Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 2 décembre 2014 à 21h30
/14/dossier/1 — Après l'article 15

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget :

La difficulté que vous soulevez concerne en réalité la réglementation relative au financement des partis politiques. Comme vous le savez, l’article 11-4 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique interdit les « contributions ou aides matérielles d’un État étranger ou d’une personne morale de droit étranger » en faveur d’un parti politique. La même règle est prévue par l’article L. 52-8 du code électoral pour le financement des campagnes électorales. La question de savoir dans quelles conditions les partis politiques peuvent souscrire des emprunts à l’étranger n’est pas fiscale mais relève de la compétence de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Par ailleurs, dans la mesure où la réglementation n’interdit pas le recours à l’emprunt pour les partis politiques, si la loi fiscale restreignait le champ du bénéfice de la réduction d’impôt pour les raisons que vous souhaitez, elle créerait une discrimination entre les partis politiques. En effet, au regard du principe d’égalité devant les charges, il me semble difficile de justifier l’exclusion de partis politiques du bénéfice de la réduction d’impôt pour la seule raison qu’ils auraient recours à un emprunt auprès d’une banque étrangère en dehors de la zone euro alors que cet emprunt pourrait être souscrit auprès d’une banque française. Je ne vois pas quel motif d’intérêt général pourrait justifier une telle restriction fiscale si cette dernière n’est pas prévue par la législation relative aux partis politiques. En outre, la référence aux seuls pays membres de la zone euro, à l’exclusion notamment des autres États membres de l’Union européenne, me paraît difficile à défendre, tant au regard de la loi du 11 mars 1988 que du droit communautaire, qui interdit les discriminations.

Je termine par un aspect mineur. Tel que vous l’avez rédigé, votre amendement s’appliquerait aux emprunts souscrits avant l’entrée en vigueur de la loi et priverait donc les partis politiques et les donateurs d’un avantage de manière rétroactive, ce qui est juridiquement fragile.

Pour ces raisons techniques, le Gouvernement n’est donc évidemment pas favorable à cet amendement, mais j’ai bien entendu, monsieur Hammadi, que vous le considériez comme un amendement d’appel. Il existe d’autres voies que la voie fiscale pour résoudre des problèmes politiques, que l’on pourrait même qualifier de moraux, relatifs au financement de la vie politique.

À mon sens, il serait nécessaire de consulter la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, que vous pourriez utilement interroger. Vous pourriez ensuite, après un travail de votre commission des lois, utiliser un véhicule ad hoc ou déposer une proposition de loi, en vous servant d’un autre argument que l’argument fiscal, lequel ne me semble pas adapté pour répondre à une question politique tout à fait légitime.

Il y a lieu de travailler dans cette direction. Cependant, en matière fiscale, ce type de discrimination ne me semble pas conforme aux règles d’égalité qui sont les nôtres. Cela ne réduit en rien l’importance du sujet que vous évoquez et qui interpelle un certain nombre d’acteurs et de spectateurs de la vie politique.

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