Intervention de François Asensi

Séance en hémicycle du 5 mai 2015 à 15h00
Débat sur le rapport du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l'évaluation du réseau culturel de la france à l'étranger

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Asensi :

Monsieur le Président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avec plus de 1500 implantations, de statut public et privé, la France dispose d’un outil unique au monde pour valoriser notre langue et nos oeuvres, au service de la diversité culturelle.

Je me félicite aujourd’hui de notre débat sur ce réseau, à l’initiative du groupe RRDP, à la suite du remarquable rapport publié en décembre 2013 par nos collègues François Loncle et Claudine Schmid.

Pour les députés du Front de gauche, ce débat est nécessaire à plus d’un titre.

Tout d’abord, je voudrais dire un mot sur les récentes réformes inachevées et globalement décevantes.

Dans le cadre de la RGPP, une première étape engagée en 2009 a vu la fusion des services de coopération et d’action culturelle, les SCAC, et des établissements à autonomie financière, les EAF, avec un gain incontestable en matière de lisibilité et de pilotage, même s’il a suscité des difficultés pour les agents et s’il s’est inscrit dans un objectif de baisse des dépenses.

Concernant la loi sur l’action extérieure de 2010, notre groupe a regretté un rendez-vous manqué. Le rattachement expérimental à l’Institut français était voué à l’échec, avec la confusion des missions, la perte de la défiscalisation et le coût de la réforme.

Aujourd’hui, l’Institut français réclame une redéfinition de ses missions. Des pistes intéressantes sont proposées par la Cour des comptes, comme le renforcement des saisons culturelles et des actions menées avec plusieurs postes du réseau.

Pour autant, je crois que nous sommes nombreux à convenir qu’après ces réformes multiples et parfois peu cohérentes, le temps est venu de la stabilité.

Tâchons désormais d’améliorer la vision et le pilotage. Je souscris pleinement à l’idée de renforcer le pilotage interministériel.

J’en viens au budget famélique dédié à ce réseau.

Le ministère des affaires étrangères a subi plus que d’autres une véritable saignée budgétaire depuis les années 1990. Ce constat est encore plus accablant pour le réseau culturel, avec 7 % de crédits de fonctionnement en moins depuis 2007 et une chute de 25 % des crédits d’intervention. En écho au cri d’alarme lancé par Bernard de Montferrand en 2010, l’effort de la France s’est affaissé à 190 millions d’euros, contre 288 millions pour le Goethe Institut et 242 millions pour le British Council.

Comment ne pas percevoir une forme d’incohérence entre des ambitions affichées au plus haut niveau et des moyens de plus en plus limités ?

Il n’est pas possible d’aller plus loin dans ces restrictions budgétaires, sauf à renoncer à l’universalité de notre réseau ou à faire de nos antennes culturelles de simples guichets de vente au service d’une vision purement marchande de notre culture.

L’effort de rationalisation auquel appelle le rapport de la Cour des comptes n’est que l’autre face de cette politique d’austérité qui menace notre réseau. Je regrette que le rapport se borne à défendre le statu quo budgétaire alors qu’il faudrait dégager de nouveaux moyens.

Pour terminer, je regretterai le manque de vision de notre politique culturelle à l’étranger.

La politique extérieure de la France a toujours été liée à la diffusion de ses arts et de ses idées hors des frontières. C’était notre manière de peser sur la conduite des affaires du monde.

De cette ambition culturelle et politique, qui au cours de l’histoire a été tantôt aliénante, tantôt émancipatrice, que reste-t-il aujourd’hui ?

Au nom d’une doctrine peu consolidée de la « diplomatie d’influence », la culture se voit rabaissée à un simple véhicule des intérêts économiques de nos multinationales. Nombre des préconisations abordées aujourd’hui sont imprégnées de cette vision utilitariste et court-termiste de la compétition économique de tous contre tous, qui a pourtant mené à la crise actuelle du capitalisme financier.

Conséquence de cette vision, les missions de service public du réseau culturel vont s’éroder à mesure qu’il devra faire appel à des sources de financement privées pour pallier le désengagement de l’État.

Nous sommes tout aussi inquiets des perspectives de fermeture d’antennes du réseau culturel. Qu’il faille s’adapter à l’émergence de nouvelles puissances, c’est une évidence, mais cela ne doit pas conduire à sacrifier la francophonie. Nous refusons que l’Afrique soit délaissée au motif de son faible niveau de développement économique, car ce continent, berceau de l’Humanité, représente aussi son futur.

Pour les députés communistes et du Front de gauche, le réseau culturel français, riche du dévouement et du professionnalisme de ses agents, doit contribuer à un monde multipolaire et créer les conditions du dialogue entre les cultures, au service d’un projet de paix et de progrès.

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