Intervention de Jean-Michel Clément

Séance en hémicycle du 30 octobre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour la protection judiciaire de la jeunesse :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous sommes amenés ce soir à examiner le budget de la justice, et plus particulièrement, pour ce qui me concerne, la mission « Protection judiciaire de la jeunesse ».

Avant même d'entrer dans le détail, je voudrais vous dire, madame la garde des sceaux, ma satisfaction de voir ce budget placé au centre des priorités de ce gouvernement.

En effet, pendant ces cinq dernières années, nous avons assisté à une lente et progressive dégradation du service public de la justice, en raison notamment de l'amputation des moyens qui lui étaient attribués, mais plus graves ont été la remise en cause de l'action même des magistrats et le retard du contentieux préjudiciable aux justiciables, sans parler des conséquences sur l'accès à la justice et les conséquences financières de la réforme de la carte judiciaire orchestrée sans concertation.

C'est une politique d'affichage et de grands travaux, irresponsable et irréaliste, inadaptée aux besoins de notre société et mal budgétisée qui a été conduite au détriment de l'indispensable humanité et de l'efficacité du service public de la justice. Quand les conséquences de cette politique viennent toucher la justice des mineurs, c'est une vraie question de société à laquelle nous somment confrontés : quelle considération avons-nous pour notre jeunesse ?

Les priorités du Gouvernement et du Président de la République ont été clairement affichées, et je me réjouis qu'au premier rang de celles-ci figure justement la jeunesse.

La refondation de l'école, avec la formation des jeunes enseignants, et l'accent mis sur les apprentissages essentiels chez les jeunes enfants ont constitué le premier signe pour le futur de cette jeunesse. La création des emplois d'avenir pour les trop nombreux jeunes sans qualification ou faiblement formés constitue le deuxième pilier de cette politique en leur faveur, mais il ne fallait pas oublier ceux qui, victimes de la première violence sociale que sont le chômage et l'absence de formation ou de travail en perspective, ont pu s'égarer dans les méandres de la délinquance précoce.

Avant de les condamner, il convient de s'intéresser à eux aussi au travers des mesures de protection judiciaire. C'est la mission de la protection judiciaire de la jeunesse, qui se bat depuis des années mais qui devait faire face à l'impossible devant des réductions budgétaires régulières, les dernières d'entre elles n'étant pas des moindres puisqu'elles ont touché le coeur de son métier, l'éducation.

Après plusieurs années pendant lesquelles la protection judiciaire de la jeunesse a payé un lourd tribut à la RGPP, le projet de loi de finances pour 2013 inverse enfin la tendance en lui redonnant un peu d'air budgétaire et d'espoir.

Entre 2008 et 2011, les crédits qui lui étaient consacrés n'avaient cessé de diminuer. En 2012, ils avaient légèrement augmenté, mais seulement pour permettre la transformation de vingt foyers traditionnels en centres éducatifs fermés, l'ensemble des autres services, en particulier ceux de milieu ouvert, étant à nouveau sommés par l'ancienne majorité de faire toujours plus avec toujours moins de moyens.

Sur cette même période, la PJJ a perdu 600 emplois : une partie d'entre eux ont pu être absorbés par la réorganisation administrative qu'elle a menée, mais d'autres ont dû être ponctionnés sur son coeur de métier, la prise en charge des mineurs délinquants.

Fort heureusement, cette tendance s'inverse enfin, le Président de la République et le Gouvernement ayant décidé de faire de la jeunesse et de la justice deux axes prioritaires de leur action.

La PJJ se trouvant au carrefour de ces deux priorités, c'est très logiquement que ses crédits augmenteront en 2013 de 1 % en autorisations d'engagement et de 2,4 % en crédits de paiement. Le plafond d'autorisation d'emplois augmentera de soixante-quinze équivalents temps plein, correspondant à 205 emplois en année pleine, ce qui est un gros effort pour une administration relativement « petite » au sein du ministère de la justice, qui compte 8 400 emplois.

Pour ces raisons, la commission des lois a donné, conformément à mon avis, un avis favorable aux crédits de la mission « Justice » prévus dans le projet de loi de finances pour 2013.

Dans cette période budgétaire difficile, où les moyens doivent nécessairement être concentrés sur un certain nombre de secteurs prioritaires, l'effort fait en faveur de la PJJ et de la prise en charge des mineurs auteurs d'infractions mérite d'être salué.

Après cette brève présentation budgétaire, mon intervention portera sur le thème que j'ai traité cette année dans mon avis : la diversité des modes de placement des mineurs délinquants.

Au cours des dernières années, les mineurs faisant l'objet d'un placement – qui représentent seulement, rappelons-le, 5 % des mineurs pris en charge par la PJJ –, ont focalisé l'attention de l'ancienne majorité, qui avait tenté de faire croire à nos concitoyens qu'il existerait une recette miracle pour traiter le cas de ces mineurs, le centre éducatif fermé.

Certes, le CEF constitue l'une des solutions éducatives possibles, désormais acceptée par la plus grande partie de la communauté éducative et judiciaire ainsi que par la majorité des élus de droite comme de gauche, à condition que chaque centre ait un projet éducatif cohérent, une direction et une équipe éducative soudées et expérimentées, et qu'il soit contrôlé comme il se doit.

Pour autant, le CEF ne sera jamais la solution miracle qui pourrait être utilisée indistinctement pour tous les mineurs. Il n'est que l'une des solutions possibles au sein de la palette des différents modes de placement dont doivent disposer magistrats et éducateurs pour répondre aux situations des mineurs.

La précédente majorité avait étendu les possibilités de placement en CEF à des mineurs de treize à seize ans non récidivistes. Pour permettre la mise en oeuvre de cette évolution, elle avait prévu de transformer vingt foyers d'hébergement traditionnel en CEF. Ce faisant, elle avait ouvert une question intéressante, celle de l'équilibre des places nécessaires dans chaque type de structure, mais en lui apportant une mauvaise réponse, celle du tout-CEF au détriment des autres modes de placement.

Monsieur le président, je m'aperçois que je serai trop long.

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