Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 25 novembre 2014 à 18h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre présence parmi nous ce soir. Nous sommes convenus d'aborder cinq sujets : l'Iran, l'Irak, la Syrie, le Proche-Orient et l'Ukraine. Cette audition devant durer environ une heure et quart, je vous propose d'en venir directement aux questions, sans exposé liminaire de votre part.

S'agissant des négociations entre les « 5+1 » et l'Iran, même s'il est probablement encore un peu tôt pour faire un bilan des discussions à Vienne, pouvez-vous nous en dire plus sur les points d'achoppement ? Pourquoi n'est-on pas parvenu à un accord ? Vous avez souligné ce matin sur France Inter que l'atmosphère était néanmoins plus positive que lors des discussions précédentes. D'autre part, vous avez évoqué des progrès sur certains sujets ; pouvez-vous nous préciser lesquels ? Pouvez-vous également nous donner des indications sur les sanctions, dont les Iraniens demandaient la levée totale ?

Selon vous, quelles sont désormais les perspectives ? Le nouveau Congrès américain commencera à siéger au mois de janvier. La prolongation des négociations jusqu'en mars, voire jusqu'en juillet ne va-t-elle pas compliquer la donne ? Ne risque-t-elle pas de renforcer la main des plus sceptiques et des plus hostiles aux négociations, aux États-Unis comme dans d'autre pays ?

Pour ce qui est de l'Irak, la progression de Daech semble freinée : le siège de la raffinerie de Baiji a été brisé et Daech reculerait à Kobané. Pourriez-vous faire le point sur la situation militaire ? Aux frappes de la coalition, qui jouent un rôle essentiel, s'ajoute la lutte au sol menée par les forces de sécurité irakiennes, les milices chiites et certaines tribus sunnites. La coordination se fait-elle entre ces différentes forces ? Sont-elles assez actives ? Leurs effectifs sont-ils suffisants ? Où en est le projet, évoqué à un certain moment, de créer une garde nationale en Irak ?

Je me suis rendue la semaine dernière avec Pierre Lellouche et Philippe Baumel à New York, à l'Assemblée générale des Nations unies, ainsi qu'à Washington, où nous avons appris que le partage du renseignement avec les États-Unis sur l'identification des cibles ne fonctionnait pas nécessairement aussi bien que nous pourrions le souhaiter. Avez-vous reçu des assurances à ce sujet ? Cela se passe-t-il mieux depuis lors ?

Sur le plan politique, le premier ministre Al-Abadi a pu nommer les ministres de l'intérieur et de la défense, et un accord partiel a été conclu entre les autorités de Bagdad et le gouvernement régional du Kurdistan à propos du pétrole et des salaires des fonctionnaires. Ce sont là des signes encourageants. En outre, où en sont les efforts qui visent à inclure davantage les tribus sunnites dans le jeu et à les détacher de Daech ? Des progrès ont-ils été réalisés ? Les Jordaniens nous disent qu'ils ont beaucoup oeuvré en ce sens.

En ce qui concerne le Proche-Orient, je vous confirme que la Conférence des présidents a décidé ce matin que le projet de résolution déposé par le groupe SRC serait examiné en séance publique vendredi prochain à partir de neuf heures trente et qu'il ferait l'objet d'un vote solennel le mardi 2 décembre. Je vous propose donc de réserver les questions relatives à ce texte pour la séance de vendredi et de nous concentrer ce soir sur la montée des violences à Jérusalem et les moyens de l'endiguer.

Le mois dernier, au Caire, vous avez appelé de vos voeux un changement de méthode, monsieur le ministre. Quel rôle la France peut-elle jouer à cet égard ? Quelle en serait l'articulation avec la tentative de relance des pourparlers proposée par M. Kerry ? Lors de notre visite à Washington, je n'ai pas eu le sentiment que le Département d'État était très optimiste sur son issue. Nous sommes également très intéressés par ce que vous pourrez nous dire sur la position française concernant le projet de résolution déposé au Conseil de sécurité par la Jordanie à la demande des Palestiniens. Au-delà des paramètres déjà connus, l'Autorité palestinienne souhaiterait qu'une date butoir soit fixée pour la fin de l'occupation israélienne. Lorsque nous avons rencontré l'ambassadeur palestinien, j'ai insisté sur le fait qu'il faudrait faire preuve d'esprit de compromis afin d'éviter un veto américain.

Enfin, nous souhaiterions vous entendre sur la situation en Ukraine et sur nos difficultés actuelles avec la Russie. L'OTAN, l'OSCE et les autorités de Kiev dénoncent une présence de plus en plus massive de militaires russes sur le territoire ukrainien ; qu'en savons-nous exactement ? Au vu de l'intensification manifeste des combats, devons-nous craindre des offensives militaires massives ? De plus, la situation économique en Crimée est catastrophique et risque de s'aggraver encore lorsque la mer d'Azov sera prise par les glaces, ce qui empêchera le ravitaillement maritime de la péninsule. L'approche de cette échéance pourrait-elle amener la Russie à s'emparer de Marioupol, comme elle menace de le faire depuis quelque temps ? De l'autre côté, le gouvernement ukrainien pourrait décider de ne plus payer les pensions dans les régions de l'Est et agite à nouveau le chiffon rouge d'une adhésion à l'OTAN. Vous avez laissé entendre ce matin sur France Inter que cela ne vous paraissait pas être la meilleure chose à faire. En tout cas, la radicalisation des deux côtés fait peser des menaces fortes sur le processus de Minsk.

Par ailleurs, se pose la question des sanctions. Les sanctions européennes et les contre-sanctions russes ont des effets considérables sur l'économie et la monnaie russes, mais affectent aussi l'économie européenne. En revanche, elles ne semblent pas à même, pour le moment, de faire bouger les lignes sur le plan politique. Avez-vous engagé avec vos collègues européens une réflexion sur l'évolution de la politique européenne si la crise devait durer ? Nous avons appris aujourd'hui la décision du Président de la République de différer la livraison du Mistral jusqu'à nouvel ordre. Quelles peuvent en être les conséquences, notamment en matière de pénalités ?

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