Intervention de Suzanne Tallard

Réunion du 7 janvier 2014 à 21h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSuzanne Tallard, rapporteure pour avis :

Je vous adresse à mon tour mes meilleurs voeux – y compris celui, que je partage avec M. Martial Saddier, de pouvoir travailler à l'avenir dans de meilleures conditions. De fait, nous avons dû procéder à des auditions juste avant Noël et toute la journée d'hier, et le « calage » du texte n'a été réalisé qu'à la dernière minute. Compte tenu de ces conditions de travail difficile, je vous remercie d'autant plus vivement d'être aussi nombreux ce soir pour l'examen de cette proposition de loi.

Celle-ci est attendue par nos concitoyens, partagés entre un fort appétit pour les nouvelles technologies de téléphonie mobile, qui se développent très rapidement, et la conscience qu'ils doivent en user avec prudence et modération. C'est à ces deux aspirations contradictoires que tente de répondre la proposition de loi, en prônant la transparence, la concertation et la modération, celle-ci devant être conçue comme un processus, et non comme un exercice figé, car il s'agit d'accompagner le développement des technologies et non de le brider. Je suis pour ma part convaincue que ce texte contribuera à de meilleures pratiques.

Mme Laurence Abeille, que je tiens à remercier pour le travail que nous avons réalisé ensemble, et moi-même avons procédé en commun à une dizaine d'auditions. Depuis le renvoi du texte en commission décidé l'an dernier par notre assemblée, plusieurs rapports et études ont éclairé le débat en hiérarchisant les difficultés. Il s'agit notamment du rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), des conclusions du Comité opérationnel sur les ondes de téléphonie mobile (COPIC) et du rapport demandé par le Premier ministre, à la suite du renvoi en commission, à MM. Philippe Tourtelier, Stéphane Le Bouler et Jean-François Girard.

Cette proposition de loi, comme je l'ai dit, se donne pour ambition de modérer l'exposition aux ondes électromagnétiques tout en assurant dans ce domaine la transparence et la concertation à tous les niveaux – à commencer par le niveau local : en effet, si l'on observe depuis un ou deux ans un apaisement des rapports entre opérateurs et collectivités locales, c'est parce que les maires ont exigé d'être informés en amont. Plusieurs villes ont du reste élaboré en la matière des chartes, dont les principes sont repris dans la proposition de loi que nous examinons.

Les nombreuses études scientifiques dont nous avons pu prendre connaissance ne nous permettent pas d'affirmer l'existence d'un risque sanitaire lié aux niveaux d'exposition aux ondes électromagnétiques autorisés actuellement par la réglementation. Elles attirent cependant notre attention sur l'usage que nous faisons de nos téléphones et autres tablettes. La proposition de loi en tient compte en limitant la publicité destinée aux enfants, en encadrant l'usage des accès sans fil dans certains établissements ou en favorisant l'usage des oreillettes.

Nous pouvons également souscrire à l'invitation qui nous est faite par Mme Abeille de modérer dans la mesure du possible – j'ajouterai : sans nuire à la qualité de service – notre exposition aux ondes. C'est à cet objectif que répond par exemple la volonté d'inciter nos concitoyens à désactiver leurs modems et boîtiers multiservices lorsqu'ils n'en ont pas l'usage.

Autre exemple : les travaux du COPIC ont montré qu'il était souvent possible d'éliminer par de simples réglages techniques les « points atypiques », où le niveau d'exposition dépasse sensiblement la moyenne. Il vous est proposé de systématiser le traitement de ces points sur le territoire national.

De même, les élus locaux ont un rôle à jouer pour suivre sur leur territoire les implantations ou modifications d'antennes-relais. Une meilleure information du public et un travail de concertation mené dans la transparence contribueront à atténuer nombre de crispations lors de l'installation de nouvelles antennes – et donc à éviter des retards par rapport aux délais impartis aux opérateurs pour achever la couverture du territoire. C'est la raison pour laquelle je vous proposerai un amendement prenant en compte les conclusions du COPIC et tendant à organiser cette concertation.

Enfin, l'électrohypersensibilité étant un syndrome sur lequel les médecins ne savent rien, ou presque, je soutiens la proposition de Mme Abeille de demander que soit remis au Parlement un rapport annuel sur la question, afin d'assurer une meilleure prise en compte des souffrances ressenties par ceux qui en sont victimes. Nos auditions nous ont appris que trois études étaient en cours dans ce domaine, après l'étude commencée à l'hôpital Cochin l'année dernière et enterrée dans des conditions assez opaques. J'espère que nous disposerons d'informations à ce propos avant l'examen du texte en séance publique, le 23 janvier. Le suivi des personnes électrohypersensibles, dont la santé est indéniablement affectée – au point pour certaines d'être contraintes d'arrêter toute activité professionnelle –, mérite une attention très particulière. De façon très pertinente, le rapport Tourtelier appelle les pouvoirs publics à construire à cet égard un discours audible « en situation d'incertitude scientifique ».

Pour réduire l'impact environnemental des installations d'antennes de téléphonie, il me paraît bon aussi d'inciter à mutualiser leur utilisation, spécialement dans les zones peu denses. C'est, du reste, l'une des recommandations formulées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), que nous avons auditionnée hier. Cette mutualisation devrait selon elle concerner les installations aussi bien actives que passives, sans toutefois faire obstacle à la concurrence indispensable au développement de la téléphonie mobile. Il y a donc un équilibre à trouver entre développement et modération, entre concurrence et mutualisation.

Je précise enfin que j'ai pratiquement réécrit, en concertation avec Mme Abeille, tout l'article 1er. Cela étant, il restera à la Commission des affaires économiques de se prononcer après nous et, d'autre part, certains points demeurent en discussion avec le Gouvernement : tout n'est donc pas encore entièrement « calé » !

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