Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 1er avril 2015 à 16h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur :

Ces amendements contiennent des dispositions qui ne sont pas toutes cohérentes entre elles ; aussi le Gouvernement émettra-t-il un avis globalement défavorable, non parce qu'il s'oppose à chacune en particulier, mais parce qu'il ne peut toutes les accepter. L'amendement du rapporteur, par exemple, tend à faire désigner les magistrats issus du Conseil d'État et de la Cour de cassation par les vice-présidents respectifs de ces juridictions : le Gouvernement y est très favorable mais, cette disposition étant associée à d'autres auxquelles il ne l'est pas, je me vois obligé d'émettre un avis défavorable. Nous sommes néanmoins disposés à améliorer, avec les parlementaires, la rédaction du texte initial.

Pourquoi neuf membres ? De nombreux parlementaires, toutes sensibilités confondues, ont observé que le nombre et la technicité des missions plaidaient pour un renforcement des pouvoirs de l'autorité indépendante. Par ailleurs, des interrogations, exprimées par voie de presse, suggèrent que le Gouvernement entend minorer le rôle de la CNCTR. Il n'en est rien : nous voulons, au contraire, renforcer ses pouvoirs, de façon qu'elle ait les compétences et l'indépendance requises – d'où mon assentiment aux propositions évoquées du rapporteur.

En revanche, je ne puis être favorable à son amendement s'agissant de la présence des parlementaires, car la composition de la CNCTR répond d'abord à un objectif de pluralisme. Les parlementaires doivent également être en nombre suffisant pour garantir la représentation de l'opposition. Le deuxième objectif, l'indépendance, justifie quant à lui la présence de deux magistrats issus de hautes juridictions. Nous souhaitons, enfin, donner à la commission des capacités d'expertise technique à travers la présence d'une personnalité qualifiée spécialisée dans les communications électroniques.

Le rapporteur nous objecte un argument de constitutionnalité auquel je ne souscris pas : des parlementaires siègent au sein de la CNCIS. Or, que je sache, la loi de 1991, qui l'a instituée, n'est pas inconstitutionnelle. Je ne vois pas pourquoi il en irait autrement en l'espèce. J'ajoute que, depuis l'arrêt Klass contre l'Allemagne, rendu par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en 1978, la représentation de la diversité parlementaire au sein des autorités de contrôle de l'exécutif, fussent-elles administratives, est considérée comme un renforcement des garanties conventionnelles. Bref, la mesure est non seulement constitutionnelle, mais aussi pleinement conventionnelle.

Enfin, la présence d'une compétence technique, notamment en informatique, est une protection supplémentaire, car elle garantira la pleine compréhension des sujets traités ; elle permettra, par exemple, d'appeler l'attention des instances juridictionnelles sur d'éventuels manquements du Gouvernement.

Le texte, s'agissant de la composition de la CNCTR, obéit donc à trois principes : le pluralisme démocratique, l'indépendance – que le Gouvernement est disposé à renforcer – et l'efficacité technique du contrôle. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable à l'ensemble des amendements en discussion.

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