait détestable que le communautarisme se trouve favorisé par un certain mode d'élection. Pour ce qui est de la représentation des religions, la loi de 1905 a à la fois affirmé que la religion était affaire de for intérieur, et qu'il revenait à la République d'en protéger l'exercice public – en dehors de toutes les légitimes et magnifiques préoccupations de la laïcité. La revendication, exprimée par certains à plusieurs reprises, visant à ce que les religions en tant que telles se trouvent représentées au Sénat, constitue à mes yeux un péril, et j'estime au demeurant que les cultes disposent d'autres moyens de s'exprimer.

En revanche, les régions et les groupes professionnels doivent, à mon sens, être représentés au sein de la seconde chambre. En ce qui concerne les régions, la circonscription me semble constituer l'échelon de représentation adéquat, et il me paraît légitime que le mode de scrutin soit en partie proportionnel, car cela permet de mieux assurer la parité des deux sexes que ne le fait le système uninominal – si le principe du binôme adopté pour l'élection des conseillers généraux n'est pas à l'ordre du jour pour les législatives, rien ne s'oppose à l'élaboration de listes « chabadabada » – c'est-à-dire un homme et une femme – pour les sénatoriales.

Par ailleurs, le système uninominal à deux tours est légitime à l'Assemblée, d'une part parce qu'il constitue le bon compromis entre la nécessité de disposer d'un exécutif efficace et celle de refléter fidèlement l'opinion de la nation, d'autre part parce qu'il assure un minimum de cohésion. Certains s'indignent que le Front national ne soit pas représenté davantage à l'Assemblée nationale, compte tenu de son poids réel dans la société. Pour ma part, je n'en suis pas choqué, car je me réfère au vieil adage selon lequel voter consiste à choisir au premier tour et à éliminer au second tour. Le rejet du Front national par une majorité de Français me paraît avoir une portée aussi importante que le fait de choisir tel ou tel candidat au premier tour, mais la question mérite d'être débattue. En tout état de cause, il me paraîtrait malsain qu'un parti représentant peut-être un quart de l'opinion publique ne soit pas présent au Parlement. Le système proportionnel régional permettrait que le Front national – comme, demain, d'autres partis – soit représenté au Sénat.

La deuxième représentation nécessaire est celle des groupes professionnels et sociaux. J'estime que le Sénat de l'avenir prendrait beaucoup de force et enracinerait davantage sa légitimité au sein de l'opinion publique si ces groupes y étaient présents. S'il paraît absurde de voir les anciens présidents de la République siéger au Conseil constitutionnel, ils auraient en revanche tout à fait vocation à être présents au Sénat. De même, d'autres types de structurations pourraient légitimement être représentés au Sénat, qu'il s'agisse des organisations syndicales, des universités, voire de certaines organisations non gouvernementales (ONG), du moment qu'elles ont acquis sur la longue durée une légitimité évidente.

Nous devons nous garder de la solution adoptée par de Gaulle en 1969, consistant à ce que les organisations syndicales désignent leurs représentants, afin d'éviter ce que l'on observe au Conseil économique, social et environnemental (CESE), par exemple, où les nominations représentent souvent une récompense attribuée à de bons et loyaux soldats du syndicalisme patronal, ouvrier ou agricole, blanchis sous le harnois : à mon sens, il vaudrait mieux que les représentants des organisations soient issus de leurs forces vives – ce qu'une désignation par élection permettrait sans doute davantage. Cela impliquerait que, de façon très légitime, les projets de loi à caractère sociétal soient examinés au Sénat avant d'être transmis à l'Assemblée nationale, ayant vocation à avoir le dernier mot.

La représentation des régions et des groupes professionnels soulève trois questions, à commencer par l'éventualité – déjà évoquée par de nombreux théoriciens – de reconnaître une double majorité ou un double scrutin au Sénat. On pourrait imaginer que, dans certaines matières, les représentants des régions au suffrage universel s'expriment et décident, leurs collègues de l'Assemblée ne donnant que leur avis – un avis ayant cependant beaucoup de poids du fait de la solennité des lieux d'où il serait émis.

La deuxième question suscitée par une représentation des régions au Sénat est celle du cumul, une question transversale à tous les débats de votre groupe de travail. Pour ma part, j'observe que, si un refus absolu du cumul s'impose pour l'Assemblée nationale, une certaine réflexion peut venir nuancer ce principe du côté du Sénat. Non que l'on puisse combiner une fonction exécutive de maire ou de président de conseil départemental ou régional avec celle de sénateur, mais j'estime que l'on pourrait par exemple autoriser les sénateurs à assister, avec voix consultative, aux institutions que j'ai citées, afin de leur permettre de s'informer et de rester en lien avec ces institutions. Peut-être pourrions-nous même envisager de donner l'autorisation aux sénateurs de participer sans aucune responsabilité exécutive à la vie des conseils régionaux.

La troisième question, un peu annexe, est celle du destin du Conseil économique, social et environnemental – un point sur lequel je resterai prudent. Peut-on concevoir que, comme cela avait été prévu en 1969, le Sénat en vienne à remplacer efficacement le CESE, ce qui permettrait de réaliser quelques économies ? Au contraire, doit-on penser que ce Conseil, dont l'influence – on peut en faire le constat sans être désobligeant – n'a pas été au niveau de ce qu'espéraient ses fondateurs en 1924, au moment du Cartel des gauches, peut continuer de jouer un rôle utile de réflexion parmi beaucoup d'autres instances de la nation ayant la même vocation, et de faciliter les rapports sociaux entre un certain nombre de représentants qui s'y retrouvent dans le calme feutré d'échanges se déroulant à l'abri du feu des projecteurs et des passions collectives ? Les deux conceptions peuvent se défendre, et, personnellement, je n'ai pas de religion sur le sujet.

1 commentaire :

Le 26/12/2016 à 16:45, Laïc1 a dit :

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" venant d'un Pierre Mendès France qui a voté non au référendum de 1969 ; dans son livre fameux de 1962, Pour une république moderne, il disait : « à côté de l'Assemblée, qui exprime les diversités idéologiques et politiques, la présence des groupes professionnels est devenue nécessaire dans une seconde assemblée »."

La présence d'une chambre des lobbies est tout à fait inopportune dans une République qui se veut démocratique.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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