Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 28 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Justice

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Je demande encore un moratoire, sur un sujet qui nous préoccupe tous, l’encellulement individuel, disposition qui est dans notre droit depuis la fin du XIXe siècle. Certes, l’esprit n’était pas le même, mais le principe est inscrit dans notre droit et, à trois reprises déjà, cette obligation a été reportée parce que l’État n’était pas en mesure de la respecter. Je rappelle que cela concerne les maisons d’arrêt, où il y a un problème de surpopulation carcérale, parce que, dans les établissements pour peine, nous pratiquons déjà l’encellulement individuel.

La loi pénitentiaire de 2009 avait prévu un moratoire de cinq années pour l’entrée en vigueur du principe de l’encellulement individuel. Nous parviendrons donc à l’échéance en novembre 2014, dans quelques semaines. Or nous ne sommes pas en mesure de satisfaire à cette obligation. Nous travaillons depuis pratiquement un an pour voir comment nous pourrions faire, mais, objectivement, ce n’est pas à notre portée.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté a suggéré une mise en oeuvre progressive, en identifiant notamment des publics prioritaires, des personnes ayant des problèmes de santé, des difficultés de communication, dues à une surdité par exemple, ou présentant des fragilités psychologiques. Nous sommes déjà vigilants mais il n’est pas possible aujourd’hui d’identifier de façon objective les personnes présentant de tels troubles.

Nous vous proposons donc de différer l’application de ce principe d’encellulement à décembre 2017. Ce ne serait pas un simple moratoire comme cela a été fait antérieurement, car le Gouvernement aurait l’obligation de présenter au Parlement à la fin de 2017 un état budgétaire et opérationnel des progrès en matière d’encellulement individuel.

Ce sont des sujets sur lesquels nous discutons depuis des années. Nous avions évidemment vu arriver l’échéance et nous nous en sommes préoccupés. Nous avons eu des échanges avec quelques-uns d’entre vous et, en particulier, bien sûr, le président de la commission des lois. Nous réfléchissons d’abord aux éléments que le Gouvernement sera obligé de présenter au Parlement, l’état des lieux et les progrès.

Il y a aussi la question centrale qui est de savoir si l’encellulement individuel est le seul paramètre. Pour toutes les nouvelles constructions, nous imposons 90 % d’encellulement individuel ; nous n’accumulons donc pas les difficultés. Néanmoins, est-ce un paramètre absolu ou ne devons-nous pas plutôt travailler sur les conditions de détention, la dignité de la détention, les règles pénitentiaires européennes, les diverses définitions données et la mise en pratique ?

Le Gouvernement vous présente donc cet amendement mais je sais que vous allez continuer à réfléchir et vous envisagez peut-être des solutions permettant d’être opérationnels plus vite.

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