Intervention de Jean-Patrick Gille

Séance en hémicycle du 12 février 2015 à 15h00
Débat sur le rapport d'information sur l'évaluation de l'adéquation entre l'offre et les besoins de formation professionnelle

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Patrick Gille :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a un an presque jour pour jour, notre assemblée adoptait en première lecture la loi sur la formation professionnelle, l’emploi et la démocratie sociale. Je remercie nos collègues écologistes de nous donner l’occasion, par ce débat, d’en dresser un premier bilan qui, disons-le, est plutôt positif.

L’accord des partenaires sociaux du 13 décembre 2013 et sa transcription par le Parlement avaient donné lieu à de nombreux débats et de nombreuses inquiétudes, la première étant de savoir si l’année 2014 suffirait pour mettre en place les nouveaux circuits financiers et toute la logistique que suppose le compte personnel de formation. Aujourd’hui, le pari a été tenu, et en ce qui concerne le compte personnel de formation, le site internet « moncompteformation.gouv.fr » est opérationnel depuis le 3 janvier. Au cours du premier mois, il a reçu près de 1,7 million de visites ; 500 000 personnes ont déjà ouvert leur compte et plus de 6 000 projets de formation sont enregistrés.

Comme je l’avais indiqué par anticipation à cette même place, on peut aujourd’hui prendre son smartphone, aller sur son compte, inscrire ses heures DIF, chercher les formations qui nous concernent dans la liste des certifications éligibles et trouver des informations sur les modalités de financement et les interlocuteurs qui peuvent nous accompagner. Demain, n’en doutons pas, des applications numériques nous permettront de trouver la formation adéquate le plus près de chez nous avec, sans doute, comme cela existe pour les hôtels ou les restaurants, des avis des bénéficiaires, des statistiques sur la pertinence de la formation et la réussite à l’issue de celle-ci.

De même, les nouvelles instances de gouvernance de la formation professionnelle et de l’emploi prévues par la loi ont été mises en place. Au niveau national, le CNEFOP – Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle –, qui fusionne le Conseil national de l’emploi et le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie – CNFPTLV – est totalement opérationnel et s’est déjà réuni plusieurs fois, et encore mardi dernier. Il en va de même pour l’instance paritaire nationale des branches professionnelles, le COPANEF, qui a entre autres pour mission d’élaborer les fameuses listes de formations éligibles, dont nous avions longuement débattu lors de la discussion de la loi. Il vient d’y introduire – je tiens à le souligner car c’était fortement attendu – les formations linguistiques qui représentent aujourd’hui un tiers des formations.

Les déclinaisons régionales de ces instances, CREFOP et COPAREF, sont elles aussi installées, à tel point que certains de nos collègues envisagent déjà de les modifier dans le cadre du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Cela paraît un peu précipité – nous verrons cela mardi ou mercredi prochain – d’autant plus que nous avons déjà à assimiler le redécoupage des régions qui va bien évidemment entraîner un changement de périmètre de ces instances.

Enfin, pour la première fois, celles-ci vont permettre d’élaborer, de coordonner et d’évaluer en un seul lieu les politiques d’emploi, de formation, d’orientation et d’accompagnement des demandeurs d’emploi.

Mais le débat d’aujourd’hui porte essentiellement sur la qualité et l’adéquation de l’offre de formation. C’est un vaste sujet qui est apparu tardivement dans le débat parlementaire, porté essentiellement par les sénateurs et repris lors de la commission mixte paritaire.

La solution finalement retenue a été d’imposer aux principaux financeurs d’actions de formation de s’assurer de la capacité des prestataires à dispenser une formation de qualité sur la base de sept critères définis par décret en Conseil d’État, décret que nous avons d’ailleurs examiné et approuvé lors de la séance du CNEFOP qui s’est tenue mardi dernier.

Mais comme j’ai souvent eu l’occasion de le dire, c’est le compte formation en lui-même qui va être porteur d’amélioration de la qualité de la formation et transformer la question de l’adéquation de l’offre à la demande et aux besoins.

En effet, tout un chacun aura à coeur que les heures de formation qu’il aura pu épargner sur son compte personnel soient de la meilleure qualité possible, à la différence du DIF qui permettait de financer tout et n’importe quoi. Au contraire, le compte personnel de formation ne permet de financer que des formations qualifiantes ou certifiantes, ce qui en soit est déjà un gage de qualité.

Mais la qualité, ce n’est pas uniquement la qualité des formateurs et des organismes de formation. C’est aussi suivre une formation adaptée à ses besoins et à son niveau.

Là aussi, le choix fait par notre assemblée d’introduire l’accompagnement à la validation des acquis de l’expérience comme un droit opposable financé dans le cadre du CPF devrait permettre des parcours de formation plus qualitatifs, plus appropriés et mieux ciblés. On pourra, dans un premier temps, valider ses acquis par l’expérience, puis dans un second temps utiliser le même compte pour se former et valider les modules qui manquent.

L’enjeu est donc d’organiser les diplômes, les certifications et la formation en modules, avec des certifications intermédiaires.

La loi du 5 mars 2014 modifie en profondeur le financement du système de formation, en remplaçant une obligation fiscale par une obligation de former. Elle modifie également la gouvernance de la formation professionnelle, en trouvant un nouvel équilibre entre l’État, les régions et les branches professionnelles. Elle modifie enfin l’offre de formation, qui doit être modularisée, et l’organisation même de la formation professionnelle, avec la création du compte personnel de formation – reste à savoir, monsieur le ministre, quand seront ouvertes les négociations permettant de l’étendre aux fonctionnaires et aux travailleurs indépendants. Je n’oublie pas les dispositifs d’accompagnement, notamment l’entretien professionnel et le conseil en évolution professionnelle.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, en dotant chaque salarié d’un compte personnel de formation, dont le financement est garanti collectivement, nous avons mis en place une coresponsabilité qui va progressivement modifier l’offre de formation et améliorer son adéquation aux besoins. Cette période de mutation est engagée. Il est sûrement encore trop tôt pour l’évaluer, mais je propose que nous menions, au deuxième semestre, une mission d’information sur l’application et l’évaluation de la loi du 5 mars 2014, comme nous l’avions fait avec Gérard Cherpion pour la loi de 2009.

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