Intervention de Philippe Goujon

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 9h30
Lutte contre l'apologie du terrorisme sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon :

Le délit de consultation des sites djihadistes reprend un amendement que nous avions défendu avec nos collègues Éric Ciotti et Nathalie Kosciusko-Morizet lors de l’examen du projet de loi antiterroriste de décembre 2012.

Ce délit placerait d’ailleurs notre législation en conformité avec le mémorandum de Rabat, cosigné par les membres du Forum mondial contre le terrorisme, auquel la France appartient, et qui préconise la criminalisation des actes préparatoires.

Il permettrait de placer le suspect en garde à vue dès lors que la consultation d’un site djihadiste faisant l’apologie du terrorisme ou incitant à ce dernier devient fréquente, habituelle, afin de déterminer le degré d’embrigadement de ce jeune et d’adopter au plus vite la réponse appropriée.

L’inscription de ce délit au casier judiciaire permettrait un meilleur signalement de l’intéressé – nous savons combien notre système présente de failles à cet égard – afin, notamment, d’éviter son départ vers le front syrien.

Il permettrait, enfin, d’incriminer les majeurs qui incitent des mineurs à la consultation de ces sites, sur le fondement du délit de corruption de mineurs, et de proposer à ces derniers un stage de désendoctrinement, comme le suggère très justement notre rapporteur.

Nous avons entendu votre argument relatif au risque juridique encouru par la notion de « consultation habituelle » : Mme Bechtel, comme vous-même, monsieur le secrétaire d’État, y avez eu recours. De notre point de vue, cet argument n’est pas totalement fondé, et vous ne pouvez pas aujourd’hui, du moins dans cet hémicycle, vous ériger en juge constitutionnel. Comme l’a rappelé le rapporteur, si le Conseil d’État a précédemment émis quelques réserves, la Cour de cassation, saisie du délit de consultation habituelle des sites pédopornographiques, a estimé, en juin 2012, qu’il n’était pas nécessaire de saisir le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Les positions des deux cours suprêmes sont donc très différentes : peut-être nous revient-il d’arbitrer ?

En outre, un filtre à deux niveaux, distinguant, d’une part, consultation habituelle et consultation simple, d’autre part, les professionnels – à l’instar des chercheurs – de l’ensemble des internautes, permettrait de ne porter qu’une atteinte proportionnée à la liberté de communication et d’opinion, justifiée de surcroît par la prévention du terrorisme. Elle répondrait donc – selon nous, en tout cas – aux exigences du Conseil constitutionnel. Aussi, adoptons cette proposition de loi : nous verrons bien ce qu’en dira le juge constitutionnel.

Par ailleurs, profitons de ce débat pour engager l’utile réflexion sur la déchéance de nationalité de nos concitoyens ayant commis des actes terroristes à l’étranger, comme Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, s’y était lui-même déclaré favorable, en affirmant sur BFM TV, le 3 juin dernier, qu’en la matière « il n’y avait pas de tabou ».

Un amendement d’Éric Ciotti, adopté ce matin par la commission,…

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