Intervention de Bruno Le Maire

Séance en hémicycle du 23 juin 2014 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Maire :

Ainsi, les contribuables sont désabusés : tous ceux qui ne devaient pas payer vont finalement payer quand même, et tous ceux qui s’étaient préparés à payer vont s’apercevoir qu’ils économiseront peut-être 100 ou 150 euros, mais, en définitive, la pression fiscale aura continué à augmenter en France, pour atteindre un niveau de prélèvement obligatoire avoisinant cette année 45 %.

J’imagine la colère de tous ceux qui sont accablés d’impôts supplémentaires depuis deux ans, des classes moyennes qui travaillent, des familles nombreuses qui ont vu leur impôt augmenter en raison du plafonnement du quotient familial, quand ils vous entendent parler des 1,9 million de personnes qui vont sortir de l’impôt sur le revenu. Ils ont un profond sentiment d’injustice ! Ils pensent que ce sont toujours eux qui paient et qui doivent supporter la charge de la nation.

Je reconnais votre bonne intention, qui est d’accorder une attention particulière aux ménages les plus modestes. Mais pensez également à tous ces ménages qui ont des revenus peu élevés, qui travaillent, qui ont des familles nombreuses, et qui aujourd’hui ne s’en sortent pas ! Ils ne peuvent pas comprendre votre politique, car elle est à la fois inefficace et injuste.

Ce collectif sert aussi à prolonger jusqu’à 2016 la surtaxe de l’impôt sur les sociétés pour financer la baisse des cotisations sociales. C’est tout simplement déshabiller Pierre pour habiller Paul, en reprenant toujours la même antienne : les grandes entreprises sont condamnables et doivent être matraquées fiscalement, au profit des petites.

Je ne crois pas à ce discours d’opposition entre les grandes et les petites entreprises. Les grandes entreprises représentent aujourd’hui près du tiers de l’emploi en France, 50 % des exportations, les deux tiers des dépenses de recherche et de développement, qui, évidemment, profitent également à toutes nos PME.

Soutenir les petites entreprises, c’est aussi ne pas alourdir la fiscalité des grandes entreprises, et c’est surtout ne pas la modifier systématiquement. En effet, votre geste, aussi modeste soit-il, est révélateur du message que vous n’avez de cesse d’envoyer : la fiscalité est un jouet que vous manipulez en permanence, au détriment de la stabilité fiscale du pays.

Ce collectif est également une nouvelle occasion de revirements : par exemple, la suppression du gel des aides personnelles au logement, sans doute une concession aux frondeurs de votre majorité, donne une impression de bricolage, là où nous aurions besoin de vision ; d’hésitation, là où nous aurions besoin de détermination.

À force de vouloir satisfaire tout le monde, votre aile gauche et votre aile droite, votre aile interventionniste et votre aile libérale, vous aboutissez à la cacophonie et à l’insatisfaction généralisée dans le pays. Tant qu’à faire, j’aurais effectivement préféré la grande remise à plat fiscale promise par Jean-Marc Ayrault. Mais je constate qu’elle est aujourd’hui aux oubliettes.

D’ailleurs, nous voyons bien à quoi sert M. Valls dans ce quinquennat : il est le syndic de faillite des deux premières années de M. Hollande. Des propositions de Mme Duflot sur le logement à celles de M. Ayrault sur la fiscalité, tout ce qui avait été proposé a aujourd’hui rang d’accessoire.

Je ne reviendrai pas sur le cadre prévisionnel de croissance et de déficit, que M. Migaud lui-même juge illusoire, et qui n’intègre même pas les milliards d’euros dépensés depuis quinze jours, entre la réforme du régime des intermittents du spectacle qu’il faudra compenser et les deux milliards d’euros que nous coûte le maintien d’Arnaud Montebourg au Gouvernement de la République.

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