Intervention de Nathalie Nieson

Séance en hémicycle du 30 octobre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNathalie Nieson, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour l'accès au droit, la justice et l'aide aux victimes :

Elle remet en cause le principe de gratuité d'accès à la justice. Elle est un recul pour l'accès au droit.

Mais je vous ai aussi entendu, madame la garde des sceaux, lors de votre audition par la commission des lois le 5 juillet dernier. Vous nous avez expliqué que la suppression de cette contribution devait être compensée par un mode de financement alternatif restant encore à trouver. J'ai aussi entendu votre engagement, devant l'assemblée générale extraordinaire du conseil national des barreaux, à supprimer cette contribution dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.

Voilà pourquoi j'ai plutôt décidé d'axer mon rapport sur une autre urgence, l'aide aux victimes. Je me réjouis de l'effort financier fait cette année, le budget qui lui est consacré augmentant de près de 2,6 millions d'euros.

Je dois vous avouer que j'ai trouvé pour le moins paradoxal que l'ancienne majorité, qui plaçait pourtant la victime au centre de ses discours, ait voté deux années de suite des budgets en réduction ne donnant pas aux associations les moyens de mettre en oeuvre cette politique prétendument volontariste.

Ainsi, en 2011, les crédits de l'aide aux victimes ont été réduits de 5 %, puis de 3 % en 2012.

La disparition de sept associations depuis 2010 ainsi que les graves difficultés financières de plus de la moitié de celles qui restent ont déjà créé des brèches dans le maillage territorial de l'aide aux victimes, au mépris du principe de continuité du service public sur l'ensemble de notre territoire et de nos obligations européennes d'adopter des mesures permettant de mieux protéger les droits des groupes vulnérables et des victimes de la criminalité.

Je note aussi votre volonté de réorienter les crédits du FIPD, utilisés majoritairement ces dernières années en faveur de la vidéosurveillance.

En dépit de tous ces efforts, le secteur associatif d'aide aux victimes a besoin d'un mode de financement complémentaire et pérenne. L'idée d'instaurer une contribution pour l'aide aux victimes, une sur-amende assise sur le produit des amendes pénales, me paraît une bonne piste. Elle pourrait aussi répondre à une logique de justice réparatrice. C'est une proposition portée par l'INAVEM, qui s'inspire de l'exemple du fonds spécial d'aide aux victimes de la criminalité, le FAVAC, mis en place au Québec depuis 1988.

Plusieurs propositions de loi ont été déposées au cours de la précédente législature, notamment, la dernière, le 24 janvier 2012, par Mme Carrillon-Couvreur et l'ensemble du groupe socialiste.

J'ai moi-même déposé un amendement en ce sens, la semaine dernière, lors de votre audition par la commission des lois. Vous avez estimé plus prudent que cette idée fasse l'objet d'une réflexion plus approfondie. C'est la raison pour laquelle je l'ai retiré. Je l'ai fait en confiance car je vous sais ouverte sur le sujet. Tant mieux, car je suis déterminée à explorer cette piste.

Je salue votre volonté de généraliser les bureaux d'aide aux victimes à l'ensemble des tribunaux de grande instance. Je compte sur vous pour veiller aux modalités retenues pour le financement de ces dispositifs. Je veux parler de la subvention de 20 000 euros par bureau, qui ne permet que l'emploi d'un juriste à mi-temps, ce qui en réduit l'amplitude horaire. Je compte aussi sur votre vigilance pour la localisation de ces bureaux au sein des tribunaux. Ils doivent être le plus éloigné possible des lieux où les mis en cause peuvent être conduits.

Enfin, j'appelle votre attention sur le fait que, pour être pleinement efficace, l'aide aux victimes doit être plurielle. Il est crucial que les crédits alloués continuent à soutenir un réseau dédié à l'aide aux victimes sur tout le territoire. Quand je parle de complémentarité, je pense aux maisons de la justice et du droit, ainsi qu'aux permanences dans les commissariats, les gendarmeries et les hôpitaux.

La diversité des lieux comme la pluralité des financeurs doivent conduire au renforcement du pilotage des politiques d'aide aux victimes. C'est une situation dont vous héritez, mais voici encore un chantier pour vous, en lien avec le magistrat délégué à cette tâche et les conseils départementaux de l'accès aux droits.

En conclusion, j'appelle les députés à approuver ces crédits dédiés à l'accès aux droits, à la justice et à l'aide aux victimes. Comptez sur nous pour rester vigilants sur toutes ces questions. Vous savez comme moi que la victime ne doit pas être prise en compte seulement pour l'indemnisation de son préjudice. Nous lui devons un véritable accompagnement et une sincère considération pour que la justice soit pleinement rendue. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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