Intervention de Marie-Lou Marcel

Séance en hémicycle du 5 novembre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Mission agriculture alimentation forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Lou Marcel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques pour l'agriculture et l'alimentation :

Dans mon département, territoire rural, où l'agriculture et l'agro-alimentaire constituent le premier secteur d'emplois, cet enseignement joue un rôle primordial pour la vitalité du territoire.

Dans mon rapport pour avis, j'ai tenu à évoquer la question de la volatilité du prix des céréales et son impact sur l'élevage. La flambée des prix des céréales au cours du printemps 2012 a réactivé le spectre des émeutes de la faim de 2007 et 2008.

Elle a également montré que la hausse des prix des céréales et l'instabilité des marchés agricoles devenaient des phénomènes structurels. Or ces variations ont des conséquences particulièrement importantes pour le secteur de l'élevage. En effet, les matières premières représentent 75 % à 80 % du coût alimentaire, lequel représente 60 % à 70 % du coût de revient des élevages.

La production mondiale de céréales croît désormais moins vite que la consommation, ce qui conduit depuis les années 2000 à une réduction des stocks mondiaux, et donc à des tensions sur le marché et les prix.

Il faut également évoquer le facteur climatique. On se souvient des canicules de 2010 aux États-Unis et en Russie, et de la décision de la Russie de limiter ses exportations pour protéger son marché intérieur des risques d'inflation.

À cet ensemble de facteurs, s'ajoute enfin la question de la spéculation. Mme Clara Jamart, responsable des questions liées à la sécurité alimentaire pour Oxfam France, indique ainsi que « 40 % du maïs américain est aujourd'hui destiné à la production d'agrocarburants », politique qui entraîne une « tension de plus en plus forte sur l'offre alimentaire et tire les prix mondiaux des produits alimentaires vers des sommets. »

La hausse des prix des céréales constatée sur les marchés mondiaux a pris en 2012 des proportions préoccupantes. Elle a un impact en France puisqu'elle a renchéri les coûts de production des éleveurs, notamment dans les secteurs de la volaille et du porc. Or, il est indispensable de protéger l'élevage français, qui contribue à l'aménagement du territoire et à la croissance et qui est un secteur vecteur d'emplois dans nos territoires ruraux.

Je sais, monsieur le ministre, que le Gouvernement a défini un plan d'action face à la hausse du prix des céréales. Je salue tout particulièrement deux mesures structurelles : la mise en place du « plan silo » pour moderniser et augmenter la capacité de stockage des céréales en France ; le lancement d'un « plan protéines » avec l'accent mis sur le développement des protéines végétales.

Parallèlement à ces mesures gouvernementales, l'ORAMA, qui fédère trois associations céréalières – l'association générale des producteurs de blé, l'AGPB, l'association générale des producteurs de maïs, l'AGPM, et la fédération française des producteurs d'oléagineux et de protéagineux, la FOP – a pris l'initiative de mettre en place un fonds professionnel de modernisation céréalier-éleveur doté de 100 millions d'euros en faveur des éleveurs.

Ce fonds serait destiné à financer des mesures structurelles de soutien pour des investissements dans la rénovation des bâtiments, le développement de la méthanisation ou du photovoltaïque dans les exploitations pour les filières d'élevage les plus touchées par la hausse des prix, selon des modalités qui seront à définir ultérieurement.

Si cette proposition a été bien accueillie par certains, elle a également suscité des controverses. En effet, certaines organisations syndicales émettent le souhait que cette initiative soit fondée sur le volontariat. Pour d'autres, se pose la question de la collégialité de la gouvernance de ce fonds. Elles souhaiteraient que son utilisation soit discutée et validée par tous, dans l'intérêt de tous.

Je considère pour ma part que cette initiative mérite d'être observée sans a priori mais avec la plus grande vigilance, notamment pour ce qui est des modalités de mise en oeuvre du fonds. La solidarité souhaitable entre des céréaliers plutôt prospères et des agriculteurs précarisés ne doit en effet pas se confondre avec la charité, encore moins avec une charité sous condition.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion