Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du 19 novembre 2013 à 15h00
Application de l'article 11 de la constitution — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérald Darmanin :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le vice-président des CMP, monsieur le rapporteur des CMP – cher Guy Geoffroy –, mes chers collègues, à l’heure où le peuple exprime chaque jour et depuis un certain temps son mécontentement, ces textes concernant le référendum, qui consiste à donner la parole directement au peuple et à l’écouter, prennent tout leur sens.

La Ve République est un régime à la fois légitime et efficace. Certains veulent encore modifier sa Constitution ; d’autres souhaitent changer de régime. Mais, depuis 1958, nous avons beaucoup transformé la lettre et parfois l’esprit de la Constitution du général de Gaulle. Celle-ci cependant un texte qui permet à tous les gouvernants, quels qu’ils soient, de faire face à des problèmes graves, qu’il s’agisse de problèmes nationaux ou de crises internationales, quel que soit le niveau de popularité du Président de la République, du Gouvernement et même des parlementaires. Elle permet ainsi de conduire notre pays sur les voies de l’intérêt général qui feront triompher la nation française.

Toutefois, on peut regretter que le peuple n’ait pas de moyens d’intervention plus directs pour participer activement à la transformation et à la réforme de notre pays. La pratique gaullienne de la consultation de la nation donnait, nous le pensons, tout son sens, toute sa profondeur, au référendum, qui n’était pas pour nous, monsieur le ministre, un plébiscite. La réforme constitutionnelle de 2008, voulue par le Président Nicolas Sarkozy a introduit de nouveaux droits pour les citoyens qu’il en soit ici remercié.

Nous sommes étonnés de constater, monsieur le ministre, chers collègues du groupe socialiste – et vous êtes également concerné, monsieur de Rugy – que, bien qu’obsédés par le fait de consentir de nouveaux droits, ou ce que vous appelez de nouveaux droits, vous ayez refusé de donner rapidement celui-ci à nos concitoyens. Aujourd’hui, ce sera chose faite. Ce n’est un secret pour personne : notre famille politique est très attachée au référendum, qui représente l’arbitrage national voulu par le général de Gaulle.

La Constitution, directement adoptée par les Français, prévoit que la souveraineté s’exprime par les représentants du peuple, mais aussi par la voix du peuple lui-même. Le général de Gaulle disait : « La souveraineté nationale, c’est le peuple exerçant sa souveraineté sans entrave. » Notre Constitution prévoit effectivement que cette souveraineté puisse s’exprimer par la voie du référendum. Il revenait au législateur d’améliorer l’article 11. La réforme constitutionnelle a introduit un nouveau droit : celui, pour une partie du peuple, de demander à ses représentants d’étudier une question à l’Assemblée nationale et au Sénat.

La Ve République a été beaucoup critiquée depuis 1958, par les radicaux mais aussi par certains socialistes, pour son parlementarisme rationalisé. Pourtant, même François Mitterrand s’est glissé dans les habits de celui qu’il avait dénoncé, à l’époque, comme responsable du « coup d’État permanent ». Même s’il ne s’agit pas d’un référendum d’initiative populaire – M. le rapporteur l’a très justement rappelé –, ce référendum est rationalisé et – permettez-moi cette expression, monsieur le ministre – encadré. Il est un outil constitutionnel supplémentaire pour tenter de résoudre la quadrature du cercle : la souveraineté nationale, la souveraineté populaire et la confiance que le peuple a envers ses représentants.

J’aurais personnellement préféré que le peuple puisse proposer sans entrave à ses représentants de se saisir d’un texte. En tout état de cause, les très nombreux garde-fous mis en place par ces deux projets de loi montrent que l’utilisation de cette procédure ne pourra pas susciter les grandes craintes que l’opposition socialiste avait naguère dénoncées. Pourtant, le peuple a une vision bien souvent plus pragmatique des choses que certaines élites politiques. Nombreuses sont en effet les propositions de loi et les amendements que nous déposons, qui sont inspirées directement par les citoyens que nous rencontrons. Ainsi David Douillet et moi-même avons déposé une proposition de loi visant à accorder un prêt à taux zéro pour l’aménagement du domicile des personnes handicapées moteur.

Il est des sujets dont la nation dans ses profondeurs, pour reprendre les termes du général de Gaulle, doit juger.

Nous devons au moins relever le compromis trouvé par la commission mixte paritaire, qui permet de garantir l’égal accès au droit de vote tout en facilitant ce dernier par la dématérialisation, d’encadrer le financement de cette expression démocratique et d’assurer le respect des données personnelles.

Je tiens, ici, après le ministre, à saluer notre excellent rapporteur, Guy Geoffroy, ainsi que le rapporteur du Sénat pour leur admirable travail, qui a permis de parvenir à un compromis. Ces textes, comme les comptes rendus des débats en attestent, font honneur au travail des parlementaires. Je regrette cependant, pour des raisons que je viens d’expliquer, que nous n’ayons pas été plus loin. Nous gagnerions en effet davantage à consulter et à écouter la nation. Cela éviterait la multiplication des reculades, des peurs et des sondages, qui désormais font office de votes.

Oui, il est des moments où les Français doivent descendre dans la rue et d’autres moments, lors des élections, où ils doivent exercer leur droit de vote, se rendre dans les préaux d’écoles et dans les mairies pour exprimer leur mécontentement ou leur adhésion à un gouvernement, à une équipe municipale ou à un Président de la République. Tous les représentants de la nation amoureux de la République et de la démocratie doivent rappeler aux citoyens que voter est un droit et un devoir.

Si, en évitant d’écouter l’exaspération de la rue, on pouvait faire comprendre aux citoyens que le vote est le moment pour eux de choisir leurs représentants et la politique qu’ils souhaitent voir appliquée, le Gouvernement, le Parlement et les élus se verraient confortés, ainsi que la démocratie et la République. En dépit du compromis auquel ont abouti les commissions mixtes paritaires, que nous trouvons un peu tiède, le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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